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Claire Chazal sauve sa place sur France Télévisions, mais pas son équipe

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23 août 2019

Temps de lecture : 5 minutes
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Claire Chazal sauve sa place sur France Télévisions, mais pas son équipe

Temps de lecture : 5 minutes

Claire Chazal est encore accusée d’avoir fait cavalier seul, et d’avoir mené sa carrière au détriment de ses collaborateurs. Cette fois sur France 5 où elle animait de 2016 à juin 2019 l’émission culturelle Entrée Libre. Car si elle sauve sa place à l’antenne – elle animera la quotidienne de Passage des Arts, au même horaire (20h20) mais produite en interne, ses 70 collaborateurs restent sur le carreau suite à la décision du service public audiovisuel d’arrêter l’émission.

Audience insuffisante

Le Parisien con­sacre un arti­cle fouil­lé à l’affaire, le 27 juil­let 2019. Les pre­mières rumeurs de la sup­pres­sion de l’émission com­men­cent à l’automne 2018, sur fond d’audiences jugées insuffisantes :

« Con­trainte à des économies dras­tiques, la direc­tion de France Télévi­sions veut remet­tre à plat ses pro­grammes cul­turels. Soumise à des claus­es d’au­di­ence de plus en plus élevées et qu’elle n’at­teint pas (1,4 % de PDA au lieu du 1,6 % demandé), « Entrée libre » est dans le col­li­ma­teur ».

Le 12 avril, c’est con­fir­mé, Takis Can­dilis, numéro 2 de France Télévi­sions, reçoit Jean-François Boy­er, le patron de Tétra Média, qui pro­duit l’émission, et lui annonce son arrêt. Ce dernier mobilise ses réseaux pour ten­ter de la sauver.

Claire Chazal, le syndrome de la star ?

Par ailleurs, Claire Chaz­al est accusée d’en faire trop et d’avoir la grosse tête. Deux fois mieux payée que son prédécesseur Lau­rent Goumarre, elle s’est rapi­de­ment fâchée avec la pro­duc­trice Sab­ri­na Azoulay. Elle affirme pour­tant avoir divisé son salaire par qua­tre : de 120.000 € bruts par mois en 2015 sur TF1 selon Chal­lenges, elle en gag­n­erait donc 30.000. Elle aurait demandé plus : jusqu’à 45.000 € par mois, soit 2.500 € par numéro, alors que son prédécesseur en gag­nait 500, selon Télés­tar – la direc­tion de France Télévi­sions avait démen­ti ces chiffres et affir­mé qu’elle ne gag­n­erait « que » 20% de plus que son prédécesseur.

Cepen­dant elle a aus­si touché un con­fort­able chèque d’indemnités de licen­ciement à son départ : pas moins de 3.5 mil­lions d’euros. « Ce qui est cer­tain, aujourd’hui, c’est que j’ai divisé mon salaire par qua­tre! Ma démarche d’animer Entrée libre est sincère. (…) Je ne fais pas ça pour l’argent, mais parce que je suis pas­sion­née », expli­quait-elle alors.

« Cela n’a jamais été très sim­ple. Claire Chaz­al fai­sait ce qu’elle voulait. Elle arrivait sur le plateau avec son coif­feur, sa maquilleuse et il était impos­si­ble de mod­i­fi­er ses textes », […] « Pour qu’elle se sente bien, il a fal­lu chang­er le décor, les lumières » […] «  lors de l’en­reg­istrement des numéros le lun­di, elle n’adres­sait plus la parole à la pro­duc­trice, renchérit un habitué. Elle la cri­ti­quait. C’é­tait la cour d’é­cole », expliquent des proches de l’émission au Parisien.

Résul­tat, un nou­veau rédac­teur chef est dépêché en sep­tem­bre 2017 pour ten­ter d’aplanir les angles entre la présen­ta­trice et la pro­duc­tion de l’émission.

Claire Chazal se démène pour sauver sa place… jusqu’à Brigitte Macron

En par­al­lèle, Claire Chaz­al mobilise aus­si ses réseaux. Philippe Besson, le min­istre de la Cul­ture Franck Riester, et même la pre­mière dame Brigitte Macron.

« Retir­er un pro­gramme cul­turel à 20h20 était com­pliqué poli­tique­ment à assumer pour la direc­tion de France Télé. En plus, dès que Claire Chaz­al voy­ait un des patrons, elle mon­trait des tex­tos qu’elles s’en­voy­aient avec Brigitte Macron ».

Ses équipes espèrent qu’en sauvant l’émission, elle sauvera aus­si leurs postes. En réal­ité, elle pro­pose la même chose, à la même heure, mais moins cher. Takis Can­dilis annonce le con­cept le 19 mai dans Le Parisien, ce qui per­met aus­si de recas­er des salariés mai­son de deux émis­sions sup­primées, Thé ou Café  et C au pro­gramme, de France 2. Les 70 per­son­nes de Tétra Média – dont 10 jour­nal­istes – qui tra­vail­lent pour Entrée Libre, sont larguées en rade.

Procès en contrefaçon

Quant à Jean-François Boy­er, il men­ace d’attaquer France 2 pour con­tre­façon :

« Ce n’est pas un prob­lème d’ar­rêter un pro­gramme car per­son­ne n’est pro­prié­taire de sa case. Ce qui en est un, c’est d’an­non­cer qu’il va lancer à la place une émis­sion pro­duite en interne sur la même thé­ma­tique, la même chaîne, à la même heure avec la même ani­ma­trice. En sachant, en out­re, que c’est nous qui avons per­mis l’ar­rivée de Claire Chaz­al à France Télévi­sions. Nous avions, à l’époque, demandé à Lau­rent Goumarre, qui présen­tait le pro­gramme depuis 2011, de par­tir pour accueil­lir Claire Chaz­al selon le souhait de la chaîne ».

Il annonce donc un con­tentieux à venir :

« France Télévi­sions a un devoir général de loy­auté dans les affaires avec ses parte­naires. Cela m’oblige à déclencher un con­tentieux con­tre le groupe pub­lic sur cette base, mais aus­si pour par­a­sitisme, con­tre­façon et défaut de bonne foi dans l’exé­cu­tion des con­trats. Nos avo­cats ont été sai­sis. Et nous fer­ons une demande de répa­ra­tion du préju­dice […]il y a une façon de faire des affaires. Là, c’est presque de la spo­li­a­tion ! Je tra­vaille avec toutes les chaînes depuis vingt ans et je n’avais jamais vu cela. »

Près de trois siè­cles après, le célèbre proverbe des fables de la Fontaine peut être ain­si mod­ernisé : selon que tu aies échangé des SMS avec Brigitte Macron ou non, la direc­tion de France Télévi­sions te ren­dra riche ou chômeur.