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France Inter joue le coup à fond avec le 9–3

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12 août 2020

Temps de lecture : 4 minutes
Accueil | Veille médias | France Inter joue le coup à fond avec le 9–3

France Inter joue le coup à fond avec le 9–3

Temps de lecture : 4 minutes

Red­if­fu­sion esti­vale 2020. Pre­mière dif­fu­sion le 3 mai 2020

Il n’aura échappé à aucun observateur que la Seine-Saint-Denis a été sur-représentée dans les débats médiatiques autour de la pandémie en cours, du confinement puis du déconfinement. Il est clairement apparu que le 9–3 (alias 9 cube) et le reste de la France ne répondent pas aux mêmes législations. Même France Inter le dit, sans doute par inadvertance.

Le 23 avril 2020, France Inter dif­fuse un reportage inti­t­ulé « Con­fine­ment : en Seine-Saint-Denis, des apparte­ments pour les femmes vic­times de vio­lences con­ju­gales ». Le reportage porte sur le 93.
Il est intéres­sant de pren­dre un peu de recul avant d’en venir à ce reportage.

Un rap­port par­lemen­taire relayé par Le Figaro et Valeurs Actuelles en 2018 révélait que les clan­des­tins (hors immi­grants légaux) représen­teraient entre 8 et 20 % de la pop­u­la­tion du 93. Une sim­ple prom­e­nade dans une ville du départe­ment suf­fit cepen­dant pour se ren­dre compte que ce pour­cent­age n’est qu’une par­tie de l’iceberg : la pop­u­la­tion extra européenne est large­ment majori­taire en Seine-Saint-Denis.

Tou­jours selon le même rap­port par­lemen­taire, l’État « ignore le nom­bre d’habitants dans le 93 ». En 2016 déjà, Jean-Pierre Chevène­ment qui n’est pas Renaud Camus, affir­mait que dans ce départe­ment « une nation­al­ité » dis­parais­sait. Chevène­ment avait même déclaré au micro de France Inter le 29 août : « en Seine-Saint-Denis, il y a 135 nation­al­ités mais il y en a une qui a qua­si­ment dis­paru ». À l’époque, un arti­cle du Point reve­nait sur les pro­pos de l’homme poli­tique en dres­sant un por­trait du 93 et indi­quait des don­nées fournies par l’INSEE : 30 % des habi­tants du 93 étaient alors immi­grés. Un nom­bre ne comp­tant donc pas les « jeunes », autrement dit les enfants d’immigrés ne se recon­nais­sant en règle générale pas dans la France. Le Point indi­quait aus­si que l’immense majorité des habi­tants du départe­ment est d’origine africaine, du Maghreb mais aus­si d’Afrique sub­sa­hari­enne. Cette sec­onde orig­ine est majori­taire main­tenant, tant dans les chiffres que dans le paysage eth­nique des villes. Et la reli­gion ultra majori­taire est l’islam. L’hebdomadaire le dis­ait : « Le départe­ment compte, de fait, un nom­bre record de mosquées : c’est le ter­ri­toire le mieux doté dans ce domaine (avec 160 lieux de culte dédiés à l’islam). »

Ce retour sur le réel est donc une néces­sité pour saisir l’article de France Inter du 23 avril 2020.

France Inter lutte contre les violences conjugales

C’est une des obses­sions du gou­verne­ment. Une obses­sion légitime : qui pour­rait défendre la vio­lence à l’intérieur des familles, en par­ti­c­uli­er des hommes con­tre leurs femmes ou leurs com­pagnes ? Le fait est là : durant le con­fine­ment, ces vio­lences sont plus élevées dans le 93, de cul­ture eth­nique mas­sive­ment non européenne, que partout ailleurs, même si le gou­verne­ment n’en dit mot. C’est pourquoi, France Inter analyse ce qui se passe dans le départe­ment : « En plein con­fine­ment, Plaine Com­mune Habi­tat, l’un des bailleurs soci­aux de Seine-Saint-Denis, met à la dis­po­si­tion des femmes vic­times de vio­lences con­ju­gales une dizaine d’appartements entière­ment meublés pour leur per­me­t­tre de démar­rer une nou­velle vie. La pre­mière famille est arrivée ce mercredi. »

Ces apparte­ments sont des­tinés aux femmes vic­times de vio­lence et oblig­ées de quit­ter leur domi­cile. La ques­tion qui se pose d’après France Inter est : « Quelles solu­tions donc pour les femmes vic­times de leur con­joint dans cette péri­ode si particulière ? »

Le cœur du réel passé sous silence

Un exem­ple est don­né : « C’est le cas de Djami­lah (prénom mod­i­fié). Sa petite fille de 2 ans et demi court partout dans l’appartement et en la regar­dant, Djami­lah parvient à sourire. Arrivée avec ses deux gross­es valis­es dans son nou­veau chez-soi, la jeune femme en ter­mine avec le huis clos trag­ique de son ancien apparte­ment. “J’ai eu des prob­lèmes avec mon mari, il m’a cassé le nez”, détaille Djami­lah, déjà vic­time dans le passé des coups de son compagnon. »

Nous ne savons pas de quelle orig­ine exacte est Djami­lah, pas plus que celle de son com­pagnon. France Inter laisse enten­dre le réel, le laisse devin­er mais n’insiste pas. Ce serait cepen­dant sans doute dif­férent si la jeune femme et son com­pagnon étaient eth­nique­ment européens : l’article insis­terait sans doute sur ce sujet. Le prob­lème (éludé) est ain­si avant tout eth­nique et cul­turel : la place de la femme dans les cul­tures non européennes per­met plus de violences.

Les dix apparte­ments en ques­tion sont mis à dis­po­si­tion de ces vic­times et sont gérés par une chargée de mis­sion de Plaine Com­mune Habi­tat, Sofia Boutrih. Un départe­ment africain, musul­man, où les vio­lences sont celles inhérentes à des cul­tures spé­ci­fiques. Quelle nation­al­ité, pour repren­dre l’expression de Chevène­ment, a bien pu dis­paraître? Le lecteur qui a la réponse peut l’envoyer directe­ment à France Inter.