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Factuel ferme ses portes un an après son lancement

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23 avril 2024

Temps de lecture : 5 minutes
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Factuel ferme ses portes un an après son lancement

Temps de lecture : 5 minutes

Factuel, lancé par le spécialiste des médias à succès Stéphane Simon, n’aura pas réussi à attirer les dix mille abonnés nécessaires à sa survie. Selon Le Figaro, il va être mis en liquidation avec l’espoir qu’un repreneur s’y intéresse. 15.000 lecteurs gratuits (sur une partie du contenu), un ton neutre et le parrainage de Christine Kelly n’auront pas suffi. Nous reprenons notre article du 15 avril 2023 annonçant le lancement de Factuel et les risques associés.

Factuel : face à la défiance des médias, (encore) un nouveau média

C’est une tendance paradoxale que l’on peut observer dans le paysage médiatique français. À mesure que se développe une défiance à l’endroit de la presse, de nouveaux médias fleurissent. Le dernier en date s’appelle Factuel et voit le jour sous le double patronage de la journaliste de CNews Christine Kelly et du consultant police-justice de BFMTV Dominique Rizet.

Des faits et de la transparence

Factuel (factuel.media) entend se dif­férenci­er en s’en ten­ant aux faits, en fouil­lant les don­nées et en tra­vail­lant sur des doc­u­ments bruts. Une volon­té d’équilibre et de trans­parence. Les deux têtes d’affiche Chris­tine Kel­ly et Dominique Rizet, prob­a­ble­ment con­scients du par­ti pris qui peut exis­ter chez leurs employeurs respec­tifs enten­dent ain­si ten­ter de créer un média réelle­ment non partisan.

Le rédac­teur en chef, Romain Ren­ner a été débauché au Figaro et dis­pose d’effectifs com­posé d’une ving­taine de jour­nal­istes et de pigistes « représen­tant la diver­sité des grands médias nationaux et régionaux ». La rédac­tion s’articule autour de cinq pôles : France, Fait divers, inter­na­tion­al « éco-con­so » et cul­ture média. Une sec­tion blog com­plète ces dif­férents domaine et devrait laiss­er peut-être plus de place à de l’opinion.

Une pre­mière enquête a été pub­lié en forme de pro­duit témoins sur la RATP. Le dossier est assez bien ficelé mais il fau­dra prob­a­ble­ment du plus « croustil­lant » pour gag­n­er des abonnés.

Un financement transparent mais pas que

Sans pub­lic­ité et mis­ant sur les abon­nements, Factuel fait le même pari que L’informé lancé en sep­tem­bre avec le finance­ment de Xavier Niel : créer un média payant à l’heure de l’information gra­tu­ite. Des investis­seurs privés ont cepen­dant mis la main au porte­feuille pour per­me­t­tre la créa­tion du média. Il est assuré par le directeur général du jour­nal Hugues de Fou­cauld que ceux-ci ne par­ticiper­ont pas aux déci­sions édi­to­ri­ales mais leur nom n’a pas fil­tré… cela mar­que une lim­ite, même légère, à l’indépendance. Une lim­ite qui touche tous les médias dans des mesures certes très différentes.

L’offre d’abonnement est fixé à 50 euros pour 6 mois 50 euros, 90 euros pour un an 160 euros pour deux ans. L’abonnement Club est lui à 300 euros pour deux ans et  Fon­da­teur 1500 euros 10 ans

Ces deux derniers don­nant accès à des priv­ilèges par­ti­c­uliers. Début avril, ils étaient un demi-mil­li­er à s’abonner à une des for­mules. Encore loin de l’objectif auda­cieux de 10 000 annon­cé sur le site pour le lance­ment prévu le 10 mai. L’objectif est d’atteindre les 25 000 abon­nés au bout d’un an.

Un binôme de parrains

Dans sa vidéo d’introduction, Chris­tine Kel­ly affirme qu’un français sur deux ne fait plus con­fi­ance au média 1 sur 4 pense que les jour­nal­istes ne sont pas indépen­dants. Elle l’annonce 100 % dig­i­tal, orig­i­nal et indépen­dant. Il veut pro­duire de l’information plutôt que de la reprendre.

Dominique Rizet, jour­nal­iste depuis plus de 40 ans, spé­cial­isé dans les enquêtes (inter­na­tion­al, fait divers…) met « son agence de presse » (Go Fast Press ?) au ser­vice de ce média pour son « envol ». Il se présente comme un par­rain de l’association. Con­sul­tant expert des affaires poli­cières et judi­ci­aires depuis 2012. En 2015 il avait défrayé la chronique en révélant en direct que les otages étaient cachés dans la cham­bre froide de l’hypercasher de la porte de Vin­cennes, met­tant en dan­ger ceux-ci. Une erreur pour laque­lle il a nour­ri des regrets.

Le risque de l’étiquetage à droite

Chris­tine Kel­ly est une proche d’Éric Zem­mour et tra­vaille sur la chaîne Cnews sou­vent con­sid­éré comme « de droite ». Dominique Rizet, lui, est colonel de réserve dans la gen­darmerie et entre­tient une cer­taine prox­im­ité avec le monde polici­er. Prox­im­ité pro­fes­sion­nelle indis­pens­able pour son activ­ité de con­sul­tant et plus anci­en­nement pour ses enquêtes mais aus­si prox­im­ité très poussée à con­sid­ér­er son tra­vail d’animation lors d’un con­grès du syn­di­cat de police Alliance. En prenant pour rédac­teur en chef un ancien du Figaro, le nou­veau média imprime égale­ment un pen­chant qui ne man­quera pas d’être soulevé par ses détracteurs.

Les deux fon­da­teurs de Factuel sont Sami Bia­soni et Stéphane Simon. Le pre­mier est auteur et con­tribu­teur chez Front Pop­u­laire, le sec­ond est con­nu du monde médi­a­tique. Fon­da­teur avec Michel Onfray, de Front Pop­u­laire et édi­teur des web tv de per­son­nal­ité comme André Bercoff, de Gilles-William Gold­nadel et dans un autre style Aymer­ic Caron.

Les deux com­pères étaient déjà à la manœu­vre pour créer Néo avec un cer­tain succès.

Toujours plus de médias

C’est un phénomène éton­nant qui se déroule depuis une dizaine d’années. L’accroissement du nom­bre de média à mesure que ceux-ci sont l’objet de vives cri­tiques par le pub­lic. Que se soit des web-télés (TV Lib­ertés, Le Media), des revues (Front Pop­u­laire, L’Incorrect) ou des média unique­ment vidéo comme Brut (2016), Loop­sider (2018), Neo (2020) ou plus récem­ment Réel (2023), l’offre est de plus en plus vaste. Une mul­ti­pli­ca­tion des sup­ports avec des méth­odes, des idées et des finance­ments très var­iés mais qui assure le plu­ral­isme grâce à la technique.

Reste à voir qui tien­dra sur la durée et dans quelle mesure leur développe­ment per­me­t­tra ou non à tous de trou­ver une place dans le paysage médiatique.