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La directive droits d’auteur votée au Parlement européen, un tigre en papier ?

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6 avril 2019

Temps de lecture : 4 minutes
Accueil | Veille médias | La directive droits d’auteur votée au Parlement européen, un tigre en papier ?

La directive droits d’auteur votée au Parlement européen, un tigre en papier ?

Temps de lecture : 4 minutes

La directive droits d’auteur a finalement été votée au Parlement Européen le 26 mars 2019. Les réactions sont contrastées, allant de l’enthousiasme au franc scepticisme.

Satisfaction du groupe socialiste français du Parlement

Le com­mu­niqué de Vir­ginie Roz­ière et de Per­venche Berès salue la vic­toire en ter­mes lyriques, « c’est aujourd’hui une vic­toire his­torique pour la Cul­ture et la lib­erté de la presse au XXIème siè­cle ; il est man­i­feste que les GAFA s’enrichissent en pil­lant le tra­vail des créa­teurs. Il fal­lait rééquili­br­er le rap­port de force en défen­dant ceux qui font, ceux qui créent, tout sim­ple­ment car tout tra­vail mérite salaire. C’est chose faite ! ».

« Cette vic­toire n’est pas unique­ment celle de la Cul­ture. C’est une vic­toire cul­turelle au sens noble du terme.  Ce com­bat va beau­coup plus loin que la défense de la créa­tion et des créa­teurs,  il est fon­da­teur et embrasse bien d’autres champs : celui des rap­ports de tra­vail dans un monde numérisé ; celui de la défense d’une infor­ma­tion plurielle et de qual­ité ; celui qui démasque un Inter­net qui se présente comme espace de lib­erté, alors qu’il se con­stru­it en espace pure­ment com­mer­cial,  et celui surtout de la sou­veraineté européenne par rap­port aux volon­tés de dom­i­na­tion des géants numériques qui ne recu­lent devant aucun moyen, aucun men­songe, aucune manip­u­la­tion pour défendre leurs intérêts.  Cette vic­toire con­stitue un pre­mier pas essen­tiel pour met­tre un terme à cette visée hégé­monique »

Soutien du SCAM

Le SCAM qui représente les intérêts des auteurs man­i­feste son accord com­plet dans un style inclusif frôlant le ridicule :

L’Europe a dit OUI à la direc­tive sur le droit d’auteur.
Elle a dit OUI à un meilleur partage de la valeur col­lec­tée par les GAFA.
Elle a dit OUI à l’instauration d’un droit voisin pour la presse et les journalistes.
Elle a dit OUI au principe d’une rémunéra­tion pro­por­tion­nelle pour les auteurs, les autri­ces et les artistes-inter­prètes en Europe à l’instar de ce qui existe déjà en France.
L’Europe a dit OUI à son avenir.
La cul­ture mil­lé­naire de l’Europe et sa diver­sité sont le ciment de l’union de ses peu­ples et son atout le plus pré­cieux. En votant la direc­tive sur le droit d’auteur, les eurodéputé·es ont fait preuve d’une volon­té poli­tique dont les pères fon­da­teurs auraient sans doute été fiers. Les Etats mem­bres sont par­venus à s’unir pour défendre leur iden­tité et leur avenir. 

Réticences de Jean-Frédéric Lambert

Jean-Frédéric Lam­bert, Prési­dent du kiosque numérique ePresse, est plus scep­tique « La direc­tive droit d’auteur vient d’être votée, mais c’est peut-être un tigre en papi­er » 

« Le Par­lement européen a finale­ment voté le texte sur la direc­tive « droit d’auteur », notam­ment l’article 11 — devenu l’article 15 — et l’article 13 — devenu l’article 17.
L’article 15 ouvre la notion de droit voisin à la presse et doit lui per­me­t­tre de se faire rétribuer par les agré­ga­teurs de con­tenu qui dif­fusent ses articles.
Mais la direc­tive telle qu’elle a été votée con­tient en son sein 3 faib­less­es fondamentales :
1- La négo­ci­a­tion sur la valeur du droit se fera État par État. Le rap­port de force sera claire­ment en faveur des GAFAs et c’était pré­cisé­ment pour échap­per à cette négo­ci­a­tion que les édi­teurs de presse avaient porté le sujet jusqu’à Bruxelles.
2- La taille des snip­pets n’est pas définie et les GAFAs pour­raient se con­tenter du titre et de 3 ou 4 lignes d’article pour échap­per à tout paiement tout en s’appropriant la par­tie du con­tenu qui les intéresse.
(NB Un snip­pet est un terme de pro­gram­ma­tion désig­nant une petite por­tion de code source ou de texte)
3- Les règles de dif­fu­sion des agré­ga­teurs restent com­plète­ment à la main des GAFAs qui pour­ront faire la pluie et le beau temps des éditeurs.
Le texte de loi voté par le Sénat français en févri­er 2019 ne prévoit pas de mesure plus dure que celles con­tenues dans le texte voté par le Par­lement européen. Il faut donc espér­er que l’Assemblée nationale, munie de cette enveloppe juridique, obtenue de haute lutte à Brux­elles, trans­forme l’essai et pal­lie les faib­less­es non traitées

Seules les appli­ca­tions en droits nationaux de la direc­tive européenne mon­treront sa portée réelle. On peut faire con­fi­ance aux GAFA pour les détourn­er au max­i­mum à leur avan­tage, elles ont per­du une bataille mais la guerre pour la maîtrise des con­tenus continue.