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Les derniers petits poussins d’Edwy Plenel

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7 juin 2022

Temps de lecture : 12 minutes
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Les derniers petits poussins d’Edwy Plenel

Temps de lecture : 12 minutes

Le Fonds pour une presse libre (FPL), détenant le capital de la société éditrice de Médiapart via une structure intermédiaire, vient d’annoncer les résultats de son troisième appel à projets destiné à soutenir financièrement des « titres indépendants ».

Les projets soutenus jusqu’à présent

Par le passé, le FPL a déjà soutenu sept médias : dans le cadre du pre­mier appel à pro­jets (décem­bre 2020), la Revue Far Ouest à hau­teur de 20 000 euros, Gui­ti News à hau­teur de 15 000 euros et Ori­ent XXI à hau­teur de 20 000 euros ; dans le cadre du deux­ième appel (juil­let 2021), Le Poulpe à hau­teur de 20 000 euros, Dis­close à hau­teur de 17 000 euros, Le Ravi à hau­teur de 17 000 euros et Radio Par­leur à hau­teur de 17 000 euros.

Notons par­mi ces médias soutenus par le FPL la présence de Gui­ti News, un site rédigé à moitié par des migrants/réfugiés et à moitié par des jour­nal­istes français. Le média Radio Par­leur fait lui aus­si la part belle à la pro­mo­tion de l’immigration tout étant plus général­iste puisqu’il se dit « spé­cial­isé dans la cou­ver­ture des luttes sociales, fémin­istes, antiracistes, migra­toires et écologiques. »

Sans oubli­er l’inénarrable Le Ravi, men­su­el spé­cial­isé dans « l’investigation régionale » et dif­fusé dans le réseau presse en Provence-Alpes-Côte d’Azur, qui a été accom­pa­g­né dans sa tran­si­tion numérique grâce au sou­tien du FPL. En mai 2022, ce « jour­nal citoyen investi dans l’éducation aux médias et les quartiers pop­u­laires » s’est illus­tré par un arti­cle inti­t­ulé « Fachos, con­tre le virus fas­ciste, un seul vac­cin : la liberté ! » :

« Mon voisin le facho. Il ne faut pas s’y faire. Mais il ne faut surtout pas non plus se voil­er la face. Si la France avait voté comme en Paca, l’héritière de Jean-Marie Le Pen, de Pétain et autres som­bres crétins, serait prési­dente de la République. Dans notre région, 1 237 813 électeurs ont plébisc­ité la can­di­date raciste. […] Il y a tou­jours pire. Au 1er tour, c’est égale­ment en Paca, Corse excep­tée, que Zem­mour a fait son meilleur score : 11,71 %. Le racisme est aus­si le moteur de ses 310 837 électeurs mais s’y ajoute la haine de classe : celle des plus pau­vres, que la plu­part ne croisent pour­tant pas sou­vent. Le tout couron­né par le mépris et la crainte des femmes émancipées. »

FPL 2022, une cuvée généreuse

Le 1er juin 2022, à l’occasion de la pub­li­ca­tion des résul­tats de son troisième appel à pro­jets, le FPL annonce avoir voulu « pass­er un cap ». La somme déblo­quée cette année est en effet de 165 000 euros, alors qu’elle était de 71 000 euros en 2021 et de 50 000 euros en 2020. Le nom­bre de pro­jets primés a lui aus­si aug­men­té et passe à neuf.

Ont été retenus pour un finance­ment les médias suiv­ants : Le Cour­ri­er des Balka­ns, Mediac­ités et Street­Press, qui béné­ficieront cha­cun d’une avance rem­boursable de plus de 30 000 euros ; Inf’OGM, L’Empaillé, La Défer­lante, Reflets.info, Splann ! et Tran­srur­al Ini­tia­tives, qui se voient attribuer des sub­ven­tions, « générale­ment de 15 000 euros, par­fois moins pour des pro­jets plus limités. »

À l’assaut des provinces rétrogrades et corrompues !

L’Empaillé est un jour­nal trimestriel basé sur l’Occitanie et relaie des « luttes sociales, écologiques, fémin­istes ou anti-racistes, [et enquête] sur les pou­voirs locaux, qu’ils soient médi­a­tiques, économiques ou politiques. »

Opposé à la presse locale financée par le groupe Baylet, son slo­gan est : « L’Empaillé aux bar­ri­cades, La Dépêche aux ordres ». Ce jour­nal fait par­tie d’une série de titre régionaux soutenus par la galax­ie Médi­a­part con­sid­érant la PQR comme trop bour­geoise et réactionnaire.

Les médias locaux de ce type pul­lu­lent : La Ravi en PACA (soutenu par le FPL en 2021), Le Poulpe en Nor­mandie (soutenu par le FPL en 2021), Le Pos­til­lon à Greno­ble, La Brique à Lille, La Let­tre à Lulu à Nantes ou encore Médiac­ités, un jour­nal en ligne d’investigation indépen­dante à Lille, Lyon, Nantes et Toulouse.

Médiac­ités, qui compte 100 pigistes, est à l’origine de l’ouverture de plusieurs infor­ma­tions judi­ci­aires et a mis en place un pro­jet nom­mé Bib­lioc­ités, des­tiné à « favoris­er l’accès à [ses] inves­ti­ga­tions locales dans les bib­lio­thèques munic­i­pales ou uni­ver­si­taires », et con­sis­tant en « un levi­er pour démoc­ra­tis­er l’accès à l’information locale indépen­dante et pour sen­si­bilis­er de nou­veaux publics au jour­nal­isme d’investigation. » Ce pro­jet intè­gre aus­si « l’organisation d’ateliers-débats sur le jour­nal­isme et l’utilité d’une presse indépen­dante en régions. »

Djihad vert

Par­mi les lau­réats FPL 2022, on retrou­ve aus­si Splann ! [« clair », en bre­ton], nou­veau média d’investigation locale en Bre­tagne « qui tra­vaille sur des sujets d’intérêt pub­lic. » Ce média revendique pour par­rain Dis­close, soutenu par le FPL en 2021, et se tar­gue d’un fonc­tion­nement sur le mod­èle ONG ayant pour pour objec­tif « d’éclairer des zones d’ombre en Bre­tagne pour racon­ter l’envers de la carte postale. » Ses enquêtes sont surtout axés sur les prob­lé­ma­tiques envi­ron­nemen­tales (pol­lu­tion de l’air, indus­trie agro-ali­men­taire, entre­pris­es du secteur de l’énergie, etc.). Les con­tenus de ce site sont disponibles en français et en breton.

Dans la pro­mo­tion FPL 2022, on trou­ve aus­si Tran­srur­al ini­tia­tives, « la revue des ter­ri­toires ruraux », un bimestriel d’information sur le monde rur­al pub­lié par l’ADIR (Agence de dif­fu­sion et d’information rurales), asso­ci­a­tion d’édition du Réseau Civam, du MRJC (Mou­ve­ment rur­al de jeunesse chré­ti­enne), du réseau Reli­er, de Cap rur­al et du réseau des Cre­fad. Cette revue se définit comme un « média par­tic­i­patif et indépen­dant, et [elle est] portée par des organ­i­sa­tions de développe­ment agri­cole et rur­al qui se recon­nais­sent dans les valeurs de l’éducation pop­u­laire, [et] réal­isée par une équipe asso­ciant mil­i­tants asso­ci­at­ifs, ani­ma­teurs et journalistes. »

Tou­jours dans la veine écologique, le FPL va égale­ment soutenir Inf’OGM, une « veille citoyenne […] qui décrypte l’actualité mon­di­ale et pro­pose un ser­vice unique d’information fran­coph­o­ne sur les OGM, les biotech­nolo­gies, la pri­vati­sa­tion du vivant, égale­ment sur les semences. »

Soutien au journalisme « post-#metoo »

La Défer­lante est une revue trimestrielle papi­er fondée en 2021 « qui analyse notre société au prisme du genre, à l’appui de for­mats jour­nal­is­tiques var­iés. » Elle se présente comme étant « la revue des révo­lu­tions fémin­istes » et « analyse l’époque dans une per­spec­tive fémin­iste. » Sur son site, on peut lire cette présentation :

« La Défer­lante est la pre­mière revue trimestrielle post-#metoo con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société. Créée et dirigée exclu­sive­ment par des femmes, La Défer­lante donne la parole aux femmes et aux minorités de genre et vis­i­bilise leurs vécus et leurs combats. »

Les qua­tre fon­da­tri­ces de cette revue vien­nent toutes du monde de la presse et de l’édition :

  • Marie Bar­bi­er : Jour­nal­iste indépen­dante spé­cial­isée dans les ques­tions judi­ci­aires. Après treize années au quo­ti­di­en LHuman­ité, elle col­la­bore aujourd’hui avec Reporterre et dia­part.
  • Lucie Gef­froy : Jour­nal­iste indépen­dante, elle a tra­vail­lé comme éditrice et cheffe de rubrique pour Cour­ri­er inter­na­tion­al puis Le Monde tout en col­lab­o­rant à divers médias.
  • Emmanuelle Le Josse : Coor­di­na­trice édi­to­ri­ale dans l’édition et la com­mu­ni­ca­tion, et cofon­da­trice du P.A.F – Col­lec­tif pour une parental­ité féministe.
  • Mar­i­on Pil­las : Pro­duc­trice de doc­u­men­taires et autrice, elle a tra­vail­lé pour les rédac­tions de France Télévi­sions puis au sein de dif­férentes sociétés de production.

Voir aus­si notre brochure papi­er : Le Néo-fémin­isme à l’as­saut d’Internet

StreetPress, les Bolchéwokes mobilisés contre l’extrême droite !

Street­Press, primé dans la dernière pro­mo­tion FPL, met un point d’honneur à se bat­tre con­tre l’extrême droite, en a fait son leit­mo­tiv.

Le sou­tien du FPL per­me­t­tra, selon le fon­da­teur du site, Johan Weisz-Myara, de fix­er un nou­veau cap vers la pro­fes­sion­nal­i­sa­tion de Street­Press et de per­me­t­tre à ce média de se financer par le mem­ber­ship.

Ce « média d’enquêtes et de cul­ture urbaine » (« sur Paris et en ban­lieue ») est un bijou de bien-pen­sance et de jour­nal­isme d’extrême gauche mil­i­tant. Tout y passe : pro­mo­tion de l’immigration et des droits LBGT, éman­ci­pa­tion par le voile, dénon­ci­a­tion de l’extrême droite, vio­lences poli­cières (la spé­cial­ité du rédac­teur en chef de Street­Press Math­ieu Molard), islam­o­pho­bie, éloge du rap de ban­lieue, etc. Une liste com­plète serait impos­si­ble à dress­er tant Street­Press n’en rate pas une pour don­ner dans le pro­gres­sisme rad­i­cal et la décon­struc­tion de tout ce qui irrite la gauche bien-pensante.

Le coup de pouce apporté par le FPL à Street­Press arrive alors que le média annonçait il y encore peu ses dif­fi­cultés finan­cières. Point intéres­sant : dans sa vidéo de remer­ciement au FPL, « Jo » Weisz explique que « le mod­èle de finance­ment par la com­mu­nauté » représente à l’heure actuelle 25% des revenus du média. Selon lui, ce sou­tien par les lecteurs est celui qui assure « réelle­ment l’indépendance par rap­port à tous les autres mod­èles de revenus ». Est-ce à dire que 75% des revenus de Street­Press ne per­me­t­tent pas une réelle indépendance ?

Les Balkans inclusifs

« Plus d’abonné.e.s, plus d’autonomie finan­cière, de meilleurs con­tenus ». C’est sous ce titre que l’équipe du Cour­ri­er des Balka­ns, « site de référence sur l’actualité des pays des Balka­ns », a tenu à présen­ter son pro­jet auprès du FPL.

Fondé en 1998 pour « faire con­naître en français l’actualité de treize pays de l’Europe du Sud-Est », ce média compte une ving­taine de cor­re­spon­dants étab­lis dans ces pays. Selon Simon Rico, co-rédac­teur en chef du Cour­ri­er des Balka­ns, l’accent est mis sur les ques­tions de société actuelles : l’écologie, les luttes citoyennes et la défense des droits des femmes et des minorités.

Le site est en effet très fourni en con­tenus pro-LGBT, à tel point que ces derniers jouis­sent d’une rubrique dédiée intro­duite comme suit :

« Bel­grade, Split, Sofia, Zagreb, Pod­gor­i­ca, Skop­je, Sara­je­vo… Les « march­es des fiertés » sont régulière­ment men­acées ou attaquées par des « hooli­gans » néo-fas­cistes, voire inter­dites par des autorités poli­tiques frileuses et com­plaisantes. Mal­gré cela, les mou­ve­ments gays des Balka­ns enten­dent pour­suiv­re leur com­bat. Le point sur les droits et les mobil­i­sa­tions des per­son­nes LGBT dans les dif­férents pays de la région. »

Le Cour­ri­er des Balka­ns ne fait pas grand mys­tère de sa ligne édi­to­ri­ale :

« Média engagé, résol­u­ment anti­na­tion­al­iste, Le Cour­ri­er des Balka­ns accorde une atten­tion par­ti­c­ulière aux ques­tions sociales et envi­ron­nemen­tales, aux droits des femmes et des minorités, à la tran­si­tion économique et énergé­tique, aux solu­tions inno­vantes. Sans oubli­er les dossiers qui plombent tou­jours l’avenir de ces pays, comme le recul de l’État de droit, la cor­rup­tion ou le crime organisé […] »

Le directeur de la pub­li­ca­tion du site est Amaël Cat­taruz­za, doc­teur en géo­gra­phie, mem­bre du comité de rédac­tion des revues Espace poli­tique et Balka­nolo­gie et pro­fesseur des uni­ver­sités à l’Institut français de géopoli­tique (IFG), un insti­tut duquel est diplômé Corentin Léo­tard, le rédac­teur en chef du Cour­ri­er d’Europe centrale. 

Le Cour­ri­er d’Europe cen­trale et Le Cour­ri­er des Balka­ns sont aux côtés de Novas­tan (média sur l’Asie cen­trale) à l’initiative du Col­lec­tif pour un nou­veau jour­nal­isme inter­na­tion­al. Ce réseau rassem­ble des sites d’information fran­coph­o­nes d’actualité inter­na­tionale partageant les mêmes mod­èles édi­to­r­i­al et économique (des médias qui priv­ilégient « la coopéra­tion sur la com­péti­tion et les archipels édi­to­ri­aux sur la con­cen­tra­tion des médias »). Font aus­si par­tie de ce réseau Asi­a­lyst (Asie), La Dame de Pique (jour­nal cul­turel dédié à la Russie), Gare de l’Est (Europe de l’Est), Let­tres per­sanes (Iran), Ori­ent XXI (Proche-Ori­ent, média soutenu par le FPL en 2020) et Rojin­fo (Kur­dis­tan, Moyen-Orient).

On retrou­ve aus­si Le Cour­ri­er des Balka­ns et Le Cour­ri­er d’Europe cen­trale par­mi près d’une cen­taine de médias sig­nataires de « l’Appel des Indépen­dants ». Une liste qui donne un bon aperçu de la nébuleuse Plenel.

Pour couronner le tout : un soutien à un projet d’OSINT

Le jour­nal d’investigation et d’information-hacking Reflets.info a lui aus­si été choisi par le FPL cette année. Pour être plus pré­cis : la somme allouée par le FPL à ce site sera des­tinée au développe­ment d’un « vaste out­il » d’aide à l’investigation pour les jour­nal­istes de médias indépen­dants. Il s’agit de l’utilisation d’outils d’OSINT (ren­seigne­ment de sources ouvertes).

Ce média, qui « pro­duit des enquêtes au long cours et des analy­ses visant à met­tre les faits en per­spec­tive », utilise Datashare (un out­il fourni par le Con­sor­tium inter­na­tion­al des jour­nal­istes d’investigation [ICIJ]) pour regrouper toutes ses don­nées récoltées au fil de ses enquêtes depuis le lance­ment du site en 2011. Y sont égale­ment inté­grées des don­nées issues d’internet et de sites situés sur le réseau Tor.

Reflets.info a pour objec­tif de reli­er ces don­nées avec celles d’un autre out­il de ren­seigne­ment en sources ouvertes qu’elle utilise, Mal­tego, pour à terme « met­tre ces développe­ments à dis­po­si­tion d’autres médias indépen­dants. » C’est cet out­il qui avait notam­ment per­mis à Reflets.info de réalis­er un graphique fouil­lé sur la présence d’Éric Zem­mour sur Inter­net. Tou­jours les mêmes marottes.

Les donateurs du FPL en 2019 et en 2020

Les médias soutenus par le FPL se plaisent à remerci­er les dona­teurs sans qui les sommes n’auraient pu être déblo­quées. En réal­ité, ils pour­raient très bien les nom­mer, tant les hommes forts de Médi­a­part trustent les cam­pagnes de dons.

Le FPL a récolté 55 700 euros en 2019 (du 14 août au 31 décem­bre) et 150 338,80 euros en 2020 (du 1er jan­vi­er au 31 décem­bre). Voici la répar­ti­tion des dons sur les années 2019 et 2020 :

  • Mon­sieur Olivi­er Legrain : 50 000 euros en 2019, 50 000 euros en 2020
  • Mon­sieur François Divoux : 5 000 euros en 2019
  • Mon­sieur Edwy Plenel : 50 000 euros en 2020
  • Mon­sieur Lau­rent Mauduit : 20 000 euros en 2020
  • Mon­sieur François Bon­net : 10 000 euros en 2020
  • Plus une cen­taine de dons inférieurs à 5 000 euros.