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Dégradation des conditions de travail du journalisme, une étude de la SCAM

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20 mars 2019

Temps de lecture : 5 minutes
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Dégradation des conditions de travail du journalisme, une étude de la SCAM

Temps de lecture : 5 minutes

La Scam a été créée en septembre 1981 avec pour objectif de faire reconnaître le statut des réalisateurs de documentaires (au sens très large du terme) et d’obtenir la protection et la répartition de leurs droits à chaque diffusion de leurs œuvres. Elle revendique en 2019 plus de 40 000 membres. Elle est présente dans le monde de la propriété intellectuelle, au même titre que la Sacd pour les œuvres dramatiques, la Sacem pour la musique ou l’Adagp pour les arts graphiques et plastiques. Elle vient de publier une intéressante étude sur les conditions de travail des journalistes qui permet une comparaison avec une précédente enquête de 2013. Un résumé ci-après :

Une détérioration générale

Les médias et la presse en par­ti­c­uli­er vont mal. Et au bout de la chaîne, la sit­u­a­tion des jour­nal­istes est dev­enue aujourd’hui inquié­tante. À tra­vers la dégra­da­tion du statut des jour­nal­istes, c’est le sort réservé à la lib­erté de la presse qui est en ques­tion. Garantes et garants de la lib­erté de s’informer, les jour­nal­istes sont à ce titre l’un des rouages du débat démoc­ra­tique et répub­li­cain. Au-delà de l’état des lieux d’une cor­po­ra­tion, cette enquête révèle une sit­u­a­tion extrême­ment préoccupante.

En 2013, l’enquête de la Scam « De quoi vivent les jour­nal­istes ? » s’était déjà inquiétée de la pré­cari­sa­tion des jour­nal­istes. Cinq ans plus tard, une nou­velle enquête pointe du doigt l’extrême détéri­o­ra­tion des con­di­tions d’exercice du méti­er. Plus de 3700 jour­nal­istes ont répon­du au ques­tion­naire de la Scam com­plété de 1290 com­men­taires et de plusieurs entre­tiens. L’inquiétude liée à la pré­cari­sa­tion du méti­er va de pair avec un sen­ti­ment de perte de sens général­isé. Enquête menée par Béa­trice de Mon­denard, disponible sur scam.fr.

Multiplicité et précarisation des statuts

La part des jour­nal­istes en salari­at per­ma­nent chute de 6 points par rap­port à 2013 pour s’établir à 52%, au prof­it des pigistes dont la part bon­dit de 28 à 42 %. Par ailleurs, le recours à l’intermittence, à l’auto-entrepreneuriat et au paiement en droits d’auteur se développe. 17% des jour­nal­istes déclar­ent ain­si cumuler plusieurs sit­u­a­tions con­tre 12% en 2013.

Rémunérations

Les rémunéra­tions arrivent en tête des points qui posent prob­lème. L’item est coché par 56% des per­son­nes ayant répon­du à l’enquête. Les jour­nal­istes en sit­u­a­tion d’emploi per­ma­nent évo­quent des salaires glob­ale­ment bas, des reval­ori­sa­tions faibles ou inex­is­tantes. Celles et ceux qui ne sont pas en sit­u­a­tion d’emploi per­ma­nent dénon­cent en pre­mier lieu la dif­fi­culté à se faire pay­er en salaires. Si 74% des jour­nal­istes se voient en effet rémunér­er exclu­sive­ment en salaires, 26% perçoivent d’autres modes de rémunéra­tion (cachets, droits d’auteur, fac­tures). Par­mi les salariés, seuls 56% sont en CDI.

Le salaire net men­su­el moyen d’un ou d’une jour­nal­iste en CDI varie sen­si­ble­ment selon le media : il est d’environ 3 600 €/mois nets à la télévi­sion con­tre 3 000 € en presse écrite ou en radio et 2 500 € sur le web. En presse écrite, la pige est rémunérée 68 € le feuil­let en moyenne.

Revenus annuels

Les revenus annuels des jour­nal­istes sont très proches de l’enquête 2013. 11% touchent moins que le Smic annuel et 28% moins de 20 000 € par an. Les jour­nal­istes qui ne sont pas en sit­u­a­tion d’emploi per­ma­nent ont des revenus bien inférieurs : 23% sont au-dessous du Smic et 51% au-dessous de 20 000 € par an.

L’inégalité entre les hommes et les femmes reste cri­ante. Il y a deux fois plus de femmes (15%) que d’hommes (8%) qui perçoivent une rémunéra­tion inférieure au Smic. Inverse­ment, en haut de la pyra­mide, seules 4% des femmes perçoivent un salaire supérieur à 60 000 €, con­tre 10% des hommes.

Carte de presse

12% des per­son­nes ayant répon­du à l’enquête n’ont pas la carte de presse et beau­coup s’insurgent con­tre les critères d’attribution de la Com­mis­sion de la carte d’identité des jour­nal­istes pro­fes­sion­nels. Que représente aujourd’hui la carte de presse, comme preuve d’une activ­ité jour­nal­is­tique, lorsqu’elle est pos­sédée par 27% des per­son­nes pour lesquelles le jour­nal­isme n’est pas l’activité principale ?

Activités extra-journalistiques

26% des jour­nal­istes ayant répon­du ont une activ­ité extra-jour­nal­is­tique. Cette pro­por­tion grimpe à 41% pour celles et ceux qui ne sont pas en sit­u­a­tion d’emploi per­ma­nent et à 46% pour les non tit­u­laires de la carte de presse. La moti­va­tion dif­fère selon la sit­u­a­tion mais elle est avant tout finan­cière pour celles et ceux qui ne sont pas en sit­u­a­tion d’emploi permanent.

Protection sociale et assurances

Cou­ver­ture sociale, com­plé­men­taire san­té, retraite, les jour­nal­istes qui ne sont pas en sit­u­a­tion d’emploi per­ma­nent béné­fi­cient d’une moin­dre pro­tec­tion sociale. L’enquête fait par ailleurs un focus sur les cor­re­spon­dantes et cor­re­spon­dants à l’étranger, qui sont actuelle­ment dans la plus grande insécu­rité con­cer­nant leur pro­tec­tion sociale. Seuls 52% des jour­nal­istes dis­ent avoir une assur­ance quand ils par­tent en reportage. Si l’assurance est prise en charge par l’entreprise pour 80% des jour­nal­istes, 20% doivent pay­er leur assur­ance professionnelle.

Journalistes auteurs

62% des jour­nal­istes se con­sid­èrent auteurs ou autri­ces. C’est 9 points de moins que dans l’enquête 2013. Cette baisse est intime­ment liée à la dégra­da­tion des con­di­tions d’exercice du méti­er. Beau­coup de jour­nal­istes dis­ent ne pas se sen­tir véri­ta­ble­ment auteurs et autri­ces de ce qu’ils ou elles pro­duisent, et se sen­tent de sim­ples four­nisseurs ou four­nisseuses de con­tenus. Ils et elles dénon­cent le jour­nal­isme assis, l’encadrement pléthorique au détri­ment du jour­nal­isme de ter­rain, les sujets en kit et le formatage.

Évolution du métier et déclassement social

Trois jour­nal­istes sur qua­tre esti­ment que les con­di­tions d’exercice de leur méti­er se sont dégradées au cours des cinq dernières années.

La rémunéra­tion est le sujet qui inquiète le plus les jour­nal­istes, beau­coup expri­ment un sen­ti­ment de déclasse­ment social. L’image du méti­er arrive cepen­dant en deux­ième posi­tion. Dans les com­men­taires, les jour­nal­istes soulig­nent le lien entre pré­car­ité, détéri­o­ra­tion des con­di­tions de tra­vail, moin­dre qual­ité de l’information et dégra­da­tion de l’image des journalistes.