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Été brûlant en Hollandie : entre feux et contre-feux

9 août 2013

Temps de lecture : 17 minutes
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Été brûlant en Hollandie : entre feux et contre-feux

Temps de lecture : 17 minutes

Brétigny, Trappes, Brive : les canadairs médiatiques affrétés par le gouvernement pourront-ils circonscrire l’incendie ?

S’il est un para­doxe pour le moins frap­pant en cette ère de mon­di­al­i­sa­tion, c’est qu’alors que de nom­breuses fron­tières ont sauté entre les pays qui con­sti­tu­aient la vieille Europe, tan­dis que le glob­al eng­lish per­met de com­man­der les mêmes ham­burg­ers dans la plu­part des nations du monde, où il est pos­si­ble de couch­er dans les mêmes lits de chaînes d’hôtels stan­dard­is­és à Rio comme à Hong-Kong, et que toute dis­tance a été dras­tique­ment réduite par l’usage du kérosène, de nou­velles fron­tières se dressent pour­tant à l’intérieur même des plus antiques nations et des mieux unifiées, comme la nôtre. Ces « nou­velles fron­tières », pour ceux que dés­espér­erait cette uni­formi­sa­tion du monde, non seule­ment se trou­vent sou­vent à quelques sta­tions de RER de la cap­i­tale, mais en plus, si l’on ose les franchir, ces nou­velles fron­tières offrent même la pos­si­bil­ité d’un voy­age dans le temps. Tout le pit­toresque et la bar­barie des pilleurs d’épave, des assauts de Fort Apache et des antiques sol­i­dar­ités trib­ales renais­sent au cœur du « vivre-ensem­ble » et d’une république « nor­male ». Quoiqu’exotique et sin­gulière­ment mul­ti­cul­turelle, cette nou­velle réal­ité bat­tant en brèche l’idée d’une France moisie, réac­tion­naire et repliée sur elle-même, ne cor­re­spond pas au panora­ma édic­té par la nomen­cla­ture. Le pou­voir médi­a­tique qui, à quelques excep­tions près, est l’allié objec­tif du pou­voir poli­tique en place, joue donc le rôle de pom­pi­er illu­soire quand il s’agit d’éteindre les incendies véri­ta­bles, et de pyro­mane lorsqu’on exige de lui d’allumer au con­traire des con­tre-feux, lesquels accrédit­eraient une vision con­forme à l’idéologie tout en obéis­sant à une stratégie de diversion.

Brétigny : les pilleurs d’épave

Le 12 juil­let : déraille­ment du train Paris-Limo­ges à Brétigny-sur-Orges. Comme à chaque fois que l’on doit dépêch­er des sec­ours en cer­tains lieux à forte pop­u­la­tion immi­grée, et cela depuis des années, il faut égale­ment dépêch­er des sec­ours pour les sec­ours, c’est-à-dire per­me­t­tre aux pom­piers de tra­vailler der­rière des rangées de CRS. Cette réal­ité, pro­pre­ment scan­daleuse, sem­ble pour­tant désor­mais par­faite­ment inté­grée et ne pas sus­citer davan­tage d’indignation de la part d’ « indignés » pro­fes­sion­nels, sans doute soucieux de ne pas « stig­ma­tis­er » sym­bol­ique­ment des pop­u­la­tions habituées à stig­ma­tis­er à coups de pierre des hommes coupables de porter sec­ours. Tou­jours est-il que der­rière ce pre­mier scan­dale invis­i­ble s’en déroule un autre un peu plus cri­ant car ce coup-ci, on dépouille sec­ouristes, blessés et cadavres. Ce drame, qui fera six morts, sem­ble n’être perçu par la racaille que comme un fes­tin de charog­nards, une aubaine, une ani­ma­tion esti­vale impromptue. Comme lors de l’affaire Méric, les faits sont avérés, con­nus, rap­portés par des témoins directs ou, ici, des vic­times. Comme lors de l’affaire Méric, le gou­verne­ment pond pour­tant illi­co une ver­sion offi­cielle et les médias la relaient. « Inci­dents mineurs » pour BFMTV, quelques « badauds indis­ci­plinés » twitte Jérôme Guedj, le prési­dent PS du con­seil général de l’Essonne, des « actes isolés », min­imise le min­istre des trans­ports, Frédéric Cuvil­li­er, expres­sion reprise en titre par le 13h de France 2, le 13 juil­let. « Actes isolés » : il n’est pas néces­saire d’être cinquante pour vol­er l’ordinateur d’un homme saig­nant à terre, aus­si ces actes sont-ils for­cé­ment le fait d’individus. Mais ces indi­vidus ne sont pas des élé­ments exogènes infil­trés dans une foule pour prof­iter du nom­bre et per­pétr­er des exac­tions, ils appar­ti­en­nent à cette foule qui les cou­vre, qui ne se désol­i­darise aucune­ment, qui par­ticipe du même élan, aus­si la respon­s­abil­ité est-elle éminem­ment col­lec­tive. Si ce n’était le cas, pourquoi cer­tains « jeunes » n’auraient-ils pas dénon­cé les auteurs des déprédations ?

Des « badauds indisciplinés » aux bandes ethniques

Comme lors de l’affaire Méric, on assiste à un beau cafouil­lage médi­ati­co-poli­tique et dix jours plus tard, les nou­velles preuves col­lec­tées ne font que con­firmer l’univocité des pre­mières… Le quo­ti­di­en belge Express évoque la « con­fu­sion (qui) règne dans les médias français », alors que Libéra­tion a pure­ment et sim­ple­ment réfuté l’hypothèse du pil­lage des vic­times. Le 18 juil­let, Le Point, s’étant procuré un doc­u­ment offi­ciel de la direc­tion générale des CRS, peut affirmer : « A‑t-on voulu cacher une réal­ité trop dérangeante ? Con­traire­ment à la ver­sion offi­cielle véhiculée par les autorités poli­tiques, poli­cières et san­i­taires, il y a bel et bien eu des scènes de vol et de cail­las­sage après le déraille­ment du train Paris-Limo­ges à Brétigny-sur-Orge. » Le lende­main, Le Figaro récolte des témoignages provenant des syn­di­cats policiers de droite comme de gauche, con­fir­mant encore les faits, ain­si que de nou­velles preuves tan­gi­bles comme ce SMS retrou­vé sur le portable d’un sus­pect : « T’as trou­vé quoi dans les bagages ? ». Au sujet de ces vols réfutés par Libéra­tion, le pro­cureur de la République d’Évry affirme le 24 juil­let en avoir désor­mais la cer­ti­tude. Puis ce sont les caméras de sur­veil­lance qui con­fir­ment encore cette sin­istre réal­ité. On appren­dra en même temps sur RMC que les pom­piers, en plus de pier­res, ont dû subir des insultes par­mi lesquelles : « sale blanc ». Voilà qui fait beau­coup d’actes isolés, induit étrange­ment l’idée de lyn­chages racistes et donne l’impression d’avoir affaire, plutôt qu’à quelques « badauds indis­ci­plinés », à de véri­ta­bles ban­des cohérentes agis­sant en fonc­tion de critères eth­niques. Des ban­des qui, sans aucun doute, ne résu­ment pas la pop­u­la­tion immi­grée des ban­lieues français­es mais que celles-ci, quoi qu’il en soit, sécrètent.

Trappes : Fort Apache

Le 18 juil­let, un con­trôle de Niqab dégénère à Trappes. Les policiers affir­ment avoir été agressés physique­ment par le mari, emmené au poste. Le cou­ple, accom­pa­g­né de la mère de Cas­san­dra, la femme con­trôlée, pré­tend de son côté avoir subi insultes et bru­tal­ités. Quoi qu’il en soit, et avant que la sit­u­a­tion soit davan­tage éclair­cie, les rumeurs rameu­tent dès le lende­main entre 200 et 400 per­son­nes (selon Rue89) qui, après pres­sion des autorités religieuses locales, assiè­gent le com­mis­sari­at des Merisiers trans­for­mé en Fort Apache. Trois nuits d’émeutes embrasent la ville natale de Djamel Deb­bouze. Réac­tion du gou­verne­ment, par la voix de sa porte-parole, Najat Val­laud-Belka­cem : « Pas d’amalgame. » Réac­tion de la jus­tice : une seule peine de prison ferme réelle­ment exé­cutée, soit un « juge­ment d’apaisement » d’après l’un des avo­cats des jeunes gens ayant jeté des pier­res ou tiré au morti­er sur les policiers. Pour trois nuits d’émeutes. S’il ne faut pas faire d’amalgame, on ne com­prend pas ce qui a retenu le bras de la Jus­tice de s’abattre sévère­ment sur les émeu­tiers et autres chas­seurs de flics comme l’avait pour­tant promis Manuel Valls qui a si bien su cor­riger les mil­i­tants de la Manif pour tous. « Face à ce type de vio­lences, il est très impor­tant d’avoir une réponse forte et rapi­de. » marte­lait le min­istre dans un entre­tien accordé à Aujourd’hui en France, le 21 juil­let. S’il n’y a pas d’amalgame, il ne devrait n’y avoir ni « stig­ma­ti­sa­tion » de la com­mu­nauté musul­mane, ni crainte de la « stig­ma­tis­er » en punis­sant des actes aux­quels elle demeur­erait étrangère.

La version « locale »

Par­al­lèle­ment à la ver­sion des policiers, retenue par la jus­tice et non désavouée par le min­istre de l’intérieur, une télévi­sion locale va per­me­t­tre au mari de Cas­san­dra d’exposer sa ver­sion per­son­nelle. Le jeune con­ver­ti de 21 ans affirme n’avoir jamais ten­té d’étrangler un polici­er mais être seule­ment venu au sec­ours de sa femme et de sa belle-mère au cours d’un con­trôle par­ti­c­ulière­ment vir­il. Arguant que les nom­breux con­trôles aux­quels lui et sa femme ont été soumis se sont tou­jours déroulés sere­ine­ment et qu’ils ont tou­jours payé l’amende rel­a­tive à l’interdiction du voile inté­gral, celui-ci sem­ble con­va­in­cu de se présen­ter ain­si en citoyen irréprochable. L’idée qu’un bon citoyen n’enfreint pas sys­té­ma­tique­ment la loi de son pays en toute bonne con­science ne sem­ble même pas lui tra­vers­er l’esprit. Tout chez ce jeune homme évoque la pra­tique d’un islam « séces­sion­niste », ne serait-ce que son « mariage » exclu­sive­ment religieux : « Ce mariage réputé « hal­lal » (licite) n’a aucune valeur légale mais per­met aux jeunes de se fréquenter sans témoins (…) » lira-t-on dans Le Point du 25 juil­let. Per­son­ne, dans la presse, n’a sem­ble-t-il relevé cette autre infrac­tion man­i­feste aux lois de la République : « L’ar­ti­cle 433–21 du code pénal punit de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’a­mende tout min­istre d’un culte qui procède, de manière habituelle, aux céré­monies religieuses de mariage sans que lui ait été jus­ti­fié l’acte de mariage préal­able­ment reçu par les officiers de l’é­tat civ­il. » C’est l’interférence, en défini­tive, entre le régime français et le régime d’un Islam autonome au sein de la nation qui paraît scan­daleuse à Mick­aël comme à ses inter­vieweurs. Deux per­spec­tives inc­on­cil­i­ables s’affrontent, cha­cune de bonne foi. Celle des policiers man­datés pour faire appli­quer la loi de la République, même en ter­ri­toire islamisé, et celle de musul­mans récla­mant une coex­is­tence paci­fique avec une République mécréante dont ils ne recon­nais­sent ni la légitim­ité ni les lois (mais dont ils acceptent les subsides).

Solidarité islamique

« Pas d’amalgame », n’ont cessé de répéter les min­istres social­istes, pour­tant, l’amalgame va être immé­di­ate­ment réal­isé par un cer­tain nom­bre d’associations musul­manes, lesquelles vont s’inscrire dans un rap­port de sol­i­dar­ité instinc­tif avec le cou­ple con­trôlé et les émeu­tiers. La pres­sion de ces asso­ci­a­tions qui agis­sent comme des lob­bies religieux va don­ner lieu à une étrange rela­tion des faits par les médias. À parts égales, vont être présen­tées deux ver­sions qui s’affrontent : la pre­mière, celle de la police, soutenue par un gou­verne­ment rap­pelant l’importance de faire une dis­tinc­tion entre les événe­ments de Trappes et l’Islam en France. La sec­onde, celle du cou­ple, trans­mise par les asso­ci­a­tions musul­manes sol­idaires qui expliquent les émeutes comme une con­séquence de l’islamophobie… Ain­si, le 20 juil­let, on trou­vera par exem­ple la men­tion du site musul­man « Al-Kanz » sur Rue 89, une réfu­ta­tion de la ver­sion de la police soutenue par le CCIF (Col­lec­tif con­tre l’islamophobie en France) sur Medi­a­part et dans Le Monde s’ajoute encore le sou­tien du CRI (la Coor­di­na­tion con­tre le racisme et l’islamophobie), quand chez 20 min­utes, c’est Abdal­lah Zekri, prési­dent le l’Observatoire de l’islamophobie, qui vient au sec­ours du cou­ple. L’enchaînement des faits est donc assez éclairant : un cou­ple pra­ti­quant un islam séces­sion­niste se con­fronte à la police. Le « mari » arrêté, les autorités religieuses vien­nent à son sec­ours. Celles-ci rebutées, ce sont les émeu­tiers qui brû­lent et assiè­gent le com­mis­sari­at. L’affaire relayée dans les médias, ce sont ensuite les asso­ci­a­tions musul­manes qui font corps der­rière leurs coreligionnaires.

Le danger islamophobe

Devant une telle offen­sive con­tre la légitim­ité répub­li­caine mobil­isée spon­tané­ment en fonc­tion d’un référent religieux, jouant sur un chan­tage à la destruc­tion et un chan­tage moral à l’islamophobie (terme forgé en 1979 par les Mol­lah iraniens), on aurait pu s’attendre à une con­tre-offen­sive sérieuse du gou­verne­ment ne serait-ce qu’au nom de la défense de son autorité et de sa légitim­ité. Non seule­ment, une seule peine de prison a sanc­tion­né les émeutes, mais de sur­croît, la rhé­torique fal­lac­i­euse ser­vant la cause d’un islam séces­sion­niste, a été reprise et validée en par­tie par les médias de gauche : « Le con­texte islam­o­phobe joue-t-il un rôle ? » s’interroge Libé le 22 juil­let. Pire, c’est bien­tôt la loi musul­mane qui est défendue pri­or­i­taire­ment à celle de la République par cer­tains élus de la République. Ain­si : « La séna­trice EELV Esther Ben­bas­sa a tweeté same­di : «Trappes brûle. Quand notre min­istre Valls com­pren­dra-t-il les dérives aux­quelles donne lieu le con­trôle d’identité injuste et injus­ti­fié ?» peut-on lire dans le Figaro du 21 juil­let. Plus rad­i­cal encore, le soci­o­logue Hugues Lagrange exprime dans Le Monde du 24 juil­let des idées pour le moins orig­i­nales : « Ce qui s’est passé à Trappes révèle d’abord l’ab­sur­dité de con­trôles opérés en plein Ramadan (…) ». La loi ne s’appliquerait donc plus pen­dant le Ramadan ? Mieux, les coupables ne sont plus les délin­quants mais la pop­u­la­tion autochtone rétive à accepter une séces­sion islamique sur son pro­pre ter­ri­toire : « Dans les sociétés européennes, les réac­tions eth­no­cen­triques des pop­u­la­tions autochtones à l’é­gard des musul­mans se sont mul­ti­pliées ». Dans l’Human­ité du 22 juil­let, Bruno Vin­cens désigne le véri­ta­ble fau­teur de trou­bles : « Le FN s’est pré­cip­ité pour dévers­er sa haine sur, pêle-mêle, la reli­gion musul­mane et l’im­mi­gra­tion. Le con­trôle d’i­den­tité de Trappes, tel qu’il s’est déroulé, s’in­scrit-il dans le cli­mat islam­o­phobe actuel, comme le dénon­cent les asso­ci­a­tions musul­manes ? » Quand la gauche poli­tique se retrou­ve dans une posi­tion schiz­o­phrénique, la gauche médi­a­tique prend le par­ti de la séces­sion religieuse et accuse le peu­ple orig­inel. Mais cette ten­ta­tive de séces­sion vis­era-t-elle unique­ment la société française ? En effet, dans Vos­ges Matin, le 23 juil­let, on apprend qu’ « une autre ten­sion, latente, existe à Trappes. Depuis une quin­zaine d’an­nées, la com­mu­nauté maghrébine, prin­ci­pale­ment d’o­rig­ine maro­caine et algéri­enne, a vu arriv­er de nom­breux Con­go­lais. “Ils vendent de l’al­cool sous le nez de nos enfants”, con­teste Mostapha, 59 ans. »

Brive : la France tribale

15 juil­let, Brive-la-Gail­larde : dans la journée, des « jeunes » du « quarti­er pop­u­laire » des Chapélies, s’introduisent dans une rési­dence privée pour prof­iter de la piscine et sèment un cer­tain désor­dre. L’un des rési­dents, appar­tenant au 126ème rég­i­ment d’infanterie, s’imagine sans doute, alors qu’il vient d’expulser les islamistes du Mali, en mesure de repouss­er ces « jeunes » hors de sa pro­priété privée. Mal lui en prend, le voici passé à tabac. Sa femme, enceinte de trois mois, suite à ces événe­ments, fait une fausse couche. Le lende­main, ses frères d’armes l’accompagnent aux Chapélies pour régler leurs comptes. S’en suiv­ent des affron­te­ments entre plusieurs dizaines de per­son­nes dans la nuit de 16 au 17 juil­let, puis l’interpellation de sept prévenus. Les policiers et les pom­piers venus pour inter­rompre la rixe seront bien sûr vic­times d’agressions de la part des « jeunes » qu’ils sont venus défendre… L’un des sol­dats exprimera son désar­roi sur le site Con­tre­point : « À notre plus grande sur­prise – mau­vaise sur­prise –, les médias lais­sent enten­dre que les fau­teurs de trou­ble seraient les mil­i­taires ! (…) Pourquoi les médias nous salis­sent-ils comme ça ? » D’un autre côté, « on peut s’étonner que cette affaire soit peu relayée par la presse nationale », relève le même site. La rai­son en est pour­tant sim­ple : quand elle ne tente pas de nier les faits comme à Brétigny, ni d’en manip­uler la récep­tion comme à Trappes, la presse aux ordres se con­tente de les taire. Encore une fois, le souci n’est ni la jus­tice ni la vérité mais de « calmer les esprits des deux côtés » et de « ne pas stig­ma­tis­er » en « mon­tant une com­mu­nauté con­tre une autre ». Où l’on peut con­stater que la munic­i­pal­ité de Brive a entériné une divi­sion com­mu­nau­taire de la nation française.

Contre-feux / 1 : Vikernes

La dis­lo­ca­tion du ter­ri­toire selon des normes eth­ni­co-religieuses est donc sérieuse­ment avancée, et les nom­breuses explo­sions qu’un tel proces­sus entraîne se sont mul­ti­pliées en ce mois de juil­let. La plu­part des médias joue le jeu du gou­verne­ment dans sa volon­té de mas­quer ce véri­ta­ble désas­tre poli­tique, his­torique et nation­al. Tous les moyens sont bons pour par­venir à dis­simuler ou maquiller cette réal­ité aux yeux du peu­ple. Mais l’une des tech­niques les plus remar­quables que le sys­tème médi­ati­co-poli­tique emploie, est celle d’allumer égale­ment des con­tre-feux pour focalis­er l’attention sur de faux dan­gers et s’arroger une légitim­ité à bon compte en dépit de ses trahisons. Le levi­er a beau être grossier et rouil­lé jusqu’au bout du manche, il est action­né sans cesse dans une espèce de panique hagarde, en cri­ant au retour de la bête. Ain­si, après la com­para­i­son des Man­i­fs pour tous avec les ligues des années 30, après l’imposture fla­grante de l’affaire Méric pour faire croire à un défer­lement sanglant des chemis­es brunes sur le pays, l’antifascisme d’apparat et de diver­sion a‑t-il créé de toutes pièces, en moins d’un mois, un symp­tôme illu­soire et une men­ace fac­tice. Les vrais néo-nazis étant décidé­ment dif­fi­ciles à recruter pour les besoins de la pro­pa­gande, il a fal­lu se rabat­tre sur un musi­cien de black met­al norvégien reclus dans une ferme cor­rézi­enne. L’interpellation a eu lieu le 16 juil­let et a béné­fi­cié d’une très forte cou­ver­ture médi­a­tique juste après les pil­lages de Brétigny et en même temps que les rix­es entre mil­i­taires et « jeunes » à Brive étaient au con­traire occultées. Après avoir dû se jus­ti­fi­er au sujet de pho­tos mon­trant ses enfants occupés à jouer avec des épées en bois et des armes en plas­tique, Kris­t­ian Vikernes affirme avoir été bien traité par des policiers qui, selon lui, « avaient des ordres «d’en haut» et «ont juste ten­té de clar­i­fi­er les choses». En atten­dant, « chaque semaine, la DCRI inter­pelle puis relâche sans bruit des islamistes rad­i­caux : depuis jan­vi­er, plus de 40 inter­pel­la­tions ont eu lieu… mais moins d’une quin­zaine de per­son­nes ont été écrouées », pré­cise Le Monde. Les quinze vrais ter­ror­istes islamistes auront donc, depuis jan­vi­er, été inter­pel­lés, eux, dans un par­fait silence médi­a­tique. Bel exem­ple d’usage des fais­ceaux des médias en fonc­tion d’intérêts pure­ment idéologiques.

Contre-feux / 2 : Bourdouleix

À par­tir du 22 juil­let, et alors que Trappes sort tout juste de sa phase incen­di­aire, va être inten­si­fié le lyn­chage médi­a­tique et poli­tique du député-maire de Cho­let, Gilles Bour­douleix. Après l’installation illé­gale de 150 car­a­vanes de « gens du voy­age » sur sa com­mune et une con­fronta­tion pour le moins ten­due avec les Roms le trai­tant de nazi, le maire mar­monne un « Hitler n’en a peut-être pas tué assez » illi­co retran­scrit et dénon­cé par Le Cour­ri­er de l’Ouest. La con­sid­éra­tion est, bien enten­du, par­faite­ment immonde. Néan­moins, nul besoin d’être un émi­nent psy­cho­logue pour com­pren­dre qu’elle trahit moins le fond de la pen­sée de l’élu que son exas­péra­tion. Si l’on respecte un min­i­mum le sens des mots, il est impos­si­ble de con­sid­ér­er des mots mar­mon­nés qui échap­pent à leur auteur dans un con­texte de ten­sion comme une « apolo­gie ». Néan­moins, cette accu­sa­tion grotesque va être portée par Jean-Marc Ayrault, le pre­mier min­istre français se devant, en effet, de s’attaquer frontale­ment aux prob­lèmes qui minent le pays. « Il doit être sanc­tion­né très lour­de­ment par la jus­tice », ful­mine Manuel Valls sur i>Télé. Con­traire­ment aux émeu­tiers de Trappes, insin­ue sans doute le min­istre de l’intérieur… Et voilà com­ment la mal­heureuse phrase va obséder les médias, polaris­er l’indignation sélec­tive, nour­rir le fan­tasme obses­sion­nel du retour de la Bête immonde, et recou­vrir d’un invraisem­blable vacarme les graves ques­tions soulevées par un com­mis­sari­at assiégé ou des cadavres dépouil­lés par des ban­des ethniques.

Conclusion

Le mois de juil­let 2013 s’achève donc sur la con­damna­tion unanime du maire de Cho­let, sa mise en accu­sa­tion par le préfet du Maine-et-Loire pour « apolo­gie de crime con­tre l’humanité » qui pour­rait lui val­oir cinq ans de prison ferme et 45 000 euros d’amende, ain­si que sur la traque des policiers ayant pu com­met­tre des « bavures ver­bales », comme l’énonce joli­ment Le Cour­ri­er Picard du 24 juil­let, suite aux émeutes de Trappes (Après les vio­lences urbaines qui ont frap­pé la ville de Trappes, suite au con­trôle d’une femme inté­grale­ment voilée, des com­men­taires « au con­tenu vio­lent et par­fois raciste » ont été postés sur une page Face­book inti­t­ulée « Forum police-info.com ») Tout ce qui peut faire office de bouc émis­saire est donc sur­ex­ploité dans sa fonc­tion de diver­sion. Tan­dis que les émeutes qui ont embrasé la ville de Creil entre le 25 et le 27 juil­let ont fini par s’éteindre, il y a cepen­dant fort à pari­er qu’il fau­dra encore dénich­er de nom­breux pré­ten­dus fas­cistes, sec­ta­teurs de la Bête et autres dérapeurs impéni­tents, pour con­tin­uer de détourn­er le regard d’un peu­ple dont la nation presque bimil­lé­naire se décom­pose chaque mois davan­tage, d’une flam­bée à l’autre, dans l’indifférence de ses pro­pres gouvernants.

M.D.

Crédit pho­to : zigazou76 via Flickr (cc)