Ojim.fr
Veille médias
Dossiers
Portraits
Infographies
Vidéos
Faire un don
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
Claude Chollet sur Remix News (en français), suite

L’article que vous allez lire est gratuit. Mais il a un coût. Un article revient à 50 €, un portrait à 100 €, un dossier à 400 €. Notre indépendance repose sur vos dons. Après déduction fiscale un don de 100 € revient à 34 €. Merci de votre soutien, sans lui nous disparaîtrions.

3 juillet 2023

Temps de lecture : 16 minutes
Accueil | Veille médias | Claude Chollet sur Remix News (en français), suite

Claude Chollet sur Remix News (en français), suite

Temps de lecture : 16 minutes

La première partie est ici. Dans la deuxième partie de notre entretien exclusif, Claude Chollet, fondateur et président de l’Observatoire du Journalisme, donne aux lecteurs de Remix News un aperçu des causes profondes du parti-pris libéral-libertaire et du manque de pluralisme des grands médias français.

Vous êtes aus­si le fon­da­teur et rédac­teur en chef de l’Observatoire du Jour­nal­isme, un site qui se tar­gue d’informer ceux qui infor­ment les Français et qui le fait avec une optique plutôt con­ser­va­trice alors que la France est dom­inée par les médias pro­gres­sistes. Il paraît que cela vous vaut des ennuis ?

J’ai créé l’Observatoire du Jour­nal­isme il y a 11 ans. C’est un site d’analyse cri­tique du jour­nal­isme, qui réalise des por­traits de jour­nal­istes, des por­traits factuels. Nous avons pub­lié plus de 300 por­traits à ce jour, qui sont actu­al­isés. Nous avons aus­si réal­isé 35 info­gra­phies sur les groupes de presse et nous suiv­ons avec nos arti­cles quo­ti­di­ens la vie économique de la presse, les change­ments dans les médias, et aus­si de plus en plus, hélas, les cen­sures qui touchent les médias et égale­ment les réseaux soci­aux. Nous nous intéres­sons bien sûr aux réseaux soci­aux et main­tenant aus­si à l’intelligence arti­fi­cielle qui va peut-être mod­i­fi­er un cer­tain nom­bre de choses dans les médias.

For­cé­ment, ce que nous faisons ne plaît pas à tout le monde. J’imagine volon­tiers que l’Observatoire du Jour­nal­isme puisse être plutôt impop­u­laire auprès d’une par­tie des jour­nal­istes en France, mais notre objec­tif n’est pas d’être pop­u­laire. L’objectif, c’est d’être véridique et d’être hon­nête. Je ne revendique pas l’objectivité car je ne crois pas du tout à l’objectivité, par con­tre, je crois à l’honnêteté et nous essayons d’être au plus près du réel. Alors bien sûr, de temps en temps, nous avons des ennuis.

Par exem­ple, nous avons aujourd’hui un nou­veau procès en cours avec un cer­tain Amjad Allouchi, un très jeune jour­nal­iste du jour­nal région­al Le Pro­grès à Lyon. Avec le sou­tien de son jour­nal, qui règle ses frais d’avocat, Allouchi nous attaque vrai­ment de manière ridicule pour dis­crim­i­na­tion parce que nous avons mis en cause un de ses arti­cles où il s’attaquait à une lanceuse d’alerte très active en Rhône-Alpes et en par­ti­c­uli­er à Saint-Éti­enne et à Lyon.

Elle s’appelle Isabelle Sur­ply et elle a notam­ment réus­si à faire expulser un imam inté­griste de la com­mune où elle était con­seil­lère munic­i­pale dans la région Rhône-Alpes, en dif­fu­sant une vidéo d’un de ses prêch­es. Elle a alors été attaquée par ce très jeune jour­nal­iste du Pro­grès de Lyon et nous avons pub­lié un arti­cle met­tant en lumière le manque d’honnêteté de cet arti­cle signé par Allouchi tout fraîche­ment sor­ti d’une école de jour­nal­isme et qui n’avait pas, je crois, encore sa carte de presse. Nous avons sim­ple­ment écrit que Le Pro­grès avait choisi pour ce sujet con­cer­nant l’islamisme le jour­nal­iste Amjad Allouchi en ajoutant la men­tion « sans com­men­taire » entre par­en­thès­es après son nom. C’est sur ce « sans com­men­taire » que nous sommes attaqués pour dis­crim­i­na­tion. Si les enjeux financiers n’étaient pas si impor­tants, ce serait à mourir de rire. Mais le prob­lème pour nous, c’est que si nous devions per­dre, on peut imag­in­er une peine de plusieurs mil­liers d’euros, ce qui serait un coup très dur pour un média avec des moyens aus­si mod­estes que les nôtres.

Je dois aus­si dire que nous avons mal­heureuse­ment dû chang­er d’hébergeur et nous exil­er aux États-Unis, ce qui m’a peiné. Notre site ojim.fr était hébergé chez OVH, le prin­ci­pal hébergeur français. Mais nous avons été attaqués par le lob­by LGBT de Radio France qui s’appelle Le Cer­cle. Nous avions pub­lié un arti­cle assez ironique, mais pas injurieux, sur le lob­by LGBT de Radio France. Ce lob­by ne nous a pas attaqué directe­ment mais nous a dénon­cés, avec le sou­tien de la direc­tion de Radio France, auprès d’OVH qui a sus­pendu notre site pen­dant une heure à titre d’avertissement. J’ai con­sulté mon avo­cat qui m’a forte­ment con­seil­lé de chang­er d’hébergeur en me prévenant que chez OVH, ils ne veu­lent pas d’ennuis et qu’à la prochaine dénon­ci­a­tion ils sus­pendront le site de l’Observatoire du Jour­nal­isme défini­tive­ment, sans prévenir et sans pos­si­bil­ité de recours.

Le résul­tat, c’est que cela nous coûte qua­tre fois plus cher aux États-Unis où la lib­erté d’expression est plus grande, mais nous n’avions pas le choix.

Aujourd’hui, les lob­bies LGBT, et surtout le lob­by trans qui est la sous-par­tie du lob­by LGBT qui nous avait attaqué, ont un pou­voir de nui­sance réel avec leurs com­porte­ments hystériques.

Il existe une spé­ci­ficité de la loi française qui fait que les asso­ci­a­tions sub­ven­tion­nées, qu’elles soient de type LGBT, immi­gra­tionnistes ou autres, peu­vent pour­suiv­re toutes les per­son­nes et organ­i­sa­tions exp­ri­mant des opin­ions qu’elles esti­ment être des inci­ta­tions à la haine ou à la dis­crim­i­na­tion, ce qui doit être très dis­suasif pour les jour­nal­istes et médias con­ser­va­teurs, toutes ces asso­ci­a­tions étant pro­gres­sistes de gauche…

Oui, en effet, c’est comme cela depuis la loi Pleven de 1972, puis il y a eu plus tard, en 1990, la loi Gayssot, du nom d’un député com­mu­niste. Ces deux lois sont com­plé­men­taires : la loi Pleven per­met à une asso­ci­a­tion, même s’il n’y a pas une plainte d’un indi­vidu, de se porter par­tie civile pour dis­crim­i­na­tion ou inci­ta­tion à la dis­crim­i­na­tion en fonc­tion de la race, de la reli­gion ou de l’origine, tan­dis que la loi Gayssot per­met de faire de même tout ce qui touche l’histoire, le révi­sion­nisme, etc. Le domaine con­cerné par l’action de ces asso­ci­a­tions sub­ven­tion­nées par l’État est donc devenu extrême­ment vaste, alors que, si l’on prend l’exemple de SOS Racisme, ce sont par­fois des asso­ci­a­tions qui n’ont qua­si­ment plus de mem­bres. SOS Racisme est en fait une suc­cur­sale du Par­ti social­iste qui ne vit que des sub­ven­tions et qui peut porter plainte con­tre les médias de droite, hos­tiles à l’immigration, catholiques, con­ser­va­teurs ou autres comme Fdes­ouche, le Salon Beige, nous-mêmes, etc.

Pour les jour­nal­istes ou les médias attaqués, cela coûte de l’argent et prend du temps de se défendre. Même si j’ai gag­né mon dernier procès, j’ai des frais d’avocats. À chaque fois, c’est 3 000 ou 5 000 euros de frais d’avocats. C’est aus­si une poli­tique d’usure qui est menée de la sorte.

Est-ce pour cela qu’il y a si peu de voix con­ser­va­tri­ces dans les médias français ?

La réal­ité, c’est qu’il y a 37 000 cartes de presse en France et égale­ment au moins 5000 jour­nal­istes qui n’ont pas de carte de presse. Au total, il doit y avoir 42 000 ou 43 000 jour­nal­istes et si la sit­u­a­tion n’est pas mono­col­ore, je pense pou­voir dire qu’une majorité — peut-être 50 % — de jour­nal­istes sont plus ou moins sincère­ment libéraux lib­er­taires, c’est-à-dire plus ou moins libéraux sur le plan économique et lib­er­taires sur le plan sur le plan socié­tal. À côté de cela, il y en a peut-être 10 % qui sont con­ser­va­teurs. Ceux-là se taisent. Le reste, soit plus ou moins 40 %, suiv­ent sim­ple­ment le courant majoritaire.

Il se trou­ve que pour l’Observatoire du Jour­nal­isme, les rédac­teurs sont sou­vent des étu­di­ants en jour­nal­isme ou de jeunes jour­nal­istes qui se font un peu d’argent en écrivant pour nous. Un de mes rédac­teurs a fait l’école de jour­nal­isme de Sci­ences Po, con­sid­érée être une bonne école et qui délivre un diplôme d’État. Ce jeune jour­nal­iste est ensuite allé tra­vailler au quo­ti­di­en région­al Ouest-France. C’est tou­jours intéres­sant pour un jeune jour­nal­iste de tra­vailler dans la presse quo­ti­di­enne régionale car on y apprend bien son méti­er. Seule­ment, il a quit­té ce jour­nal au bout de deux ans et demi. Il m’a expliqué qu’il ne pou­vait rien y dire et ne pou­vait exprimer ses points de vue à per­son­ne au sein de la rédac­tion, et il envis­age même de quit­ter le jour­nal­isme. Ce n’était même pas le pro­prié­taire du jour­nal, le rédac­teur en chef ou son chef de ser­vice qui exerçait des pres­sions sur lui, mais son voisin d’ordinateur qui lui dis­ait : « Est-ce que tu te rends compte de ce que tu dis ? Tu n’es pas avec nous ? Mais c’est très inquié­tant, je te demande de te repren­dre », etc. etc. Il savait très bien que s’il réitérait avec des pro­pos jugés non con­formes, il allait être mis au ban de la rédac­tion puis du jour­nal. Au début, il s’est exprimé timide­ment et puis après il a com­pris et il s’est tu.

Et c’est la même chose dans les écoles de jour­nal­isme où une par­tie des étu­di­ants sont entraînés à se taire. Nous sommes en train, à l’Observatoire du jour­nal­isme, de réalis­er une série sur les écoles de Jour­nal­isme. Nous avons déjà traité l’École supérieure de jour­nal­isme de Lille, qui est la plus gauchiste, nous avons aus­si traité l’école de jour­nal­isme de Sci­ences Po ain­si que le Cel­sa. Nous pub­lierons une brochure papi­er à la ren­trée sur les 14 écoles de jour­nal­isme recon­nues par l’État.

À des degrés divers, l’ambiance est à peu près la même dans la plu­part des écoles de jour­nal­isme recon­nues en France, qui sont con­trôlées par la gauche libérale-lib­er­taire poli­tique­ment cor­recte. Si vous voulez avoir votre diplôme et si vous voulez surtout qu’on vous pis­tonne après pour avoir un emploi, il ne faut pas qu’on sache que vous avez des opin­ions conservatrices.

Le jour­nal­iste et écrivain Lau­rent Ober­tone a fait l’École supérieure de jour­nal­isme de Lille et je lui ai demandé com­ment il avait fait. Il m’a répon­du qu’il s’était tu pen­dant les deux années qu’il a passées dans cette école parce qu’il savait que, sinon, il n’aurait pas son diplôme.

J’aurais voulu abor­der un autre aspect de ce sys­tème français de la presse avec l’exemple de l’hebdomadaire Valeurs actuelles, le seul grand média con­ser­va­teur encore présent sur le marché français de la presse écrite. Son directeur de la rédac­tion vient d’être limogé et cela se passe peu après que le jour­nal a été racheté par un homme d’affaires libanais. Si les médias français sont presque tous du même côté idéologique­ment, n’est-ce pas aus­si parce qu’ils appar­ti­en­nent à des mil­liar­daires qui ont besoin de tra­vailler avec l’État?

La sit­u­a­tion est nuancée. D’abord, Iskan­dar Safa, qui est le pro­prié­taire de Valeurs actuelles, est un Fran­co-Libanais plutôt con­ser­va­teur, et je ne pense pas du tout que ce soit un homme de gauche. Vu son par­cours, je suis même per­suadé que c’est plutôt un homme de droite. Cepen­dant, c’est d’abord et avant tout un homme d’affaires qui a des intérêts immo­biliers impor­tants dans le sud de la France et qui est pro­prié­taire des chantiers de Cher­bourg. Ces chantiers ont des clients mil­i­taires. Ils fab­riquent des corvettes, des fré­gates, des avi­sos, et une grande par­tie de son activ­ité économique dépend évidem­ment des com­man­des de l’État ou d’autorisations d’exporter. Dans cette his­toire, je pense en effet qu’il a voulu avant tout pro­téger ses intérêts économiques. Avec Geof­froy Leje­une comme directeur de la rédac­tion, la ligne édi­to­ri­ale de Valeurs actuelles était très agres­sive vis-à-vis d’Emmanuel Macron et de son équipe. Elle a même été très pro-Zem­mour à une cer­taine époque et je pense que cela gênait Iskan­dar Safa non pas poli­tique­ment mais plus pour ses affaires.

Et cela fonc­tionne-t-il de la même manière pour les autres médias ?

Cela dépend des médias. Je pense que cela fonc­tionne sans doute pour Le Figaro, qui appar­tient à Das­sault. Le fab­ri­cant du Rafale a aus­si des com­man­des publiques pour l’aviation. Ses rela­tions avec l’État comptent aus­si pour les expor­ta­tions car il faut une autori­sa­tion pour exporter des matériels militaires.

En revanche, je ne pense pas que cela fonc­tionne de la même manière pour Bernard Arnault dont l’empire est dans le luxe. Cela ne fonc­tionne pas non plus pour Vin­cent Bol­loré. En fait, les mil­liar­daires investis­sent dans les médias pour se pro­téger. Pourquoi Xavier Niel a‑t-il investi dans une myr­i­ade de médias, y com­pris dans le groupe Le Monde dont il est devenu l’actionnaire de référence ? Pourquoi rachète-t-il Nice-Matin ? Pourquoi prend-il des par­tic­i­pa­tions dans le site d’information et d’opinion Atlanti­co ? Pourquoi rachète-t-il Paris Turf ? C’est pour pro­téger ses intérêts économiques et sec­ondaire­ment idéologiques.

François Pin­ault fait la même chose avec Le Point. Pourquoi Bernard Arnault rachète-t-il Les Échos ? Pourquoi rachète-t-il Le Parisien dans lequel il investit 80 mil­lions d’euros ? Parce que quand vous êtes pro­prié­taire d’un grand jour­nal, vous avez automa­tique­ment accès à l’Élysée et au pre­mier min­istre. Vous décrochez votre télé­phone et on vous répond. C’est d’abord une poli­tique de pro­tec­tion de vos investisse­ments et dans cette sit­u­a­tion vous avez quand même intérêt à être plutôt en bons ter­mes avec les autorités, quelles que soient ces autorités.

Notez aus­si que Xavier Niel est le gen­dre de Bernard Arnault et que, à eux deux, ils représen­tent une puis­sance finan­cière et une puis­sance médi­a­tique absol­u­ment con­sid­érables. Et ce n’est pas les insul­ter que de dire qu’ils sont tous les deux des libéraux-libertaires.

Ils sont d’un côté pour l’argent et les div­i­den­des, et de l’autre côté pour le socié­tal, le mariage pour tous, les LGBTQ+, etc. Le socié­tal étant un petit peu, j’emploie cette expres­sion osée, le cache-sexe du cap­i­tal libéral. C’est une manière de dire quelque chose dans le style : ne touchez pas à mon argent, regardez, je suis gen­til sur toutes les ques­tions socié­tales, le mariage pour tous, je trou­ve ça absol­u­ment for­mi­da­ble, et je ne trou­verais pas si mal qu’il y ait l’avortement à 28 semaines car c’est la lib­erté de la femme, etc. Il y a un dou­ble jeu poli­tique et idéologique. Ces gens très rich­es essayent d’abord de pro­téger leurs intérêts et au fond leurs intérêts idéologiques rejoignent leurs intérêts économiques.

Le tableau que vous dressez des médias français fait un peu penser à une oligarchie…

Absol­u­ment, c’est un sys­tème oli­garchique. Pour met­tre fin à ce sys­tème oli­garchique, il faudrait rétablir la rede­vance audio­vi­suelle mais en per­me­t­tant à chaque foy­er d’attribuer cette rede­vance au média de son choix. En l’absence de choix exprimé, cet argent irait au ser­vice pub­lic. Cela assur­erait l’indépendance des médias et on ver­rait fleurir un petit peu plus de plu­ral­isme en France. Mal­heureuse­ment, à ma con­nais­sance, à ce jour, aucun par­ti poli­tique français n’a repris cette proposition.

Il me sem­ble que la loi française cherche à obtenir le con­traire du plu­ral­isme. Il existe par exem­ple encore une loi spé­ci­fique à la France qui fait que, quand quelqu’un rachète un média, les jour­nal­istes de ce média peu­vent démis­sion­ner de leur pro­pre chef et atta­quer leur acheteur aux prud’hommes pour deman­der de très gross­es indem­nités sous pré­texte de change­ment de ligne édi­to­ri­ale. Il me sem­ble qu’une telle loi n’est faite que pour réserv­er les médias à ces oli­gar­ques, qui sont les seuls qui capa­bles de faire face à ces très gros frais poten­tiels, dif­fi­ciles à éval­uer au moment du rachat.

Je ne crois pas que c’était le but pre­mier de cette loi mais elle a en effet été détournée. Au départ, cette loi a été faite pour pro­téger les jour­nal­istes, et c’est quelque chose de très posi­tif. Comme effec­tive­ment la plu­part des médias sont aujourd’hui libéraux-lib­er­taires, un con­ser­va­teur qui voudrait racheter un tel média ren­con­tr­erait des dif­fi­cultés. Cela lui coûterait une for­tune, puisque la plu­part des jour­nal­istes voudraient par­tir pour touch­er leurs indem­nités. Je ne pense pas que c’était inten­tion­nel au départ, mais dans les faits cette loi peur servir désor­mais en par­tie et d’une cer­taine manière à réserv­er les médias aux oli­gar­ques, oui.

Il y a mal­gré tout des oli­gar­ques qui se démar­quent par la ligne édi­to­ri­ale de leurs médias. En tout cas, il y en a au moins un : Vin­cent Bol­loré, avec ses chaînes de télévi­sion CNews et C8. Ces médias se car­ac­térisent par un plu­ral­isme dans le paysage audio­vi­suel français, car on y voit des gens de droite comme de gauche s’y exprimer, avec y com­pris des opin­ions inter­dites ailleurs. Mais voilà que la min­istre de la Cul­ture d’Emmanuel Macron men­ace Bol­loré que l’autorité des médias pour­rait bien­tôt les priv­er ses chaînes de télévi­sions de leur licence pour émettre.

Il y a effec­tive­ment une véri­ta­ble offen­sive en ce moment con­tre Vin­cent Bol­loré et con­tre les chaines CNews et C8, qui doivent voir leurs fréquences renou­velées en 2025. Cette offen­sive a été lancée par la min­istre de la Cul­ture Rima Abdul-Malak mais aus­si par Marine Ton­de­lier, qui est la respon­s­able du par­ti Europe Écolo­gie Les Verts, ain­si que par Aymer­ic Caron, député de La France Insoumise. Ce sont deux par­tis d’extrême-gauche et ils tien­nent tous le même dis­cours. Je les cite « Cnews est une chaîne d’opinion, c’est une chaîne qui n’est plus libre et il faut lui enlever sa fréquence ». Xavier Niel, que j’ai men­tion­né plus haut, sem­ble aujourd’hui se pré­par­er pour essay­er de repren­dre ces fréquences en 2025 à Vin­cent Bol­loré. CNews est la seule chaîne de télévi­sion plu­ral­iste aujourd’hui en France, c’est-à-dire la seule ou des gens con­ser­va­teurs peu­vent s’exprimer à côté des gens de gauche, d’extrême gauche et du cen­tre qui s’y expri­ment égale­ment. Mais que des con­ser­va­teurs puis­sent s’exprimer provoque le scan­dale auprès de gens qui avaient l’habitude de par­ler entre eux et qui n’acceptent le débat qu’avec des gens du même bord.

Bol­loré a cepen­dant quand même les reins solides et il a quelques moyens pour se défendre. Il vient de réus­sir son OPA sur Lagardère. Il va récupér­er le Jour­nal du Dimanche, Paris Match et la radio Europe 1. Je pense donc qu’il se défendra mais cette offen­sive con­tre CNews et C‑8 illus­tre bien l’intolérance fon­da­men­tale de la gauche libérale-lib­er­taire qui ne peut pas sup­port­er qu’on la remette en cause.

L’autre ques­tion que pose ces attaques con­tre ces deux chaînes de télévi­sion, c’est celle de l’indépendance de l’autorité des médias, l’ARCOM, si le gou­verne­ment peut l’enjoindre de ne pas renou­vel­er les fréquences de télévi­sions privées afin de lim­iter la lib­erté d’expression. C’est d’autant plus sur­prenant que l’on a vu les autorités de Brux­elles inter­venir con­tre des pays comme la Pologne et la Hon­grie quand elles con­sid­éraient que leur autorité des médias était insuff­isam­ment indépendante.

C’est une autorité pseu­do-indépen­dante. Les mem­bres de l’ARCOM, qui a beau­coup de pou­voir, sont nom­més par le prési­dent du Sénat, le prési­dent de l’Assemblée nationale et le prési­dent de la République, qui en choisit le prési­dent. Le prési­dent actuel de l’ARCOM est con­sid­éré comme un libéral qui a l’échine très, très sou­ple et je ne pense pas que l’ARCOM représen­tera un pôle de résis­tance sig­ni­fi­catif si les autorités français­es lui deman­dent gen­ti­ment de faire ceci ou cela.

NB : Cet entre­tien a été réal­isé avant la nom­i­na­tion de Geof­froy Leje­une au JDD et avant les émeutes des ban­lieues de l’immigration.