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Vents hostiles pour Front Populaire : les 8 commandements de l’antifa

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24 juillet 2020

Temps de lecture : 15 minutes
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Vents hostiles pour Front Populaire : les 8 commandements de l’antifa

Temps de lecture : 15 minutes

[Pre­mière dif­fu­sion le 11 juin 2020]

Alors qu’elle n’est pas encore disponible, la revue Front Populaire fait déjà face à une levée de boucliers. Nous avons publié deux articles sur le sujet (L’Empire du Bien contre-attaque contre Michel Onfray et son Front Populaire et Michel Onfray et Front Populaire : le cercle de la respectabilité vole en éclat). Nous reproduisons avec son autorisation un papier paru le 9 juin 2020 dans L’Inactuelle, fort intéressante revue en ligne, sous la signature de Frédéric Dufoing où l’on voit que Le Monde, Libération ou L’Incorrect prennent peu ou prou la même position sur le sujet. Comme aurait dit Bernanos, la grande peur des bien-pensants ?

Frédéric Dufoing : “Les huit commandements de la vulgate antifa”

Le lance­ment de Front pop­u­laire s’est accom­pa­g­né d’une cam­pagne de presse à charge con­tre la nou­velle revue de Michel Onfray, à tel point que les logiques d’amalgame chères à la mou­vance antifa ont été repris­es par une mul­ti­tude d’organes de presse tels que Le Monde, Libéra­tion ou L’Incorrect – nous espérons qu’ils sont tous heureux d’être ain­si asso­ciés. Com­ment fonc­tionne cette rhé­torique qui, à force de dénon­cer le con­fu­sion­nisme, en vient elle-même à con­fon­dre tout et son con­traire au nom de procès d’intention dignes à la fois du Polit­buro et de la cour d’école ? Frédéric Dufo­ing décrypte le phénomène.

Par­lons choco­lat. Imag­i­nons que vous aimiez le choco­lat et vouliez en manger une tar­tine. Vous vous met­tez alors à dis­cuter avec d’autres ama­teurs de choco­lat pour savoir, dis­ons, lequel est le meilleur (le belge ou le suisse ?), avec quel pain il s’accorde le mieux, etc. L’un de vos inter­locu­teurs vous annonce qu’il aime aus­si la con­fi­ture, un autre qu’il mange du choco­lat mélangé à de la con­fi­ture ; un troisième vous invite à venir par­ler de votre pas­sion du choco­lat sur son site con­sacré à sa pas­sion du pain où écrivent aus­si des pas­sion­nés de café ; un qua­trième vous explique qu’il aime le choco­lat parce que c’est générale­ment moins sucré que le miel, et un cinquième vous dit qu’un de ses amis lecteur du Point aime le choco­lat et qu’Hitler lui-même aimait le choco­lat ; un sep­tième vous rap­pelle que, puisque le choco­lat est tout de même sucré, il peut favoris­er le dia­bète. Vous répliquez à un huitième ama­teur de choco­lat, et qui l’est aus­si de muffins et de thé à la men­the, que vous n’aimez pas les muffins. Votre petite dis­cus­sion est alors likée et même relayée sur leur site par des indus­triels du choco­lat en mal de notoriété.

La logique de l’amalgame

Si cette même petite dis­cus­sion autour du choco­lat arrive aux oreilles d’un jour­nal­iste du Monde, d’un poli­to­logue pub­lié par Libéra­tion ou d’un auteur de L’Incorrect (et de bien d’autres revues, chaînes de télévi­sion et autres sites inter­net), voire de la revue Lun­di Matin ou d’un ani­ma­teur du blog d’Alain Soral, vous allez appren­dre que vous aimez la con­fi­ture, que vous mélangez votre choco­lat avec de la con­fi­ture, que vous êtes pas­sion­né de pain et même de café, qu’au moins l’une des raisons pour lesquelles vous aimez le choco­lat, c’est qu’il est moins sucré que le miel, que vous lisez le Point ou devriez le lire et que vous avez fort prob­a­ble­ment les mêmes opin­ions qu’Adolf Hitler. Non con­tent de décou­vrir tant de choses sur vous-même, vous serez paniqué d’apprendre que vous êtes dia­bé­tique et que vous détestez non seule­ment les muffins mais aus­si le thé à la men­the, voire que vous détestez les muffins parce que vous détestez le thé à la men­the. Enfin, on vous sig­nalera qu’en entre­tenant un tel débat, vous avez encour­agé la pro­duc­tion indus­trielle de choco­lat ou fait, volon­taire­ment ou comme « idiot utile » (con­fu­sion­niste), la pro­mo­tion de l’industrie du choco­lat, qui exploite des enfants et utilise des pes­ti­cides – exploita­tion à laque­lle vous êtes sans doute indif­férent (ce qui con­firmerait  vos ten­dances hitléristes) et pes­ti­cides aux­quels vous êtes sans doute favor­able (sinon, pourquoi dis­cuter aus­si vaine­ment du choco­lat, sans d’ailleurs jamais pré­cis­er que vous êtes opposé à l’usage des pesticides ?).

Ce type de « raison­nements » com­plète­ment faux voire absur­des, que l’on qual­i­fie de sophis­tiques, sont devenus si courants qu’ils s’imposent comme une méth­ode com­mune et banale en vue de dénon­cer toute forme de pensée.

Les diverses formes de souveraineté

Or, non seule­ment la revue n’est pas encore parue, et donc aucun con­tenu n’est disponible à ce jour, mais, de sur­croît, on se demande com­ment on peut porter un juge­ment glob­al, caté­gorique et uni­forme sur une revue dont les con­tri­bu­tions sont néces­saire­ment con­tra­dic­toires – c’est son principe et son très grand intérêt : elle organ­ise un débat. On n’a pour­tant pas hésité à affirmer qu’Onfray et sa revue – comme si l’un se rédui­sait à l’autre – défendraient une sou­veraineté iden­ti­taire, qual­i­fiée « d’extrême droite ».

Comme si toute forme d’identité – objet de recherche de Claude Levi-Strauss, et titre d’un de ses ouvrages – ren­voy­ait mécanique­ment à un imag­i­naire racial, nation­al, essen­tial­iste, par oppo­si­tion à l’hybridité, au mul­ti­cul­tur­al­isme, à l’universalisme, au bigar­ré, au métis­sage – ter­mes du reste opposés ou inas­sim­i­l­ables les uns aux autres et présen­tant des sens très variés.

Comme si l’identité, réduite à l’une de ses ver­sions, était illégitime et sor­dide face au légitime et noble inter­na­tion­al­isme, réduit à… on ne sait plus trop quoi, car l’internationalisme sovié­tique, celui des anar­chistes, celui de la mon­di­al­i­sa­tion du XVIe siè­cle, celui de la mon­di­al­i­sa­tion du XXe, celui du catholi­cisme médié­val tri­om­phant, celui de l’islam salafiste, celui de la république des let­tres ou celui tou­jours espéré et jamais con­stru­it du syn­di­cal­isme, ce n’est pas exacte­ment la même chose… Il en va de même du cos­mopolitisme. Lançons un con­cours : qui était le plus cos­mopo­lite entre Ivan Illich, Alexan­dre le Grand, Maï­monide, Gand­hi, Mag­el­lan, Saart­je Baart­man, un immi­grant wal­lon au Cana­da, un immi­grant chi­nois en Indonésie, l’ancien esclave Olau­dah Equiano, les paysans français qui demandaient l’abolition de l’esclavage dans leurs cahiers de doléances ou n’importe quel patron de multi­na­tionale qui, comme le chan­tait Brel, a un doigt (c’est-à-dire une vil­la, une entre­prise ou un compte en banque) dans chaque pays ?

La sou­veraineté pop­u­laire n’est ni la sou­veraineté nationale, ni la sou­veraineté éta­tique, moins encore la sou­veraineté fédérale ou communale.

Comme si la sou­veraineté elle-même, dont il est juste­ment ques­tion de débat­tre dans la revue, ne pou­vait pas relever de plusieurs logiques et déf­i­ni­tions très dif­férentes, et pas seule­ment d’une référence à l’« iden­tité » : la sou­veraineté pop­u­laire n’est ni la sou­veraineté nationale, ni la sou­veraineté éta­tique, moins encore la sou­veraineté (ou l’autarcie) bioré­gionale, fédérale ou com­mu­nale, dont Onfray, en héri­ti­er de Proud­hon, se dit par­ti­san. Là-dessus, toutes ces sou­verainetés ne sont pas tou­jours aisé­ment artic­u­la­bles, com­pat­i­bles – la nation ayant par exem­ple été pen­dant deux cents ans le tombeau des peu­ples, au sens pro­pre comme au sens fig­uré : les peu­ples meurent dans les guer­res faites au nom de la nation et se voient écartés du pou­voir par cette fic­tion hyp­ocrite qui est à son ser­vice, la représentation.

Comme si toute forme de com­par­ti­men­ta­tion, de sépa­ra­tion, de dis­tinc­tion entre un « eux » et un « nous » était néces­saire­ment nuis­i­ble et arti­fi­cielle c’est-à-dire, puisque c’est devenu un terme repous­soir, une caté­gorie de souil­lure qu’on appelle l’« extrême droite ». On pour­rait dis­sert­er pen­dant des heures sur les con­cepts de « gauche » et de « droite », qui n’ont de légitim­ité con­ceptuelle que dans la croy­ance que l’on a de leur exis­tence et n’ont servi qu’à la dic­tature des par­tis et de la mil­i­tance sec­taire, donc de la « démoc­ra­tie » représen­ta­tive. On pour­rait aus­si dis­sert­er pen­dant des heures sur le terme « extrémiste », hon­teuse­ment hybridé au si beau et si digne « rad­i­cal ». Cepen­dant, l’expression « extrême-droite » est dev­enue un tel rac­cour­ci dog­ma­tique, un tel automa­tisme rhé­torique, à l’instar du terme « fas­ciste », qu’il faut s’y arrêter un instant.

Ridicule, n’est-ce pas ? Pour­tant, ce type de « raison­nements » com­plète­ment faux voire absur­des, que l’on qual­i­fie de sophis­tiques, sont devenus si courants qu’ils s’imposent comme une méth­ode com­mune et banale en vue de dénon­cer toute forme de pen­sée – qu’elle soit d’ailleurs cor­recte­ment for­mée ou elle-même sophis­tique. Le meilleur exem­ple vient d’en être don­né avec la Blitzkrieg lancée par Le Monde, Libéra­tion et L’Incorrect con­tre l’initiative édi­to­ri­ale de Michel Onfray, la nou­velle revue Front pop­u­laire, des­tinée à renouer le dia­logue entre sou­verain­istes. Bien sûr, on peut légitime­ment reprocher beau­coup de choses à Onfray : ses pos­tures médi­a­tiques, ses références philosophiques, ses inco­hérences. On peut reprocher beau­coup de choses aus­si à la démarche que pro­pose sa revue : par exem­ple, ne serait-il pas plus intéres­sant de con­fron­ter sou­verain­istes et anti-sou­verain­istes ? Mais la moin­dre des choses serait de cri­ti­quer l’homme et sa revue avec rigueur intel­lectuelle, c’est-à-dire de respecter les règles qui organ­isent une argu­men­ta­tion et un débat. La plus élé­men­taire de ces règles con­siste à écouter ce que l’adversaire dit et à ne pas lui prêter des posi­tions ou des inten­tions qu’il n’a pas ou que d’autres ont eu à sa place.

Les huit commandements de la vulgate « antifa »

Il est des pays où les mou­ve­ments, revues, sites, par­tis, asso­ci­a­tions, per­son­nal­ités et pro­duits cul­turels qual­i­fiés « d’extrême droite » font l’objet d’un « cor­don san­i­taire », c’est-à-dire d’un refus d’expression dans l’espace pub­lic, sous pré­texte que leur don­ner la parole reviendrait à les légitimer, à les recon­naître comme val­ables et nor­maux. Dia­loguer avec l’« extrême droite », même pour la cri­ti­quer, lui per­met de répan­dre ses idées de manière épidémique – ne par­le-t-on pas, du reste, de « peste brune » ? – ou lit­térale­ment d’activer ses idées dans les cerveaux amor­phes des audi­teurs pas­sifs… Car ces idées s’y trou­vaient déjà, en par­ti­c­uli­er chez les gens « peu éduqués » : on vous présente régulière­ment des études sta­tis­tiques sur les diplômes des électeurs d’extrême droite. Les gens « peu éduqués », qui ont peu de diplômes (pour ceux qui ne le sauraient pas, on est éduqué lorsqu’on a un diplôme supérieur), c’est la ver­sion mépris­able du peu­ple – ceux que les défenseurs de la représen­ta­tion aux XVIIe et XVIIIe siè­cle ont réus­si à écarter du pou­voir. Ain­si crée-t-on une caté­gorie mar­ket­ing, une sorte de juge­ment ad hominem col­lec­tif qui asso­cie : mal­adie infec­tieuse, souil­lure, bêtise, cré­dulité, manque d’éducation et de cul­ture, « petit peu­ple » et pas­siv­ité mou­ton­nière. On ajoutera que les gens qui relèvent de cette caté­gorie sont irra­tionnels et pas­sion­nels (vieux cliché appliqué au peu­ple, c’est-à-dire aux pau­vres depuis des siè­cles), tout comme ils sont motivés par la « haine » qu’amène l’« igno­rance ». Relèvent donc de cette caté­gorie aus­si bien les con­t­a­m­i­nants (autrement dit les poli­tiques ou pro­pa­gan­distes) que les con­t­a­m­inés (électeurs ou trolls de comp­toirs et de forums), mais aus­si ceux qui par­lent avec eux, même pour les cri­ti­quer (les con­fu­sion­nistes), ou ceux qui refusent de les mépriser.

Il est des pays où les mou­ve­ments, revues, sites, par­tis, asso­ci­a­tions, per­son­nal­ités et pro­duits cul­turels qual­i­fiés « d’extrême droite » font l’objet d’un « cor­don sanitaire ».

Les huit com­man­de­ments des pré­posés à la détec­tion, au fichage et au mar­quage épidémique des gens cen­sés relever de l’« extrême droite » – pré­posés qu’on appelle des antifas – sont les suivants :

  1. Si l’on est ami avec quelqu’un qui a les opin­ions x, on a les mêmes opinions ;
  2. Si l’on est l’ami d’un type qui est ami avec un type qui a les opin­ions x, on a les mêmes opinions ;
  3. Si l’on a partagé un moment, un événe­ment, ou dis­cuté avec un indi­vidu qui a les opin­ions x, on a les mêmes opinions ;
  4. Si l’on est admiré ou cité par des indi­vidus ayant une opin­ion x, on a les mêmes opinions ;
  5. Si l’on a par­ticipé à une émis­sion ou écrit dans une revue, on en partage les opin­ions, en tout ou en par­tie, anci­ennes, présentes et futures ;
  6. Si l’on a défendu les opin­ions x, on les défend encore et on les a tou­jours défendues, ou on les défendra toujours ;
  7. Si l’on a la même opin­ion qu’un indi­vidu x, on partage toutes les opin­ions de cet individu ;
  8. Si l’on partage les opin­ions d’un indi­vidu, on les défend for­cé­ment en arguant des mêmes raisons et des mêmes jus­ti­fi­ca­tions que lui, voire en visant les mêmes buts.

Qu’est-ce qu’un fasciste ?

Quant aux idées de l’extrême droite, ses opposants se gar­dent bien de les définir claire­ment, ce ne serait d’ailleurs pas très pra­tique : ce qui ne s’énonce pas claire­ment se dénonce d’autant plus facile­ment. Aus­si per­son­ne ne sait-il exacte­ment ce qu’est l’extrême droite. Cer­tains mou­ve­ments désignés sous ce voca­ble infamant optent pour des poli­tiques ultra-libérales, d’autres pour des poli­tiques étatistes et pro­tec­tion­nistes. Cer­tains s’accommodent très bien du par­lemen­tarisme, d’autres priv­ilégient plutôt les sys­tèmes oligarchiques.

Et s’il s’agit d’une idéolo­gie raciste, on la retrou­ve absol­u­ment partout, dans tout le spec­tre des pro­jets poli­tiques. Et puis, qu’entend-t-on pas racisme ? Est-ce l’essentialisation de caté­gories d’humains (par les gen­res, les statuts, les car­ac­téris­tiques physiques ou men­tales, etc.) ? La croy­ance en l’existence de races ou de cul­tures hiérar­chisées, dont cer­taines auraient comme des­tin de domin­er ou d’exterminer les autres ? La croy­ance en des races ou des cul­tures dif­férentes, non hiérar­chisées, mais des­tinées à ne pas entr­er en con­tact faute de quoi le métis­sage les détru­irait ? La croy­ance en l’existence de races ou de cul­tures des­tinées à être finale­ment mixées, mélangées, ou dans l’idée qu’une cul­ture pré­ten­du­ment plus tolérante que les autres devrait les pren­dre sous son aile pour les pro­téger ? La croy­ance dans la prépondérance du groupe auquel on appar­tient, quel qu’il soit, et donc l’hostilité vis­cérale envers les autres groupes, en par­ti­c­uli­er quand naît une con­cur­rence pour l’utilisation d’un ter­ri­toire ou de ses ressources ? La croy­ance en la nation opposée à d’autres nations – ce qui implique, si l’on est aus­si raciste, l’adéquation de la nation et de la race, ou de la nation et de la cul­ture, ou encore de l’Etat, de la nation, de la race et la cul­ture ? L’obsession pour l’homogénéité du groupe, quel qu’il soit, et quoi qu’implique cette homogénéité ? S’il s’agit de la forme que prend la struc­ture de la com­mu­nauté, est-ce que l’on est donc favor­able à un État total­i­taire ? Ou sim­ple­ment à un État autori­taire ? Ou à l’idée d’un chef charis­ma­tique ? Ou au con­traire aux ver­tus de tra­di­tions rigides, respecta­bles parce qu’elles sont anci­ennes ? Toutes ces déf­i­ni­tions – et il y en a d’autres – peu­vent être con­tra­dic­toires, ou amen­er à des con­clu­sions opposées…

Tout le monde est-il d’extrême droite ?

À tel point que, si l’on rend sur les forums inter­net, on se fera traiter de fas­ciste si l’on est pour le port d’arme indi­vidu­el (lib­erté à laque­lle était farouche­ment opposé le fas­cisme, ain­si que les régimes les plus pro-cap­i­tal­istes de l’histoire humaine) ; con­tre l’avortement (le fas­cisme y était favor­able, même si sa poli­tique natal­iste et le con­cor­dat l’ont for­cé à met­tre de l’eau dans son vin) ; pour l’euthanasie (parce qu’on promeut poten­tielle­ment l’élimination des faibles, comme le défendaient les nazis) ; con­tre l’euthanasie (parce qu’on prive l’individu d’une lib­erté essen­tielle, comme le défend­ent les catholiques) ; con­tre la PMA (parce que l’on prive une femme de la lib­erté d’utiliser la sci­ence pour son bien-être) ; ou pour la PMA (parce que l’on favorise les mères por­teuses, ce qui nuit à la lib­erté de la femme) ; pour la démoc­ra­tie directe (parce que le peu­ple est raciste et irra­tionnel)  ou pour son con­traire, à savoir le pou­voir d’un indi­vidu ou d’un groupe (parce que cela détru­it les lib­ertés indi­vidu­elles). Et l’on peut con­tin­uer ain­si à l’infini.

À peu près tout le monde, sauf eux (?), est poten­tielle­ment, par une car­ac­téris­tique ou par une autre, d’extrême droite, grâce à l’effet de con­ta­gion sophistique.

Les antifas vous expliquent plus volon­tiers, sans davan­tage de clarté pour autant, ce que n’est pas l’extrême droite : pour ne pas être d’extrême droite, il faut être pour la démoc­ra­tie (oui, mais laque­lle ? Par­lemen­taire ? Directe ? Par­tic­i­pa­tive ? Com­mu­nale ? Cen­tral­isée ? Fédérale ? …), ou con­tre le racisme, avec ce signe impa­ra­ble, paraît-il, qu’il faut être « pour les immi­grés », pos­ture assim­ilée au fait d’être « pour l’immigration » (oui mais laque­lle ? Quand ? Com­ment ? Pourquoi ?… Est-on moins raciste si l’on accepte les immi­grés à con­di­tion qu’ils aban­don­nent leur cul­ture d’origine ou qu’on con­traire ils vivent dans leurs ghet­tos ?). Pour ne pas être d’extrême droite, il faut aus­si être fémin­iste (oui, mais quel fémin­isme : l’égalité ou l’équité homme/femme ? Le fémin­isme dif­féren­tial­iste ? Le fémin­isme évo­lu­tion­niste, qui tient compte des don­nées biologiques ? Le fémin­isme rel­a­tiviste ou le fémin­isme uni­ver­sal­iste ? Le fémin­isme qui nie l’existence des gen­res ou celui qui trans­former les con­tenus de gen­res ?). Et il faut enfin par­fois être con­tre le cap­i­tal­isme, mais sans trop savoir ce que c’est, sinon à évo­quer la méchante finance et les hor­ri­bles multi­na­tionales. En somme, à peu près tout le monde, sauf eux (?), est poten­tielle­ment, par une car­ac­téris­tique ou par une autre, d’extrême droite, grâce à l’effet de con­ta­gion sophistique.

Onfray est-il d’extrême droite ? Pour le savoir, il faut répon­dre à une dou­ble ques­tion antifa : est-il claire­ment favor­able à ce qui n’est vague­ment pas d’extrême droite ? Et est-il vague­ment favor­able à ce qui est vague­ment d’extrême droite ? Si la réponse est non à la pre­mière ques­tion, et oui à la sec­onde, ne lisez surtout pas Front pop­u­laire. Vous pour­riez être contaminé.

Frédéric Dufo­ing