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La Croix et Radio France meilleurs médias pour CB News

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14 septembre 2019

Temps de lecture : 5 minutes
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La Croix et Radio France meilleurs médias pour CB News

Temps de lecture : 5 minutes

Asinus asinum fricat. Le grand prix des Médias de CB News, agence spécialisée qui couvre justement l’information médiatique, ressemble à un autosatisfecit du système, à l’heure où de moins en moins de lecteurs ont confiance dans la presse mainstream. Les Gilets jaunes n’ont fait qu’accélérer le mouvement, et pour garder la main, le système est obligé de recourir à une censure basse du front, mais 2.0 : effacement des audiences des pages d’extrême-gauche sur Facebook, nettoyage à la hache de Google News aux dépens de la réinformation régionale, censures du quotidien Présent par Facebook, censure de Google pour Breizh Info, censure puis rétablissement d’un article de l’Ojim par Facebook etc.

Prix publicitaire pour CB News

Par­mi les médias primés, on retrou­ve Libéra­tion pour les hors-séries, la Croix pour les titres de presse, France Cul­ture pour les radios. Pour ne bless­er per­son­ne, le titre de la meilleure Une n’a pas été attribué, tan­dis que la répar­ti­tion des prix mon­tre la volon­té d’en don­ner un peu à chaque annon­ceur ou cap­i­tal­iste médi­a­tique – il serait bête de fâch­er une future source de revenus ou d’information.

Bien que ce « grand prix médias » n’apparaît que ce pourquoi il a été organ­isé, c’est-à-dire un événe­ment à voca­tion pub­lic­i­taire qui sert bien plus CB News que les médias primés, La Croix n’a pu s’empêcher de s’adresser un autosat­is­fecit doré sur tranche : « Notre joie a été vive de recevoir mar­di le prix CB News du « meilleur titre de presse 2019 » décerné par un jury de pro­fes­sion­nels des médias et de la com­mu­ni­ca­tion. Ce prix, nous en sommes très fiers. Nous y voyons la recon­nais­sance de nos efforts pour hon­or­er une cer­taine idée de l’information. […] Avec la volon­té d’éclairer la marche du monde et le des­tin des hommes ». Rien que ça ! La Croix avait déjà été primée en 2014 par CB News, et classée sec­onde en 2012 der­rière Libé, c’est dire.

La Croix entrée dans les mœurs modernistes

Der­rière l’hubris de la rédac­tion, l’envers est moins flat­teur. Fondée en 1883 par les Assomp­tion­nistes, dix ans après le Pèlerin, La Croix fait par­tie du groupe Bayard (ex-Mai­son de la Bonne Presse avant 1969) qui a aus­si la main sur 27% de la presse jeunesse en France. Cepen­dant, La Croix, encore six­ième jour­nal de France en ter­mes de dif­fu­sion, a depuis longtemps rompu avec son objec­tif pre­mier qui était de créer les con­di­tions d’un gou­verne­ment respec­tant les valeurs chré­ti­ennes et le plaçait en con­cur­rence frontale avec les jour­naux anti­cléri­caux ou laïcistes.

La laïc­ité est entrée dans les mœurs, et la soumis­sion au poli­tique­ment et religieuse­ment cor­rect dans celle de La Croix – qui a sup­primé dès 1968 la croix latine qui ornait sa manchette – à l’époque, cela cor­re­spondait aus­si à la ligne résol­u­ment mod­erniste, voire cryp­to-marx­iste, d’une grande par­tie des réfor­ma­teurs du clergé, intel­lectuels ou chargés de met­tre en place les change­ments rad­i­caux du Con­cile dans les paroisses.

En 2017, le jour­nal vote et appelle à vot­er Macron, comme nom­bre de ses con­frères, mais en suiv­ant une ligne résol­u­ment uni­ver­sal­iste et sans-fron­tiériste : « Nous n’ac­cep­tons pas l’idée d’un choix déter­miné par la crainte. Crainte de l’avenir, de l’Eu­rope, du monde, de l’é­tranger, de l’autre. Nous ne pou­vons-nous résign­er à ce que l’on élève des clô­tures autour de la France et à ce que l’on intro­duise des sépa­ra­tions entre les habi­tants de notre pays en fonc­tion de leur nation­al­ité ». En 2002 entre Chirac et le Pen, le quo­ti­di­en avait déjà adjuré ses lecteurs de vot­er Chirac.

De même, La Croix sem­ble assez opposée aux March­es pour la vie – au point d’en divis­er la fréquen­ta­tion par qua­tre en 2018, avant d’être cor­rigée sur Twit­ter par l’évêque de Gap. Oppo­si­tion frontale aux pop­ulistes – comme les col­lègues main­stream, pro­pa­gande de l’islam dans ses colonnes, croisières thé­ma­tiques con­sacrées… au boud­dhisme, pub­lic­ité pour des prières organ­isées par des… protes­tants LGBT et d’une asso­ci­a­tion « catholique LGBT », hors-série thé­ma­tique de 100 pages pour taper sur le FN en 2016… La Croix sem­ble avoir remisé ses con­vic­tions chré­ti­ennes là où sont entre­posés depuis le Con­cile chaires, dais de pro­ces­sion, chemins de croix, orne­ments anciens et soutanelles rouges : au grenier.

Avec les résul­tats qu’on sait : moins de 100 ordi­na­tions diocé­saines par an (78 en 2019) con­tre une moyenne de 277 entre 1945 et 1949, des églis­es démolies ou ven­dues faute de servir, des diocès­es de cinq paroiss­es où la plu­part des vil­lages n’ont plus de messe, des cou­vents qui fer­ment faute de voca­tions, le nom­bre de prêtres divisé par huit en cinquante ans… ce qui tranche d’ailleurs avec la bonne san­té rel­a­tive des étab­lisse­ments et paroiss­es tra­di­tion­nels, adeptes de la messe en latin – ils représen­tent bon an mal an entre un quart et un cinquième des ordi­na­tions, pour 10% des fidèles pra­ti­quants à peine. L’Eglise issue du Con­cile est soumise au poli­tique­ment cor­rect : elle accueille les migrants, tape sur le Pen et vote Macron.

Quant à La Croix, elle n’échappe pas à la stéril­ité et à la soumis­sion : sa ligne résol­u­ment en accord, avec les idées en vogue du moment ne séduit pas. Le jour­nal a per­du un lecteur sur dix entre 2017 et 2018, et un sur 12 depuis 2008. Le prix CB News sem­ble être un hochet pour un titre qui nie sa pro­pre iden­tité et qui préfère s’affadir, plutôt que de défendre ses con­vic­tions en se démar­quant de la presse main­stream.