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Acte européen sur les médias, le piège

14 juillet 2023

Temps de lecture : 3 minutes
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Acte européen sur les médias, le piège

Temps de lecture : 3 minutes

Dans son « Acte européen sur la liberté des médias », l’Union européenne a pour projet de mieux protéger les journalistes. Cette protection pourrait cependant se transformer en une surveillance renforcée des journalistes, soumise à l’arbitraire d’un pouvoir qui se veut gardien de la « sécurité nationale ».

Un projet aguicheur sur le papier

Présen­té le 16 sep­tem­bre 2022 par la Com­mis­sion européenne, l’Acte européen sur la lib­erté des médias (en anglais « Euro­pean Media Free­dom Act ») se tar­gue de pro­mou­voir une plus grande lib­erté et plu­ral­ité des médias.  Ce pro­jet de loi vise notam­ment à ren­forcer l’indépendance des jour­nal­istes en les pro­tégeant de toute ingérence poli­tique liée au finance­ment des médias.

Voir aus­si : Lib­erté et plu­ral­isme des médias : la Com­mis­sion veut encore notre bien

Plus de liberté pour mieux la restreindre

Selon « l’Alliance de la presse », cette loi pour­rait cepen­dant aboutir à l’inverse du résul­tat espéré en encour­ageant la cen­sure de la presse et ain­si met­tre en péril l’indépendance des jour­nal­istes. Dans une tri­bune, plus de 550 titres de presse se sont asso­ciés con­tre ce pro­jet de loi en esti­mant qu’il est con­traire à la loi française de 1881 sur la lib­erté de la presse.

L’article 4 en cause

Cette tri­bune vise notam­ment un arti­cle qui sus­cite de nom­breux débats. L’article 4 prévu par la loi, inter­dit explicite­ment la sur­veil­lance des moyens de com­mu­ni­ca­tion des jour­nal­istes et l’utilisation de logi­ciels espi­ons sur leurs appareils. Lors du Con­seil de l’UE, le gou­verne­ment français (au côté duquel se sont rangés l’Allemagne et les Pays-Bas), s’est mon­tré hos­tile à cette mesure en faisant val­oir son droit d’amendement. L’ensemble de ces pays européens exi­gent l’autorisation d’espionnage par logi­ciels pour per­me­t­tre une meilleure « sécu­rité nationale ». D’aucuns analy­sent ce motif comme un pré­texte pour plac­er des jour­nal­istes sous des sys­tèmes de sur­veil­lance et comme un moyen de con­trôle des sources de ces mêmes journalistes.

Le vote de cet amende­ment per­me­t­trait aux États d’espionner les appareils élec­tron­iques des jour­nal­istes quand ils le jugent néces­saire. Au nom des enjeux de « sécu­rité nationale », les États de l’Union Européenne pour­ront, comme bon leur sem­ble, plac­er les jour­nal­istes sous sur­veil­lance renforcée.

Vers une société de surveillance généralisée ?

Si la lib­erté des médias est un pili­er essen­tiel des Etats prô­nant les valeurs de la démoc­ra­tie, ce pro­jet de loi ne pour­ra que ren­forcer la con­san­guinité his­torique entre États et médias. En s’arrogeant un droit de con­trôle arbi­traire des jour­nal­istes, l’État pour­ra exercer une pres­sion con­stante sur la presse et ain­si nuire aux droits fon­da­men­taux de la lib­erté d’information.

Ces logi­ciels d’espionnage, invis­i­bles à l’œil nu dans l’ère du numérique, sont car­ac­téris­tiques de l’âge d’or du cap­i­tal­isme de sur­veil­lance à la « Georges Orwell ». Lors d’un débat  sur « Ligne Droite », mati­nale de Radio Cour­toisie, François Bous­quet revient sur la nature de cette surveillance :

« Nous sommes passés d’une société tra­di­tion­nelle, où la sur­veil­lance a tou­jours existé, mais pas à cette échelle-là ». « Aujourd’hui avec la mul­ti­pli­ca­tion des moyens de sur­veil­lance, nous obser­vons un change­ment quan­ti­tatif, avec comme ordre de grandeur le monde, ce qui induit en réal­ité un change­ment qual­i­tatif, avec la général­i­sa­tion de la surveillance ».

Voir aus­si : Media Free­dom Act : les inquié­tudes de l’Ojim étaient justifiées

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