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Dissolution de Génération identitaire : l’impossible braquage des projecteurs sur l’invasion migratoire

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9 avril 2021

Temps de lecture : 6 minutes
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Dissolution de Génération identitaire : l’impossible braquage des projecteurs sur l’invasion migratoire

Temps de lecture : 6 minutes

Red­if­fu­sion. Pre­mière dif­fu­sion le 19/02/2021

Cela faisait plusieurs mois que l’extrême gauche demandait la dissolution du mouvement Génération identitaire. Comme Éric Zemmour l’a souligné à plusieurs reprises sur CNews, après la dissolution du CCIF, le gouvernement a décidé de mener une opération de communication afin de montrer qu’il est en équilibre sur une jambe droite et une jambe gauche. Gérald Darmanin a donc annoncé la dissolution de Génération identitaire peu de temps après son action symbolique le 19 janvier 2021 au Col du Portillon à la frontière franco-espagnole. Cette affaire et une récente action du militant no border Cédric Herrou nous montrent toute la difficulté de braquer les projecteurs des médias sur l’immigration massive qui arrive en France.

« La lutte contre l’islamisme »

Après les dif­férents atten­tats islamistes sur­venus à l’automne 2020, le gou­verne­ment a voulu affich­er sa déter­mi­na­tion à com­bat­tre l’islamisme qui gagne chaque jour du ter­rain en France. Une pro­gres­sion que soulig­nait en sep­tem­bre 2020 Le Figaro en pub­liant les résul­tats d’un sondage par­mi les jeunes de cul­ture arabo-musul­mane. Coup sur coup, la dis­so­lu­tion des asso­ci­a­tions Bara­ka city et du CCIF était annon­cée comme pre­mières mesures d’un com­bat dont la loi sur le « séparatisme » devait être la con­sécra­tion. Peu importe que, comme le souligne l’Observatoire de l’islamisation, cette loi com­porte « des failles béantes de la stratégie du locataire de la place Beau­vau con­tre l’islamisme ». L’essentiel n’est-il pas de bien com­mu­ni­quer et de faire des gestes sym­bol­iques ? En ter­mes moins diplo­ma­tiques, on appelle cela de l’affichage. Surtout si comme le souligne Actu.fr, le min­istre de l’intérieur réfute le lien entre islamisme et immigration.

Un calendrier presque parfait

Alors qu’une par­tie de la gauche en pleine dérive n’avait de cesse de crier à l’islamophobie pour évo­quer la loi sur le séparatisme en débat au par­lement, des mil­i­tants de Généra­tion iden­ti­taire ont mené une action visant à met­tre en lumière le manque de con­trôles à la fron­tière fran­co-espag­nole. Les fron­tières français­es sem­blent en effet tou­jours aus­si poreuses, comme l’illustre la sit­u­a­tion au Col de Mont­genèvre par exem­ple, où des mil­i­tants no bor­der ne cachent pas que « tous les jours, ils sont une dizaine (env­i­ron) de migrants à essay­er de pass­er par le col ».

Cette mise en accu­sa­tion a forte­ment déplu au min­istre de l’intérieur qui annonce à inter­valle réguli­er des « ren­force­ments des con­trôles aux fron­tières ». Après la dis­so­lu­tion de Bara­ka city et du CCIF, le min­istre de l’intérieur n’a donc pas résisté à la ten­ta­tion d’envoyer un sig­nal à sa gauche en annonçant la dis­so­lu­tion de Généra­tion identitaire.

Génération identitaire : l’agit prop criminalisée

L’Observatoire du jour­nal­isme a déjà eu l’occasion de soulign­er la dif­férence de traite­ment et de présen­ta­tion par les médias de grand chemin entre les actions de mou­ve­ments cat­a­logués à gauche et celles menées par des mou­ve­ments cat­a­logués à droite. Ain­si, Green­peace, une organ­i­sa­tion dont les mil­i­tants n’hésitent pas à entr­er clan­des­tine­ment dans une cen­trale nucléaire, a un cap­i­tal de sym­pa­thie intact auprès de nom­breux médias. Le mou­ve­ment est appelé une « organ­i­sa­tion non gou­verne­men­tale » et ses activistes sont qual­i­fiés de « mil­i­tants écol­o­gistes ».

À l’opposé, dénon­cer l’absence de con­trôles aux fron­tières en ces temps de pandémie et de crise économique vous expose à une présen­ta­tion stig­ma­ti­sante. Le mou­ve­ment Généra­tion iden­ti­taire est fréquem­ment présen­té comme un « grou­pus­cule » et ses mem­bres de mil­i­tants d’extrême voire d’ultra droite.

Braquer les projecteurs sur les frontières passoires : pas bien

L’action paci­fique des mil­i­tants de Généra­tion iden­ti­taire le 19 jan­vi­er 2021 à la fron­tière fran­co-espag­nole a per­mis de met­tre en lumière les fron­tières pas­soires, des fron­tières qui sont loin d’être con­trôlées comme la sit­u­a­tion l’exige, en dépit des coups de men­ton du min­istre de l’intérieur. Comme lors des actions précé­dentes, nulle vio­lence dans cette opéra­tion de com­mu­ni­ca­tion, nul déra­page ver­bal, en dépit des ten­ta­tives notam­ment de Mar­i­anne de chercher la faute dans un arti­cle à charge, avec un reg­istre lex­i­cal tiré des « heures les plus som­bres de notre his­toire » (la cita­tion est de la rédaction).

Mais l’affaire n’en est pas restée là. Reprenant la présen­ta­tion à charge et par­fois totale­ment déli­rante de cer­tains médias, tou­jours prompts à trou­ver de la haine là où il ne s’agit que de pro­mou­voir le respect du principe de nation­al­ité et de régu­lar­ité du séjour, Ouest-France nous appre­nait que « le par­quet de Saint-Gau­dens annonce l’ouverture d’une enquête prélim­i­naire pour « provo­ca­tion à la haine raciale » après l’action coup de poing menée par les mem­bres du groupe d’extrême droite Généra­tion iden­ti­taire ».

Cha­cun appréciera la ten­ta­tive de Ouest France d’introduire un peu de vio­lence lors d’une opéra­tion « coup de poing » là où il n’y en pas eu… Un cran au-dessus, 20 Min­utes nous appre­nait le 15 févri­er que « le pro­cureur de la République de Saint-Gau­dens a indiqué qu’il avait saisi l’Office cen­tral de lutte con­tre les crimes con­tre l’humanité, les géno­cides et les crimes de guerre après l’opération anti-migrants de Généra­tion iden­ti­taire dans les Pyrénées ». Dans ces con­di­tions, la réou­ver­ture du tri­bunal de Nurem­berg parait envis­age­able comme prochaine étape, en dépit de l’absence de tout préju­dice tant matériel que moral à qui que ce soit…

Préjudice matériel

Pen­dant ce temps, Cédric Her­rou, le mil­i­tant no bor­der aux 200 pas­sages clan­des­tins revendiqués, s’épanche dans les colonnes de Libéra­tion le 13 févri­er. Des caméras instal­lées dans la val­lée où il habite l’inquiètent. N’écoutant que son courage, et ces caméras risquant peut-être de bra­quer les pro­jecteurs sur les nom­breux pas­sages de clan­des­tin dans cette val­lée à la fron­tière fran­co-ital­i­enne, il affirme sans crainte : « J’en ai volé une dizaine. Partout, sur tous les chemins ou près de la voie ferrée ».

On apprend dans l’article que ces boitiers sont peut-être la pro­priété de la SNCF ou de gen­darmes mobiles.

L’histoire retien­dra que bra­quer les pro­jecteurs sur des fron­tières poreuses vous expose non seule­ment à une présen­ta­tion plus que néga­tive par de nom­breux médias de grand chemin mais égale­ment aux pour­suites et incrim­i­na­tions judi­ci­aires les plus extrêmes, tan­dis que revendi­quer avoir aidé à des pas­sages clan­des­tins et ren­dre inopérant des pro­jecteurs qui ris­queraient de filmer des clan­des­tins qui fran­chissent la fron­tière vous expose à l’impunité voire la sym­pa­thie de nom­breux médias. Com­prenne qui pour­ra… à moins que ce ne soit que trop facile à comprendre.