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CNews : l’intenable casse-tête créé par le Conseil d’État en matière de pluralisme

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15 février 2024

Temps de lecture : 3 minutes
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CNews : l’intenable casse-tête créé par le Conseil d’État en matière de pluralisme

Temps de lecture : 3 minutes

La décision est tombée le 13 février : le Conseil d’État a ordonné à l’Arcom (ex-CSA) d’évaluer le respect des obligations de la chaîne CNews en matière de pluralisme. Une décision difficile à appliquer, qui risque d’être un véritable casse-tête pour les médias comme pour le régulateur.

Aux origines du recours : Vincent Bolloré et le « précédent dangereux pour la démocratie »

C’était en novem­bre 2021 : irritée par ce qu’elle dénonce comme des « man­que­ments à ses oblig­a­tion légales d’honnêteté, d’indépendance et de plu­ral­isme de l’information », l’association Reporters sans fron­tières saisit l’Autorité de régu­la­tion de la com­mu­ni­ca­tion audio­vi­suelle et numérique et lui demande la mise en demeure de la chaîne CNews. En cause ? Les pro­pos tenus au détour d’une émis­sion de L’Heure des pros.

Le 5 avril 2022, l’Arcom refu­sait d’agir con­tre CNews, provo­quant l’ire de l’association, qui dépose le 13 févri­er 2022 un recours auprès du Con­seil d’État.

RSF dans le rôle du flic

Le recours ne cache pas ses vel­léités à l’encontre de la per­son­nal­ité de Vin­cent Bol­loré, prin­ci­pal action­naire de la chaîne : « Les pra­tiques de l’homme d’affaires Vin­cent Bol­loré dans le secteur des médias, explique l’association à l’occasion de l’annonce de son recours, créent un précé­dent dan­gereux pour la démoc­ra­tie, par sa con­cep­tion d’un jour­nal­isme aux ordres et d’une télévi­sion d’opinion ».

Voir aus­si : Infox : RSF, la paille et la poutre

Un recours qui renforce les pouvoirs de l’Arcom en matière de pluralisme

À l’issue de la ques­tion pri­or­i­taire de con­sti­tu­tion­nal­ité de RSF, le Con­seil d’État a ren­du une déci­sion (n°463162) dans laque­lle il a procédé à l’annulation de la déci­sion de l’ARCOM (arti­cle 1er) et a demandé au régu­la­teur de « pren­dre en compte la diver­sité des courants de pen­sée et d’opinions représen­tés par l’ensemble des par­tic­i­pants aux pro­grammes dif­fusés, y com­pris les chroniqueurs, ani­ma­teurs et invités, et pas unique­ment le temps d’intervention des per­son­nal­ités poli­tiques ».

Car pour l’institution, « en s’en ten­ant ain­si à la seule prise en compte du temps d’an­tenne accordé aux per­son­nal­ités poli­tiques pour l’ap­pré­ci­a­tion des oblig­a­tions du ser­vice en matière de plu­ral­isme de l’in­for­ma­tion, l’Ar­com a fait une inex­acte appli­ca­tion des dis­po­si­tions de la loi du 30 sep­tem­bre 1986 ». Une telle déci­sion mar­que ain­si l’extension des prérog­a­tives du régu­la­teur en matière de respect du plu­ral­isme dans les médias. Pour les respon­s­ables de Reporters sans fron­tières, il s’agit là d’une « une grande vic­toire pour RSF mais surtout une déci­sion his­torique pour la démoc­ra­tie et le jour­nal­isme ».

Une mission impossible aux relents arbitraires

Mais l’est-ce vrai­ment ? Si le décompte des temps de parole des per­son­nal­ités poli­tiques est aisé, celui des mul­ti­ples inter­venants invités sur les plateaux l’est beau­coup moins. Com­ment définir le posi­tion­nement poli­tique d’un philosophe ? D’un écrivain ? D’un jour­nal­iste ? La qual­ité arbi­traire de cette appré­ci­a­tion saurait-elle répon­dre à des proces­sus nor­mat­ifs de con­trôle que l’autorité devra met­tre en place pour répon­dre à ces injonc­tions ? La déci­sion du Con­seil d’État ouvre en effet un précé­dent judi­ci­aire qui n’affectera pas seule­ment CNews mais toutes les chaînes et radios d’information. Cer­tains jour­nal­istes se sont élevés con­tre cette déci­sion, à l’image de Franz-Olivi­er Gies­bert, qui a déploré une déci­sion inquié­tante en s’indignant : « On est en train d’aller vers un gou­verne­ment des juges […] C’est […] hal­lu­ci­nant de connerie.».

Voir aus­si : Le prix de la lib­erté de la presse de RSF pour un jour­nal­iste polon­ais en dit plus long sur RSF que sur la Pologne