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Police de la pensée : de Médiapart à l’interdiction d’un colloque de l’Institut Iliade

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8 août 2023

Temps de lecture : 4 minutes
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Police de la pensée : de Médiapart à l’interdiction d’un colloque de l’Institut Iliade

Temps de lecture : 4 minutes

Pre­mière dif­fu­sion le 24 mai 2023

Jusqu’au 21 mai 2023, le nom de l’institut Iliade pour la longue mémoire européenne, créé en 2014 dans le droit fil des travaux et de la mémoire de l’historien Dominique Venner, était peu connu sinon des participants à son colloque annuel. Depuis l’interdiction d’un hommage privé (sur invitations) à Dominique Venner, l’Institut liade est devenu une des nouvelles victimes de la censure préventive. Récit d’un itinéraire, qui part des archives de la police, émerge dans un article de Médiapart, et aboutit comme en boucle à une interdiction de la préfecture de police de Paris.

Un article de Médiapart du 19 mai sert d’indicateur de police

Retenez les dates, l’hommage privé à Dominique Ven­ner devait avoir  lieu le dimanche 21 mai à 15 heures. Deux jours avant, le ven­dre­di 19 à 17 heures, Nico­las Lebourg pub­lie sur Médi­a­part un papi­er « Dix ans après la mort de Dominique Ven­ner, l’extrême droite européenne com­mé­more son samouraï ». Les bases de cet arti­cle sont d’après l’auteur :

« Les infor­ma­tions ayant nour­ri cette analyse provi­en­nent des fonds d’archives, les plus impor­tants util­isés étant ceux du dossier de pour­suite con­tre le réseau Jeune Nation par la cour de sûreté de l’État, et ceux des Ren­seigne­ments généraux sur les divers grou­pus­cules qu’a ani­més Dominique Ven­ner entre 1958 et 1968. »

Soit des sources mil­i­taires et poli­cières aux­quelles tout le monde n’a pas accès. Dont acte. Ce dossier est une suite d’extraits de rap­port de police et des RG réécrits à la hâte. Pour la curiosité, l’auteur cite longue­ment des rap­ports de psy­chi­a­tres inter­ro­geant Dominique Ven­ner lorsqu’il fut incar­céré. Ces rap­ports sont plutôt élo­gieux, mais la ten­ta­tive de définir l’adversaire comme une sorte de malade men­tal est évi­dente. La suite est un fourre-tout mal rédigé mais à charge. Là n’est pas le plus impor­tant, ce qui compte c’est la chronologie.

De Médiapart à l’interdiction

L’article paraît à 17 heures, le soir même le ven­dre­di 19 (voir infra), la pré­fec­ture de police inter­dit l’hommage privé organ­isé le dimanche 21 à 15h. Les motifs de l’interdiction repren­nent large­ment ou para­phrasent une bonne par­tie du dossier de Nico­las Lebourg.

  • Action : l’article.
  • Réac­tion : l’interdiction.

La pré­fec­ture de police pub­lie son arrêté d’interdiction le 19 au soir. Mais elle le noti­fie tar­di­ve­ment (par erreur ?) à François Bous­quet – ora­teur mais non organ­isa­teur de l’hommage – alors en déplace­ment en province, le same­di 20 à 15h30. L’Institut Ili­ade dépose le même jour deux référés lib­erté à 18 heures et 19 heures. Le tri­bunal admin­is­tratif répond le lun­di 22 au matin indi­quant que les juges des référés n’ont pas eu le temps matériel de stat­uer et reje­tant la plainte car dépassée, l’évènement inter­dit devant avoir eu lieu la veille.

Où certains médias servent de poisson pilote

Les liens de Médi­a­part avec cer­tains ser­vices de police et de la mag­i­s­tra­ture ne sont un secret pour per­son­ne. De bons esprits pour­ront s’interroger sur la chronolo­gie de l’affaire et en tir­er les con­clu­sions qu’ils jugent utiles.

Extrait des attendus de l’interdiction

L’arrêté signé Lau­rent Nuñez, préfet de Paris reprend une bonne par­tie de l’article (sous une autre forme) de Médi­a­part et stip­ule entre autres « Il existe des risques sérieux pour que à l’occasion de cet hom­mage, des pro­pos inci­tant à la haine et à la dis­crim­i­na­tion envers un groupe de per­son­nes à rai­son de leur orig­ine ou de leur appar­te­nance ou de leur non-appar­te­nance à une eth­nie, une nation ou une reli­gion soient tenus…de nature à met­tre en cause la cohé­sion nationale et les principes con­sacrés par la Déc­la­ra­tion des droits de l’homme et du citoyen ». ». De fac­to, la pré­fec­ture préjuge de ce qui pour­rait être dit, véri­ta­ble inven­tion de la cen­sure préven­tive. Un retour à 1984 de George Orwell et son arrêt du crime.

Voir aus­si : La méth­ode Médi­a­part, vue par Pierre Péan dans Le Monde diplomatique

Nota Bene, Claude Chol­let, prési­dent de l’Observatoire du jour­nal­isme (Ojim) est égale­ment secré­taire de l’Institut Iliade