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Patrick Drahi : vers la fin de cycle de l’aventure médiatique ?

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18 avril 2024

Temps de lecture : 4 minutes
Accueil | Veille médias | Patrick Drahi : vers la fin de cycle de l’aventure médiatique ?

Patrick Drahi : vers la fin de cycle de l’aventure médiatique ?

Temps de lecture : 4 minutes

Patrick Drahi doit éponger 24 milliards de dette avec son empire Altice. Il a déjà lâché du lest en abandonnant la chaîne d’information en continu BFMTV et RMC, il semble tourner le dos à son ambition médiatique, au moins le temps de refaire de la trésorerie.

Une transaction à bas bruit comparée à Bolloré

Au mois de mars 2024, Patrick Drahi annonçait la vente de son pôle média au mil­liar­daire fran­co-libanais Rodolphe Saadé pour 1,55 mil­liard d’euros.

Une trans­ac­tion qui impli­quait la ces­sion de BFMTV et RMC, deux acteurs majeurs de l’information en France. La vente de ces deux entités a fait beau­coup moins de bruit que les mélo­drames qui ont entouré les ventes de médias au prof­it de Vin­cent Bol­loré. Et pour­tant, à l’heure de la crainte de l’ingérence étrangère dans les médias, Drahi comme Saadé offrent moins de garanties que le mil­liar­daire bre­ton. Rodolphe Saadé est fran­co-libanais quand Patrick Drahi dis­pose des citoyen­netés française, maro­caine, israéli­enne, por­tu­gaise et christo­phi­enne (Ile de Saint-Christophe).

24 milliards à trouver, les banques entre deux feux

Aujourd’hui, le groupe Altice pour­rait se ven­dre 23 mil­liards d’euros hors activ­ités aux USA.

Le groupe intè­gre des activ­ités divers­es dans la com­mu­ni­ca­tion, les médias, le diver­tisse­ment et la pub­lic­ité. Instal­lé en France (notam­ment en Out­re-mer), en Israël, au Por­tu­gal et en République domini­caine, il ne s’agit pas d’un géant mon­di­al de l’information et de la com­mu­ni­ca­tion mais le groupe touche poten­tielle­ment plus de 100 mil­lions de per­son­nes hors les activ­ités améri­caines, elles aus­si endettées.

Avec une dette supérieure de 1 mil­liard à la valeur du groupe (estimée à 23 mil­liards d’euros), Altice n’est aujourd’hui pas vend­able en l’état ou alors avec décote… Patrick Drahi entend donc réduire sa dette, en con­va­in­quant ses créanciers de reven­dre la leur, avec une forte décote. Il espère ain­si ramen­er sa dette de 24 mil­liards à 15/16 mil­liards d’euros et sor­tir gag­nant d’une opéra­tion d’apparence mal engagée. Un braquage de ban­ques bien con­nu : si vous devez cent mille euros à votre banque vous ne dormez plus, si vous devez un mil­liard c’est le ban­quier qui ne dort plus.

Des négociations dans l’ombre

Patrick Drahi a fait for­tune en s’endettant. Son par­cours depuis trois décen­nies con­siste à un rachat presque con­vul­sif d’entreprises et médias en s’endettant. Une méth­ode ren­due pos­si­ble par ses rela­tions ain­si qu’une véri­ta­ble com­préhen­sion du monde des affaires et de son époque. Il sem­ble néan­moins être arrivé au bout d’un cycle et après les ces­sions de mars, d’autres devraient arriv­er dans les mois à venir pour combler la prochaine échéance du groupe Altice (1,3 mil­liard d’euros à trou­ver en 2024/2025), et le dégrais­sage va con­tin­uer. Pour l’opérateur majeur de télé­phonie SFR, pro­priété d’Altice, il pour­rait être cédé à un des deux autres his­toriques du secteur : Bouygues ou Orange, même si le risque monop­o­lis­tique pour­rait ren­dre l’opération assez dif­fi­cile. À moins qu’un fonds ne prenne une par­tic­i­pa­tion minori­taire mais en posant ses conditions.

Bras de fer avec les créanciers

La bataille qui se joue aujourd’hui est loin des plateaux télévisés et demeure peu com­préhen­si­ble pour le grand pub­lic. Il s’agit de négo­ci­a­tions avec les créanciers du groupe, surtout avec les ban­ques et leurs avo­cats. Comme tou­jours, Drahi marche sur des œufs et des créanciers fâchés pour­raient être ten­tés de sor­tir des dossiers gênants ou de favoris­er la sor­tie de con­tenus désta­bil­isants pour l’homme d’affaires. Celui-ci est déjà touché par un scan­dale de cor­rup­tion au Por­tu­gal avec l’un de ses bras droit, Arman­do Pereira, qui se serait enrichi sur le dos d’Altice. Le mil­liar­daire a vu le Par­quet nation­al financier se saisir du dossier en France.

Voir aus­si : Patrick Drahi a des soucis avec le fisc suisse

L’adieu aux médias ?

Réputé dur en affaire et pas franche­ment sen­ti­men­tal, Drahi sem­ble avoir dit adieu à son empire médi­a­tique pour mieux rebondir ailleurs (aux Etats-Unis ?) ou pour revenir plus tard. À 60 ans, il lui reste  de belles années devant lui.

Inter­rogé dans les colonnes du Figaro, un spé­cial­iste de la banque estime que : « la dif­férence fon­da­men­tale entre Patrick Drahi et Jean-Charles Naouri, c’est que le sec­ond voulait mourir avec sa boîte, c’était son enfant. Drahi, tout ce qui l’intéresse, c’est l’argent ». Une référence au patron du groupe Casi­no fraîche­ment par­ti de celui-ci fin mars.

Une méth­ode Drahi qui inquiète du côté des salariés de SFR, qui craig­nent de voir du jour au lende­main un change­ment de direc­tion boule­vers­er le fonc­tion­nement de l’entreprise.

Côté empire médi­a­tique, Drahi sem­ble avoir tourné le dos à cette péri­ode et le dernier média con­nu qu’il détient est la chaîne israéli­enne « i24News ». Véri­ta­ble out­il d’influence auprès du Pre­mier min­istre israélien Ben­jamin Netanya­hou, la chaîne sem­ble pour le moment être à l’abri d’une vente…