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Une étude de la SCAM sur la condition des journalistes, plus de précarité, moins de liberté

7 mai 2019

Temps de lecture : 4 minutes
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Une étude de la SCAM sur la condition des journalistes, plus de précarité, moins de liberté

Temps de lecture : 4 minutes

La SCAM (Société civile des auteurs multimédias) réalise tous les cinq ans une grande enquête sur la condition des journalistes, la dernière décrit la situation de 2018 en la comparant à celle de 2013. Plus de 3700 journalistes ont répondu à l’enquête menée par Béatrice de Mondenard.

La précarité gagne du terrain

Ils ne sont plus que 56% (con­tre 62% cinq ans aupar­a­vant) à béné­fici­er d’un statut per­ma­nent. Au même moment le statut de pigiste fait un bon de 28 à 42%.

Le statut d’auteur (rémunéré en droits d’auteur), l’auto-entrepreneuriat, l’intermittence et le tra­vail indépen­dant, cumulés atteignent 27% des sondés.

Le total est supérieur à 100% car un grand nom­bre cumule plusieurs statuts. Comme le dit une jour­nal­iste de presse écrite « Le statut d’autoentrepreneur pousse les sociétés à vir­er les vieux encar­tés pour faire trimer les jeunes payés sur fac­ture et éviter ain­si de pay­er l’Ursaff ». Comme 2000 à 2500 nou­veaux diplômés entrent dans la pro­fes­sion chaque année con­tre 500 départs à la retraite, la pré­car­ité croît avec la con­cur­rence. Une telle sit­u­a­tion n’encourage pas à l’indépendance d’esprit. Un jeune jour­nal­iste non con­formiste hésit­era à exercer son méti­er dans le sens du plu­ral­isme, sous peine de se voir indiqué gen­ti­ment la porte de sortie.

Deux pigistes dev­enues prestataires pour Reworld Media (qui a racheté les péri­odiques de Mon­dadori en France) témoignent de leurs dif­fi­cultés. La pre­mière après 22 ans de piges n’est plus en rela­tion avec un rédac­teur en chef mais avec un coor­di­na­teur média qu’elle n’a jamais ren­con­tré et qu’elle ne con­naît que par cour­riel. La sec­onde perçoit 15€ nets par feuil­let et pré­cise « on ne me demande ni de réfléchir, ni d’avoir des idées. Les sujets sont très dirigés avec des mots à met­tre dans le cha­peau, un déroulé à suiv­re, par­fois ce sont des phras­es entières qui sont imposées… J’ai l’impression de fournir du con­tenu, de rem­plir ». Le cor­re­spon­dant de presse local est encore plus mal loti : 1€50 la brève, 27€ pour un arti­cle d’une page avec pho­to. France 24 ne salarie plus aucun de ses cor­re­spon­dants à l’étranger, mais les rémunère sur fac­ture via des sociétés tierces qui récupèrent une par­tie sig­ni­fica­tive de la marge.

Soulignons que pour les nou­veaux entrants (pre­mières deman­des de carte de presse), les statuts pré­caires ont explosé. Ils sont passés de 30% en 2001 à 50% en 2009 et 70% en 2018.

Rémunérations : le grand écart

Les revenus annuels déclarés n’augmentent pas en cinq ans, les deux-tiers se situent entre 20K€ et 60K€ mais avec de grandes disparités.

Pour les moins de 35 ans la moitié gagne moins de 20K€ par an et un cinquième sont en dessous du SMIC. Chez les plus de 50 ans, embauchés à une meilleure péri­ode, le revenu moyen est env­i­ron de 40K€ (les sta­tis­tiques sont présen­tées par tranch­es). Pour les non per­ma­nents toutes class­es d’âges con­fon­dues, la moitié gag­nent moins de 20K€ et un quart sont au SMIC. Rap­pelons qu’un jeune jour­nal­iste débute générale­ment à bac +5.

Les activ­ités extra- jour­nal­is­tiques se dévelop­pent en par­al­lèle, plus de la moitié des indépen­dants y ont recours : com­mu­ni­ca­tion, for­ma­tion, enseigne­ment, tra­duc­tion, édi­tion et même immo­bili­er via Rbnb. Un cri­tique de ciné­ma explique que cer­tains médias spé­cial­isés ne paient pas du tout:  y écrire per­met d’accéder aux pro­jec­tions. Il se recon­ver­tit dans l’organisation de festivals.

Au total à la ques­tion « Au cours des cinq dernières années, con­sid­érez-vous que l’exercice de votre méti­er s’est amélioré, main­tenu ou dégradé ? »

74% répon­dent « dégradé ». Peu éton­nant quand on sait que les tâch­es annex­es imposées au rédac­teur se sont mul­ti­pliées : pho­tographe, vidéaste, mon­teur, secré­taire de rédac­tion etc. De quoi min­er une infor­ma­tion de qual­ité comme le note un jour­nal­iste en chaine info: « on n’a pas le temps de véri­fi­er, de réfléchir ». En guise de con­clu­sion, le témoignage d’un jour­nal­iste de presse écrite de 44 ans :

« Je fais ce méti­er avec pas­sion, depuis plus de vingt ans. Lorsque j’ai débuté, on me demandait d’écrire pour des lecteurs, aujourd’hui pour des clients ».

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