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Julian Assange : les États-Unis veulent sa mort

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7 décembre 2018

Temps de lecture : 4 minutes
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Julian Assange : les États-Unis veulent sa mort

Temps de lecture : 4 minutes

Il y a quelques jours, nous répercutions l’appel au secours de la mère de Julian Assange, réfugié depuis 2012 à l’ambassade d’Équateur à Londres. Des nouvelles très récentes permettent de constater une aggravation de sa situation qui pourrait conduire au pire.

Révélation d’une inculpation américaine

Nul ne savait avant le 16 novem­bre 2018 si Assange était véri­ta­ble­ment inculpé aux États-Unis. Un pro­cureur de l’État de Vir­ginie, suite à une erreur admin­is­tra­tive, a levé le voile. Le pro­cureur explique que l’inculpation doit rester secrète, même si cela porte atteinte aux droits de la défense « L’acte d’accusation, les déc­la­ra­tions sous ser­ment venant l’appuyer, le man­dat d’arrêt, ain­si que la présente motion et le pro­jet d’injonction doivent rester secrets jusqu’à ce qu’Assange soit appréhendé (…), et qu’il ne puisse donc plus se sous­traire à l’arrestation et à l’extradition. »

Le secret n’est qu’à moitié levé. Si l’inculpation existe, on n’en con­naît pas les motifs, la date, les cir­con­stances. Après la défaite d’Hi­lary Clin­ton en 2016, les démoc­rates attribuent une par­tie de leur décon­fi­ture aux révéla­tions de Wik­ileaks sur la can­di­date et veu­lent le scalp du fon­da­teur de Wikileaks.

Mais ce n’est pas mieux du côté répub­li­cain. Le directeur de la CIA, Mike Pom­peo (devenu chef de la diplo­matie de Trump), par­le de Wik­iLeaks comme d’un « ser­vice de ren­seigne­ment non éta­tique fréquem­ment assisté par des acteurs éta­tiques comme la Russie » et le min­istre de la jus­tice, affirme que la cap­ture de M. Assange reste une pri­or­ité. Mieux, le pro­cureur spé­cial Robert Mueller, chargé d’enquêter sur l’ingérence de la Russie dans les élec­tions de 2016 inculpe des citoyens russ­es pour avoir util­isé des doc­u­ments Wik­ileaks. Il y a un con­sen­sus améri­cain pour avoir la peau d’Assange.

Prise de distance de l’Équateur

Le prési­dent équa­to­rien Cor­rea, qui avait pro­tégé Assange, est bat­tu en mai 2017 par Lenin Moreno qui prend ses dis­tances avec celui que l’on doit qual­i­fi­er de détenu. Il essaie de faire exfil­tr­er Assange en le nom­mant diplo­mate mais la jus­tice bri­tan­nique, aux ordres du grand frère améri­cain, refuse son statut diplo­ma­tique et con­firme son arresta­tion s’il pose le pied dehors. Assange, attaquant plusieurs États étrangers (l’Espagne en sou­tenant les indépen­dan­tistes cata­lans, l’Allemagne en com­para­nt Merkel et Hitler), met la diplo­matie équa­to­ri­enne à rude épreuve. Les Équa­to­riens, mal à l’aise avec ses pris­es de posi­tion, lui coupent alors toute liai­son avec l’extérieur et inter­dis­ent toute vis­ite sauf celles de ses avocats.

Vers une disparition physique ou l’extradition

Avec quelques péripéties, un accord frag­ile est ensuite trou­vé : Assange retrou­ve une com­mu­ni­ca­tion inter­net mais devra s’interdire d’attaquer un État étranger. Il pour­ra recevoir des vis­ites fil­trées et encadrées. Cet accord ne sera pas signé par Assange mais sera plus ou moins respec­té. Par ailleurs l’ambassade ne pren­dra plus ses frais à sa charge.

Pire, l’Équateur se réserve le droit de le faire hos­pi­talis­er à Lon­dres si son état le demande. Hos­pi­tal­i­sa­tion = arresta­tion par la police bri­tan­nique = extra­di­tion aux États-Unis = min­i­ma prison à vie ou peine de mort. Imag­inez que vous êtes enfer­mé dans une pièce exigüe de quelques mètres car­rés pen­dant plus de 2.200 jours, sans jamais sor­tir, sans pren­dre l’air, sans famille ni amis, dans quel état seriez-vous ? Assange est malade physique­ment et psy­chologique­ment. Il reste à l’ambassade ? Il s’affaiblit petit à petit. Il est hos­pi­tal­isé ? Bon­jour les pro­cureurs américains.

Comme le note son suc­cesseur à la tête de Wik­ileaks, l’islandais Kristinn Hrafns­son, après une vis­ite à l’ambassade : ses con­di­tions se sont dur­cies de manière telle qu’Assange est véri­ta­ble­ment dans une prison avec des gar­di­ens équa­to­riens devenus hos­tiles. Il ajoute « Ils veu­lent bris­er Assange, le détru­ire ». Qui est ce Ils ? L’État pro­fond améri­cain, sec­ondé par les ser­vices bri­tan­niques aux ordres et nolens volens l’Équateur, un très petit État qui peut subir de mul­ti­ples pres­sions. La France s’honorerait à accorder l’asile poli­tique à Julian Assange.
Crédit pho­to : Can­cillería del Ecuador via Flickr (cc)