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Camélia Jordana insulte la police : qu’en pensent les médias ?

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31 mai 2020

Temps de lecture : 7 minutes
Accueil | Veille médias | Camélia Jordana insulte la police : qu’en pensent les médias ?

Camélia Jordana insulte la police : qu’en pensent les médias ?

Temps de lecture : 7 minutes

Dans On N’est Pas Couché, sur la chaîne de service public France 2, le 23 mai 2020, la chanteuse et actrice ayant la nationalité française, née Aliouane, dont le grand-père était « référent local » du FLN dans le Var durant la Guerre d’Algérie, déclarait :

« Il y a des hommes et des femmes qui se font mas­sacr­er quo­ti­di­en­nement, en France tous les jours pour leur couleur de peau (…) C’est un fait (…) une des raisons pour lesquelles les gens sont fâchés après la police ».

Elle ajoutait :

« Il y a des mil­liers de per­son­nes qui ne se sen­tent pas en sécu­rité face à un flic et j’en fais par­tie ».

Malgré les demandes de syndicats de policiers, le ministre de l’Intérieur n’a pas jugé nécessaire de porter l’affaire en justice, tout en « dénonçant » les propos.

Les réactions du Figaro et de Présent

Dans Le Figaro, le 25 mai, et sur Reac’n’roll, le 26 mai, Ivan Rioufol ne mâche pas ses mots : « Camelia Jor­dana a déver­sé un bidon d’essence sur la sit­u­a­tion explo­sive des ban­lieues », « Camélia Jor­dana promeut la haine du flic ». Il est vrai que, ain­si que le remar­que fort juste­ment le quo­ti­di­en Présent, sous la plume de Paul Ver­meulen, par­ler de « mas­sacre » cor­re­spond, à en croire les dic­tio­n­naires, plutôt à ceci : « « Un mas­sacre est l’ac­tion de tuer indis­tincte­ment une pop­u­la­tion humaine ou ani­male, soit en par­tie soit com­plète­ment ». La police française fait-elle cela, comme le dit la chanteuse issue de la Nou­velle Star ? ». Si le « mas­sacre » a lieu pour des caus­es racial­istes, comme ce fut le cas en divers­es péri­odes de l’histoire humaine, alors il peut s’agir d’un géno­cide. Il est d’ailleurs dou­teux, de l’avis de nom­bre de com­men­ta­teurs, l’affaire fait beau­coup glos­er sur les réseaux soci­aux, que la police soit coupable d’ourdir un géno­cide en France.

Sauf sous la « plume » tou­jours fort mal orthographiée d’individus dont les noms, s’ils n’ont pas été « jor­danisés », con­ser­vent les traces d’origines non celtes. Rioufol ne manque pas de verve en écrivant :

« Les minorités plain­tives, qui se dis­ent vic­times de la “haine” française, ont trou­vé en Camélia Jor­dana leur incen­di­aire tran­quille (…) Je pour­rais, il est vrai, ne pas relever les pro­pos de la péron­nelle. Ce n’est pas la pre­mière fois que le show biz, con­som­ma­teur de pen­sées toutes faites, dit des âner­ies. Mais c’est parce que ce type de réflex­ion se répand et trou­ve ses défenseurs jusqu’à l’Assemblée nationale qu’il serait temps de s’inquiéter de l’impunité de ces fau­teurs de guerre civile. Quand Camélia Jor­dana par­le ain­si, elle porte la parole d’une con­tre-société. Celle-ci voit dans la police une force illégitime car étrangère, dès qu’un flic pénètre dans les ter­ri­toires per­dus par la République. La “par­ti­tion” décrite par François Hol­lande, ou le “séparatisme” nom­mé ain­si par Emmanuel Macron, sont une même bombe à retarde­ment. Or des minorités mil­i­tantes ten­tent de l’amorcer dans l’apathie médi­a­tique. Sur le plateau, same­di, les appels induits à la résis­tance con­tre la France n’ont pas reçu de con­tra­dic­tions. Per­son­ne ne s’est levé pour dénon­cer, non plus, le racisme des antiracistes. » 

Valeurs Actuelles montre l’indigence de la chanteuse

Valeurs Actuelles pub­lie le 26 mai 2020 un arti­cle inti­t­ulé « Péti­tions indi­gestes, tri­bunes indi­gentes : on s’est promené sur le compte Face­book de Camélia Jor­dana et on n’est pas déçu ». L’article mon­tre que Camélia Jor­dana a mul­ti­plié les sig­na­tures de tri­bunes et de péti­tions, depuis 2016, infor­mant ses « amis » des réseaux soci­aux par un sem­piter­nel « Je signe parce que j’en ai marre ». En gros, elle signe con­tre Marine Le Pen et pour Adama Tra­oré ou Théo, le « jeune » orig­i­naire d’Afrique vio­lé non vio­lé par une matraque de polici­er, dont la presse se fit les choux gras avant d’oublier de revenir sur le cas du jeune dealeur sub­ven­tion­né par l’État.

L’auteur indique que la chanteuse quar­an­te­naire a tout de l’arroseur arrosé main­tenant que nom­bre de per­son­nes en ont « marre » de ce qu’elle dit. Il note aus­si qu’une péti­tion lancée pour la défense de la chanteuse venue de La Nou­velle star, incon­sciente d’être arrivée à ce statut du fait de son orig­ine, par racisme inver­sé en sa faveur donc (ndla), total­i­sait moins de 500 sig­nataires le 27 mai. Le 25 mai un autre arti­cle paru sur le site de l’hebdomadaire mon­trait que la chanteuse « ver­sait dans le racisme » :

« La chanteuse et actrice don­nait une inter­view en octo­bre 2019 pour La Provence. À l’époque, elle est à l’affiche du film Sœurs d’armes, dans lequel elle incar­ne une Française qui part se bat­tre aux côtés des kur­des. Le jour­nal région­al lui demande alors quel regard elle porte sur la sit­u­a­tion du peu­ple kurde. Sa réponse : « Si la crise était sué­doise, je pense que le prob­lème serait un peu moins com­pliqué… Si c’étaient des blancs catholiques qui étaient en train de se faire mas­sacr­er, on trou­verait for­cé­ment des solu­tions », lâche-t-elle, prob­a­ble­ment fière à l’époque. » Plus loin : « En remon­tant en arrière, Camélia Jor­dana cri­ti­quait déjà la France pour être dirigée par de « vieux blancs rich­es » en novem­bre 2018 dans le mag­a­zine Fraîch­es. Elle esti­mait que « beau­coup de jeunes gens » comme elle, « ne se sen­tent pas con­cernés par une société » dirigée par ce genre de personnes. »

Des propos racistes visant les « blancs ».

Valeurs Actuelles rap­porte aus­si le fait que le boxeur « Patrice Quar­teron étrille les « con­ner­ies » de Camélia Jor­dana ». Le boxeur indique que la chanteuse a vécu une enfance heureuse dans une vil­la avec piscine et piano du sud de la France, très loin de ce dont elle par­le et ne vit pas. Pour lui, dans une vidéo, Camélia Jor­dana est une « une faus­saire de la ban­lieue », ce qu’il dénonce depuis plusieurs années, con­sid­érant que ces gens font plus de mal aux habi­tants des ban­lieues que les policiers dont par­le une Jor­dana qui paraît ignor­er qu’ils sont très nom­breux à être noirs ou arabes.

Ailleurs ?

Cyril Hanouna s’en prend à la « nou­velle star » en déclarant sur RTL, le 26 mai, que Camélia Jor­dana « a ven­du trois dis­ques dans sa vie ! ».

Dans Nice-Matin, le com­man­dant de brigade, à l’époque, des deux gen­darmes femmes tuées en 2012 à Col­lo­brière lui répond dans une let­tre ouverte. Qual­i­fi­ant les tueurs, auteur d’un vrai « mas­sacre », de « raclures », que Camélia Jor­dana « aurait cer­taine­ment par­don­nées », il prend la parole à cause de la « diar­rhée ver­bale » pronon­cée par la chanteuse.

Pour Manuel Valls, dans Gala, ce que dit Camélia Jor­dana est « faux » et « exagéré ».

Qui soutient Camélia Jordana ?

Per­son­ne en apparence, sinon Jean-Luc Mélen­chon et LFI devenus une sorte de mou­ve­ment poli­tique lunaire vivant en ape­san­teur. Aurélien Taché aus­si, ancien député LREM devenu député LREM « cri­tique ». Sur Twit­ter. C’est bien ce silence qui est finale­ment très intéres­sant, le silence hon­teux des coupables. La cul­pa­bil­ité de ceux, médias, artistes, monde de la cul­ture et de l’édition, poli­tiques, qui au long des 50 dernières années ont instal­lé en France la pos­si­bil­ité qu’une Camélia Aliouane, alias Jor­dana, insulte les forces et l’ordre et… invite le min­istre de l’intérieur à venir débat­tre avec elle à la télévi­sion. La respon­s­abil­ité des pro­pos de cette femme est partagée par les silen­cieux, ceux qui, défendirent un Meh­di Meklat mais qui se taisent maintenant.

France Inter fait pire. Comme il ne s’agit pas cette fois de sor­tir directe­ment du silence, la radio donne la parole à « celles et ceux qui se recon­nais­sent dans les pro­pos de Camélia Jor­dana ». Rien que la for­mu­la­tion du titre, « celles et ceux », en dit long. On trou­vera dans ce pan­el « neuf per­son­nes » racisées, autre expres­sion dont on se demande ce qu’elle fait sous la plume de jour­nal­istes de France Inter, aucun n’ayant par ailleurs de patronymes « racisés ». France Inter, une radio qui croit en l’existence de races ?

Quant à Camélia Jor­dana, une sanc­tion cor­re­spon­dant à son niveau d’analyse sem­ble appro­priée : une heure de colle avec un devoir sup­plé­men­taire en « Édu­ca­tion Civique » ? C’est que dans la nuit du 26 au 27 mai, il y a eu 7 guet-apens en France, des pom­piers appelés puis cail­lassés, la police attaquée par des gens aux « cheveux frisés », comme dit madame Aliouane, pour qui ten­ter de tuer du flic serait un loisir. On attend une émis­sion de la radio d’État sur ces faits, bien réels quant à eux.