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Agnès Chauveau nommée à la tête de l’INA : la malédiction continue

16 août 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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Agnès Chauveau nommée à la tête de l’INA : la malédiction continue

Temps de lecture : 5 minutes

Agnès Chauveau nommée à la tête de l’INA : la malédiction continue

En résumé :

  • Une nom­i­na­tion éton­nante : après la sus­pen­sion de Lau­rent Val­let pour achat de cocaïne, Agnès Chau­veau est nom­mée prési­dente par intérim de l’INA. Pour rap­pel, elle avait été licen­ciée de Sci­ences Po en 2015 pour plagiat.
  • La malé­dic­tion de l’INA : Math­ieu Gal­let (frais somp­tu­aires), Agnès Saal (notes de taxi extrav­a­gantes), Lau­rent Val­let (cocaïne) : chaque prési­dent finit éclaboussé.
  • Un sys­tème de recasages : Agnès Saal, Mar­tin Ajdari… les respon­s­ables déchus sont régulière­ment recasés à d’autres postes pres­tigieux, mal­gré leurs casseroles, symp­tôme d’un dys­fonc­tion­nement de la haute admin­is­tra­tion culturelle.
  • Une admin­is­tra­tion fer­mée : les fautes n’interrompent pas les car­rières, elles ouvrent d’autres portes dans un jeu de chais­es musi­cales sans fin.

Après Mathieu Gallet (la dépense faste comme signature), après Agnès Saal (démise en 2015 pour frais de taxi extravagants), après Laurent Vallet (suspendu pour s’être acheté un mauvais billet de cocaïne), voici Agnès Chauveau, sous ombre de plagiat.

L’Institut nation­al de l’audiovisuel (INA) sem­ble abon­né aux feuil­letons à rebondisse­ments. Après la sus­pen­sion de Lau­rent Val­let il y a quelques jours pour achat de cocaïne, sa rem­plaçante est désor­mais con­nue : Agnès Chau­veau. Une nom­i­na­tion qui prête à sourire – ou à soupir­er – tant la nou­velle prési­dente traîne elle-même un joli pas­sif. En 2015, elle avait été con­trainte de quit­ter Sci­ences Po pour pla­giat. La fameuse malé­dic­tion de l’INA se poursuit.

Agnès Chauveau : de Sciences Po au plagiat

En jan­vi­er 2015, Agnès Chau­veau, alors direc­trice exéc­u­tive de l’École de jour­nal­isme de Sci­ences Po, était licen­ciée pour pla­giat. L’affaire, révélée par Arrêt sur Images quelques semaines plus tôt, était embar­ras­sante : plusieurs de ses chroniques pub­liées sur France Cul­ture et Slate repre­naient sans guillemets ni sources les arti­cles de con­frères. Sci­ences Po, qui cul­tive d’ordinaire l’art feu­tré des règle­ments internes, avait tranché net en la remer­ciant offi­cielle­ment.

L’affaire con­sti­tu­ait un véri­ta­ble « fla­grant délit de pla­giat », illus­trant à mer­veille la « repro­duc­tion du con­formisme » et le manque d’exigence d’une école cen­sée for­mer les élites médiatiques.

Voir aus­si : Sci­ences-Po Jour­nal­isme : l’élite du conformisme

Dix ans plus tard, revoici donc Agnès Chau­veau, bom­bardée à la tête de l’INA. L’ironie est savoureuse : l’institution publique, déjà frag­ilisée par la sus­pen­sion de Val­let, accueille à sa prési­dence une per­son­nal­ité éclaboussée par un scan­dale académique. À croire qu’à l’INA, on recrute les directeurs comme on dis­tribue les rôles dans une tragédie burlesque.

Une malédiction persistante à l’INA

Il faut dire que l’INA n’en est pas à son pre­mier prési­dent encom­brant. En 2015, c’est Agnès Saal qui quit­tait son fau­teuil, rat­trapée par ses fameuses notes de taxi faramineuses. Ironie du sort : elle avait été prompte­ment recasée au min­istère de la Cul­ture, où elle super­vi­sait la poli­tique de diver­sité, prou­vant une fois de plus que dans les hautes sphères, la dis­grâce est rarement définitive.

Dix ans plus tard, le scé­nario se répète. Un prési­dent tombe, une autre Agnès monte. L’INA ressem­ble de plus en plus à une mai­son han­tée par ses pro­pres dirigeants, où chaque suc­cesseur hérite d’un pas­sif plus lourd que le précédent.

Le cas Gallet : dépensier malgré lui…

La tra­di­tion des prési­dents chahutés con­tin­ue avec Math­ieu Gal­let, ex-patron de l’INA de 2010 à 2014 puis de Radio France. Sous sa direc­tion à l’INA, il aurait dépen­sé plus d’un mil­lion d’euros en frais de con­seil et 125 000 € pour rénover deux bureaux — sans appels d’offres (à sa décharge, l’I­NA dégage un chiffre d’af­faires assez faramineux sous son impul­sion). Une orgie de dépens­es qui lui vaut d’être con­damné en 2018 pour favoritisme, avant que la peine soit allégée en appel en 2021.

Voir aus­si : Math­ieu Gal­let, portrait

Le système des recasages : un jeu de chaises musicales sans fin

La nom­i­na­tion d’Ag­nès Chau­veau invite à pos­er une ques­tion sim­ple : com­ment se fait-il que des per­son­nal­ités dis­créditées trou­vent si facile­ment des postes pres­tigieux dans l’administration cul­turelle française ?

L’exemple d’Agnès Saal est éclairant. Après le scan­dale des taxis, elle n’a jamais vrai­ment quit­té la haute fonc­tion publique. Et elle n’est pas la seule : la machine à recas­er tourne à plein régime. Le plus récent exem­ple est celui de Mar­tin Ajdari, nom­mé en févri­er 2025 à la prési­dence de l’ARCOM. Libéra­tion rap­pelait alors son « CV clair-obscur », où s’accumulent zones d’ombre et soupçons d’irrégularités, sans que cela empêche son ascension.

Dans ce petit monde, le recy­clage est la règle. Les affaires, fussent-elles gênantes, n’entravent jamais une car­rière très longtemps : elles ouvrent au con­traire de nou­veaux couloirs, d’autres fau­teuils, de nou­veaux bureaux.

De Gal­let à Val­let, de Chau­veau à Ajdari, la haute admin­is­tra­tion cul­turelle illus­tre ce sys­tème fer­mé où l’échec n’interrompt jamais une car­rière, mais la redirige. Les fautes s’effacent vite, les man­dats se renou­vel­lent, les dis­grâces se con­ver­tis­sent en pro­mo­tions. Le spec­ta­teur, lui, observe ce manège avec un mélange de las­si­tude et d’incrédulité.

Le sen­ti­ment général qui se dégage de tout cela ? À l’INA, la « malé­dic­tion » sem­ble presque dev­enue un mode de gou­ver­nance. À ce rythme, la ques­tion n’est plus de savoir si Agnès Chau­veau sera éclaboussée par un nou­veau scan­dale, mais quand, et avec quelle créativité.

Yves Leje­une

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