Ojim.fr
Veille médias
Dossiers
Portraits
Infographies
Vidéos
Faire un don
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
Accueil | Veille médias | Macron et la France dans la presse internationale

L’article que vous allez lire est gratuit. Le mois de décembre est le plus important pour nous, celui où nos lecteurs peuvent nous aider par un don avec un reçu fiscal pour 2023 de 66% de leur don. Merci de votre soutien, sans lui nous disparaîtrions.

13 avril 2023

Temps de lecture : 6 minutes
Accueil | Veille médias | Macron et la France dans la presse internationale

Macron et la France dans la presse internationale

Temps de lecture : 6 minutes

La caste mondialiste et libérale libertaire au pouvoir reproche souvent à l’affreux peuple français de ne pas regarder ce qui se passe à l’étranger. Les Français seraient trop fermés, pas assez sensibles aux expériences étrangères. Il leur faudrait remettre leurs certitudes en question, prendre exemple sur d’autres et s’adapter à la marche du monde. Chiche !

« Macron se soumet à la populace »

Ne ratant jamais une occa­sion de se moquer de son voisin français, le Dai­ly Mail voit dans l’annulation de la vis­ite de Charles III à Ver­sailles un Macron qui « se soumet à la pop­u­lace ». Enfonçant le clou, le jour­nal bri­tan­nique cite une source dépeignant un prési­dent français devenu ris­i­ble depuis son pas­sage en force sur la réforme des retraites, une déci­sion ayant déclenché des « vio­lences, des actes crim­inels et des man­i­fes­ta­tions aux qua­tre coins de la République ».

Une sit­u­a­tion des plus embar­ras­santes pour le chef de l’État français, inca­pable de créer les con­di­tions néces­saires à la récep­tion d’un homo­logue étranger, selon la respon­s­able des affaires royales au Dai­ly Mail, Rebec­ca Eng­lish. Cette dernière rap­pelle qu’il s’agit de la pre­mière vis­ite à l’étranger du sou­verain bri­tan­nique, qui, con­traint d’annuler sa venue en France, s’est finale­ment ren­du en Alle­magne, le 29 mars.

« Charles III, connaissez-vous la guillotine ? »

Tout aus­si intran­sigeant, le Tele­graph s’est lui aus­si saisi de l’affaire pour rap­pel­er sa ligne pro-Brex­it et à quel point, selon lui, la « réini­tial­i­sa­tion [des rap­ports] entre l’Union européenne et le Roy­aume-Uni [est] en plein désarroi ».

Le quo­ti­di­en con­ser­va­teur se plait à laiss­er tran­spir­er l’idée d’une France faite de chaos et de désor­dre, d’un pays peu­plé de gueux au tem­péra­ment régi­cide. Un lupa­nar man­i­feste­ment bien indigne pour que la Couronne bri­tan­nique ne s’y rende. D’ailleurs, le Tele­graph tient à met­tre en garde con­tre cette terre d’affreux réfrac­taires, et fait d’un graf­fi­ti repéré dans les rues de Paris son titre.

Cachez cette matraque que je ne saurais voir !

Les médias étrangers n’ont évidem­ment pas eu les mêmes pudeurs que les médias français de grand chemin quand il s’est agi de mon­tr­er les scènes de vio­lence s’étant déroulées dans les grandes villes français­es à la fin du mois de mars.

NBC News, Bloomberg Tele­vi­sion, 9 News Aus­tralia, BBC News, The Sun, etc. Ces médias que l’on ne peut pour­tant soupçon­ner d’être du mau­vais côté du manche ont fait leur tra­vail et relay­er les images mon­trant la France de Macron : poubelles en feu, man­i­fes­ta­tions sauvages et répres­sion poli­cière. Pour se faire une idée claire de la sit­u­a­tion en France, il fal­lait donc con­sul­ter des canaux Telegram, boud­er la presse sub­ven­tion­née française et se tourn­er vers des médias étrangers. Triste séquence pour l’état de la presse en France, qui une  fois de plus s’est révélée bien timide dans ce qui devrait être sa mis­sion la plus impor­tante : mon­tr­er le réel.

Voir aus­si : Amnesty Inter­na­tion­al con­damne la répres­sion des man­i­fes­ta­tions en France

« C’est une guerre »

Pour­tant peu habitué à nag­er à con­tre-flots, le Cour­ri­er inter­na­tion­al a com­mis un mon­tage vidéo inti­t­ulé « C’est une guerre » et rassem­blant les points de vue de médias étrangers sur la sit­u­a­tion en France. Du Kenya à l’Allemagne, en pas­sant par l’Inde et la Bel­gique, le son de cloche est le même : la France est jonchée de poubelles, l’ambiance est à la lim­ite de la guerre civile, la police tape fort et le prési­dent Macron est absent.

On y apprend notam­ment que les LBD (« lanceurs de balles de défense ») sont inter­dits en con­texte de man­i­fes­ta­tion dans de nom­breux pays européens, y com­pris au Koso­vo. Le jour­nal­iste suisse Richard Wer­ly est caté­gorique : les charges de CRS et les vio­lences poli­cières en man­i­fes­ta­tions sont une spé­cial­ité française.

La BBC s’est de son côté intéressée à la désor­mais célèbre BRAV‑M (brigade de répres­sion de l’action vio­lente motorisée) et a relayé des images et des enreg­istrements faisant état d’une unité aux procédés bru­taux. La RTS et le Guardian ont quant à eux titré sur l’usage exces­sif de la force et les arresta­tions arbi­traires. Depuis l’étranger, le tableau est clair : la France est le lieu d’une tiers-mondi­s­a­tion et d’une police hors de contrôle.

À l’étranger, le 49.3 ne passe pas

En France, les médias de grand chemin ont fait œuvre de « péd­a­gogie ». Il leur fal­lait expli­quer aux gaulois réfrac­taires les sub­til­ités de notre droit con­sti­tu­tion­nel, con­vo­quer les fameux experts en la matière (et même faire revenir Jean-Louis Debré !), rel­a­tivis­er l’emploi de l’article 49.3, refaire son his­toire et dire qu’il n’y avait là rien de très grave.

Pour des raisons évi­dentes, les médias étrangers ne sont quant à eux pas encom­brés de longs cours de droit con­sti­tu­tion­nel. Ils se devaient de trou­ver une for­mule résumant l’emploi du 49.3 et expli­quer une logique qui sem­ble n’être com­prise que par les chiens de garde de la Macronie.

Ils sont dans l’ensemble tombés sur une for­mule peu reluisante pour l’image du prési­dent français : « sans vote ». C’est ce que retien­dront finale­ment de cette affaire les Bri­tan­niques, les Améri­cains (« with­out vote »), les Alle­mands (« ohne Abstim­mung »), les Ital­iens (« sen­za voto »), les Espag­nols (« sin votación »), les Hon­grois (« szavazás nélkül »), les Polon­ais (« bez głosowa­nia »), et bien d’autres : la réforme des retraites est passée sans vote sur le texte. Voilà le prin­ci­pal mes­sage relayé par la presse étrangère, qui plante ain­si un décor fait de méth­odes gou­verne­men­tales tout sauf démocratiques.

Par ailleurs, ces mêmes médias ont présen­té le résul­tat du vote sur la motion de cen­sure comme un évène­ment cru­cial pour Emmanuel Macron, comme si le locataire de l’Élysée était en perdi­tion et à la tête d’un pays qu’il ne maîtrise plus.

Macron pourra-t-il encore faire la leçon aux Hongrois et aux Polonais ?

En défini­tive, l’image don­née de la France à l’étranger est on ne peut plus claire : le pays des droits de l’homme jamais avare de leçons de morale sur le respect des lib­ertés et de l’État droit s’est trans­for­mé en cham­pi­on européen de la répres­sion poli­cière et du fait du prince. Cette sit­u­a­tion a d’ailleurs con­duit le min­istre des Affaires étrangères hon­grois à expli­quer qu’il serait à l’avenir dif­fi­cile pour les Européens de l’Ouest de cri­ti­quer la Hon­grie sur la ques­tion de l’État de droit au vu des méth­odes employées en France.

Même ambiance en Pologne, pays qui fait égale­ment l’objet d’une croisade poli­tique sous cou­vert de pré­textes pseu­do-juridiques liés à l’État de droit, et où l’image du chef de l’État français n’en finit plus de se dégrader.

Les scènes de vio­lence vécues en France ces dernières semaines et les méth­odes de gou­verne­ment du prési­dent Macron sont en effet impens­ables à l’heure actuelle en Hon­grie et en Pologne, où la presse est d’ailleurs bien moins uni­voque qu’en France. Pour bien moins cela, Varso­vie et Budapest sont pour­tant les mou­tons noirs de l’Union européenne, alors que le héraut de l’État de droit Macron a les mains libres pour gou­vern­er par­fois à coups de matraques ou de 49.3.

Vidéos à la une

Derniers portraits ajoutés