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Qui se cache derrière Mediacités ?

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20 mars 2024

Temps de lecture : 5 minutes
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Qui se cache derrière Mediacités ?

Temps de lecture : 5 minutes

Mediacités est un média d’investigation locale fondé en 2016. S’il se revendique « indépendant », on constate vite une forte présence de la gauche dans ses colonnes.

Des fondateurs issus d’un sérail unique

Mediac­ités naît de l’idée de sept jour­nal­istes : Jacques Trente­saux, aujourd’hui directeur de pub­li­ca­tion, Yves Adak­en, rédac­teur en chef Lille, Nico­las Bar­ri­quand, rédac­teur en chef Lyon, Ben­jamin Peyrel, Hugo Soutra, Syl­vain Mor­van et Manola Gardez. Les qua­tre pre­miers vien­nent de L’Express, les deux suiv­ants de La gazette des com­munes, et la dernière est la seule non-jour­nal­iste. Les orig­ines médi­a­tiques de Mediac­ités per­me­t­taient d’imaginer un média qui enquêterait pri­or­i­taire­ment sur les grands groupes trop pol­lueurs et les mou­vances peu enclines à accueil­lir l’immigration à bras ouverts. On ne sera pas déçu.

Mediacités, un titre pleinement inscrit dans la galaxie des médias de gauche

Out­re L’Express, Mediac­ités gravite dans le cer­cle de L’Humanité, Libéra­tion, Le Canard Enchaîné et Médi­a­part. L’un de ses pre­miers faits d’armes con­siste même à pub­li­er une enquête con­jointe avec ce dernier titre. Une ori­en­ta­tion qu’on ne lui reprochera pas néces­saire­ment, à con­di­tion que l’orientation soit assumée. Car elle existe, les arti­cles présents sur son site ne lais­sent aucune place au doute. Défense des migrants, y com­pris des faux mineurs isolés, com­bat pour s’assurer que les éoli­ennes béné­fi­cient de leurs sub­ven­tions attribuées, tout y est. Mediac­ités s’est plus par­ti­c­ulière­ment spé­cial­isé dans les enquêtes con­tre les entre­pris­es. Au reste, cer­taines met­tent en dan­ger les riverains, et c’est bien le tra­vail des jour­nal­istes que de le mon­tr­er. Reste à regret­ter que peu d’enquêtes soient dédiées à la fraude ou aux sub­ven­tions abu­sive­ment allouées.

Voir aus­si : Médi­a­part, info­gra­phie

Un combat pour un journalisme indépendant

Le départ de L’Express de Jacques Trente­saux, Yves Adak­en, Nico­las Bar­ri­quand, et Ben­jamin Peyrel se fait juste après le rachat du titre par Patrick Drahi, qui pos­sède égale­ment BFMTV, RMC et Libéra­tion. Aujourd’hui, Mediac­ités n’hésite pas à dénon­cer L’Express sur cer­tains sujets. Ain­si, le 15 décem­bre 2023, Antony Torzec, rédac­teur en chef Nantes pour Mediac­ités, met­tait en par­al­lèle sur X (ex-Twit­ter) un « dossier de L’Express acheté par la métro­pole de Nantes pour une val­ori­sa­tion » du sujet du numérique à Nantes et « 5 longues enquêtes exclu­sives de Mediac­ités pour une infor­ma­tion indépen­dante. » Bien sûr, l’indépendance du numéro incrim­iné n’est pas for­cé­ment liée à Patrick Drahi lui-même, puisqu’il s’agit là de l’achat sup­posé d’un numéro unique par une métropole.

Voir aus­si : Patrick Drahi, infographie

L’indépendance des journalistes, un sujet d’aujourd’hui

L’indépendance des médias est un véri­ta­ble ser­pent de mer par­ti­c­ulière­ment prég­nant aujourd’hui, alors que la plu­part des médias, quel que soit leur sup­port et leur ligne, qu’ils soient nationaux ou régionaux, sont pos­sédés par des mil­liar­daires. Cer­tains appar­ti­en­nent aux jour­nal­istes eux-mêmes, comme Medi­a­part, lui-même sub­ven­tion­né par Xavier Niel au départ mais le mod­èle reste rare, notam­ment parce qu’il met les jour­naux dans une sit­u­a­tion plus insta­ble. Medi­a­part est sauvé par ses frais d’abonnement élevés, les autres vivent sur les dons, jamais garan­tis. Mediac­ités a ain­si lancé une grande cam­pagne d’abonnement et de demande de dons fin 2023. Dans la même logique et de l’autre côté de l’échiquier poli­tique, on se sou­vient de la cam­pagne « #JeSu­is­LàPour­VA », des­tinée à obtenir de nou­veaux abon­nements à Valeurs actuelles. La ques­tion reste ouverte. Un mil­liar­daire peut-il manœu­vr­er les sujets de son média pour qu’il n’aborde pas ses entre­pris­es ou ses amis ? Com­ment être assuré qu’il ne le fait pas, y com­pris de façon indi­recte ? S’il le fait, com­ment en être infor­mé et se ren­seign­er sur les sujets ban­nis ? Quant à Mediac­ités, s’il n’appartient pas à un mil­liar­daire, il doit beau­coup, vrai­ment beau­coup à Medi­a­part. C’est au fond une ver­sion locale du média d’Edwy Plenel, aus­si bien par les sujets que par la façon dont ils sont abordés.

Comme tous les autres, Mediacités affiche une fausse neutralité

Bien des jour­nal­istes aiment se dire neu­tres et affirmer que jamais, non jamais, ils ne sont influ­encés par quoi que ce soit. Seuls les guident les faits, sacro-saints faits que seuls les aveu­gles ne voient pas. De quoi oubli­er que des faits, il s’en pro­duit des mil­lions en per­ma­nence, et que le tra­vail du jour­nal­iste est d’abord de les tri­er, de faire un choix, puis de créer une infor­ma­tion. Ce choix ne peut pas être objec­tif. On choisit de par­ler (ou ne ne pas par­ler) de l’agression d’une vieille dame comme on choisit d’enquêter sur une entre­prise. Mediac­ités n’est ni neu­tre, ni objec­tif, et au fond, cela n’a pas d’importance, d’autant plus qu’il ne béné­fi­cie pas d’argent pub­lic. En réal­ité, ce que l’on pour­rait atten­dre, ce n’est pas que Mediac­ités dis­paraisse ou change, mais qu’un autre Mediac­ités voit le jour, avec des jour­nal­istes issus du Figaro, de Valeurs actuelles et du Jour­nal du dimanche plutôt que de Libéra­tion, L’Humanité et L’Express. C’est la plu­ral­ité, et non l’objectivité, qui garan­tit une infor­ma­tion exhaus­tive et fiable.

Voir aus­si : Mediac­ités, l’investigation locale à œillères