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Règlements de comptes au quotidien italien La Repubblica

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22 octobre 2019

Temps de lecture : 4 minutes
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Règlements de comptes au quotidien italien La Repubblica

Temps de lecture : 4 minutes

Carlo de Benedetti est un entrepreneur de premier plan en Italie, et un entrepreneur aventureux. Fondateur d’Olivetti, condamné à 6 ans de prison pour faillite frauduleuse puis relaxé en cassation, président de la holding Cerus dont Alain Minc fut le directeur général, il est un des financiers les plus influents du centre gauche libéral en Italie. Il a entre autres financé le développement du quotidien La Repubblica, une sorte de Monde du matin, encore plus favorable au capitalisme libéral-libertaire. Mais les positions du quotidien ne lui plaisent plus, et à 84 ans il veut racheter le groupe éditeur.

Querelle au centre gauche libéral

Début 2018 Car­lo de Benedet­ti attaquait dure­ment Euge­nio Scal­fari, directeur his­torique du jour­nal de 1976 à 1996 et son actuel inspi­ra­teur, dans l’émission télévisée Otto et mez­zo. Il esti­mait que le jour­nal « n’avait plus de ligne poli­tique », que le « van­i­teux » Scal­fari, devenu riche grâce à la générosité de l’industriel, un « ingrat » n’avait qu’à « se taire ». La rédac­tion avait réa­gi en appor­tant son sou­tien à Scalfari.

Et querelle de famille

Le groupe Grupo Edi­to­ri­ale dit GEDI a été cédé en 2012 (via la hold­ing CIR) par Car­lo à ses trois fils, Edoar­do, Mar­co et Rodol­fo. Un groupe qui com­prend le quo­ti­di­en de Turin La Stam­pa, l’hebdomadaire L’Espresso, des radios, Il Sec­o­lo XIX de Lig­urie, d’autres quo­ti­di­ens régionaux et … La Repub­bli­ca.

GEDI perd con­tin­uelle­ment de l’argent depuis trois ans. En bourse, le titre qui cotait plus de 1,20€ en 2014 était tombé à 25 cen­times d’euros fin sep­tem­bre 2019, en baisse rapi­de, val­orisant un groupe de près de 700M d’euros de chiffre d’affaires à un petit 130M.

Proposition de rachat

Car­lo estime que Mar­co et Rodol­fo sont des inca­pables, qui ne con­nais­sent pas les médias, sans pas­sion, sans savoir-faire, sans capac­ité de man­age­ment, on ne saurait être plus aimable (il ne dit rien de son troisième fils Edoar­do). Dans un entre­tien au Cor­riere del­la sera, il pro­pose à ses fils de racheter 30% de GEDI au cours de bourse du jour. Puis, une fois l’entreprise redressée, de la con­fi­er à une fon­da­tion. La réponse de Rodol­fo prési­dent de la hold­ing CIR n’est guère encour­ageante, “Je suis pro­fondé­ment attristé et décon­certé par l’ini­tia­tive non sol­lic­itée de mon père dont l’u­nique résul­tat est de créer une dis­trac­tion futile et inutile pour les per­son­nes tra­vail­lant chaque jour pour garan­tir la réus­site future de GEDI”, déclarait ce dernier. Après l’annonce de la propo­si­tion de rachat le titre était en hausse de 15%.

Le « patronat du centre » en embuscade

Par le passé, Xavier Niel puis Viven­di s’étaient intéressés au groupe édi­to­r­i­al sans don­ner suite. On repar­le main­tenant d’une vente par apparte­ments (sépar­er la Stam­pa et Repub­bli­ca) ou plus sûre­ment d’une reprise glob­ale par un autre homme d’affaires, Flavio Cat­ta­neo qui avait déclaré un intérêt pour la reprise de GEDI au print­emps 2019, à hau­teur de 190M€ pour l’ensemble du groupe. Cat­ta­neo, bref Prési­dent de Tele­com Italia pen­dant 18 mois, reçut en 2017 un bonus de 25M€ qui fit scan­dale pour une société endet­tée de plus de 25 mil­liards d’euros. Il est aus­si le fon­da­teur et directeur général d’Italo NTV, la très prof­itable société privée des TGV ital­iens. Directeur général et action­naire minori­taire qui a cédé la majorité (75%) de la société en 2018 au fonds améri­cain GIP spé­cial­isé dans le trans­port (aéro­ports de Gatwick et Edim­bourg, le port de Mel­bourne, une société fer­rovi­aire en Aus­tralie). La vente s’est faite pour 2 mil­liards d’euros, assur­ant une con­sid­érable plus-val­ue à Cat­ta­neo et d’autres action­naires privés ital­iens comme Diego Del­la Valle (patron de Tods) et Luca Cordero di Mon­teze­mo­lo (ancien prési­dent de Fer­rari et du Medef ital­ien, prési­dent d’Alitalia). Ils sont tous réputés par­ti­sans d’un gou­verne­ment « du cen­tre » et proches du think tank Italia Futu­ra, qui avait soutenu Mario Mon­ti en 2013. Un cen­tre ressem­blant à une alliance Berlusconi/Renzi, que ce dernier sem­ble vouloir reviv­i­fi­er en créant en octo­bre 2019 son pro­pre par­ti Italia Viva. Le sou­tien d’un groupe comme GEDI serait un appui con­sid­érable dans cette entre­prise pour le moment incer­taine, mais le rêve d’une bonne par­tie du grand patronat italien.