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Radio France en quête d’un nouveau président

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1 novembre 2022

Temps de lecture : 5 minutes
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Radio France en quête d’un nouveau président

Temps de lecture : 5 minutes

Ils sont trois candidats en lice pour accéder à la présidence de Radio France : l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique a annoncé le 26 octobre 2022 la liste des candidatures recevables pour le poste.

La pre­mière can­di­date en lice, comme l’OJIM l’évoquait en sep­tem­bre 2022, n’est autre que Sibyle Veil, can­di­date au renou­velle­ment de son man­dat. Femme de réseaux, proche d’Emmanuel Macron, elle avait rem­porté la pre­mière cam­pagne en mis­ant sur la révo­lu­tion numérique au sein de l’instance publique. Cri­tiquée par les salariés, qui avaient inter­rompu ses vœux en jan­vi­er 2020, soupçon­née de ne pas être une grande amoureuse de la radio, sa recon­duc­tion serait vraisem­blable­ment jugée comme un choix politique.

Seul can­di­dat à ne pas – sem­ble-t-il — béné­fici­er de réseaux poli­tiques, Flo­rent Chatain est le deux­ième can­di­dat en lice pour pren­dre la prési­dence de Radio France.  Après avoir fait une car­rière sur des antennes locales (Lyon, Greno­ble), il rejoint France Inter dont il sera con­gédié par Philippe Val sans ménage­ment en 2010 après sept ans de col­lab­o­ra­tion. Il sera aus­si le coor­di­na­teur de l’éphémère (elle n’exista qu’un an à peine) antenne Libéra­dio, qui devait « oralis­er » la parole des jour­nal­istes de la rédac­tion du quo­ti­di­en. Avec une car­rière assez mod­este, Flo­rent Chatain sem­ble dif­fi­cile­ment promis à la tête de Radio France

Une énarque « promotion Simone Veil » ?

Le troisième nom souf­flé par l’Autorité de régu­la­tion de la com­mu­ni­ca­tion audio­vi­suelle et numérique (Arcom, ex-CSA) demeure plus inat­ten­du. Con­seil­lère référendaire, Maïa Wir­gin avait été nom­mée secré­taire générale par décret du prési­dent de la République le 28 mars 2022. Avec cette can­di­da­ture, la Mai­son Ronde se doterait d’une énar­que (pro­mo­tion 2006 – « Simone Veil »), cheva­lier des Arts et des let­tres et cheva­lier de l’Ordre nation­al du mérite. Celle qui fut con­seil­lère référendaire au sein de la 3ème Cham­bre à la Cour des Comptes a été respon­s­able du secteur cul­ture en 2010. Secré­taire générale de la chaîne par­lemen­taire Pub­lic Sénat en 2011, elle est dev­enue, trois ans plus tard, direc­trice de cab­i­net du Prési­dent directeur général de Radio France. Elle en est ensuite la secré­taire générale et super­vise les réformes du groupe pen­dant près de qua­tre ans. Per­son­nal­ité proche de la sphère poli­tique, elle est passée par le cab­i­net du Pre­mier min­istre Edouard Philippe, dont elle a été le « chef du pôle Cul­ture, com­mu­ni­ca­tion et régu­la­tion numérique ». Pierre Moscovi­ci lui prête un « dynamisme, sens du dia­logue et souci de l’éthique ».

Quels projets pour la Maison Ronde ?

Dans leurs propo­si­tions de pro­jets, chaque can­di­dat a dû jus­ti­fi­er le bien­fondé de sa nom­i­na­tion à la tête de l’institution.

Si le ren­force­ment de la présence de Radio France sur les dif­férents sup­ports numériques appa­raît comme un objec­tif du pro­jet de Flo­rent Chatain, la pri­or­ité du jour­nal­iste s’il venait à pren­dre la prési­dence de Radio France serait essen­tielle­ment tournée vers la ges­tion des ressources humaines. Déplo­rant une ges­tion non vertueuse des RH au sein des radios, notam­ment locales, Chatain veut faire table rase de méth­odes qu’il qual­i­fie d’un « autre âge ». Dans son pro­gramme, qui ne dresse pas un état des lieux trans­ver­sal mais se con­cen­tre essen­tielle­ment sur cette notion de « remise à plat de cette ges­tion humaine », le jour­nal­iste revient aus­si briève­ment sur la « cat­a­stro­phe indus­trielle EUROPE 1 », qui aurait selon lui per­mis la greffe de nom­breux audi­teurs de cette radio sur les antennes de France Inter et France Info.

Un projet aux accents mélenchonistes

Le pro­jet de Maïa Wir­gin, aux accents mélen­chon­istes, entend met­tre « l’humain au cœur ». En somme, faire la paix avec les équipes et les parte­naires soci­aux. L’ancienne auditrice de la Cour des Comptes aspire à renou­vel­er un jeune audi­toire. « Car la jeunesse, explique-t-elle avec dém­a­gogie, qu’elle soit urbaine, péri-urbaine ou rurale, a besoin d’un espace pour exis­ter, partager, se sen­tir enten­due et libre de faire enten­dre sa voix. Et nous avons besoin d’elle, de sa rad­i­cal­ité́, de sa lib­erté́, de sa créa­tiv­ité́, de son esprit absol­u­ment mod­erne, pour avancer et grandir ». La créa­tion de con­tenus dits proches de la cul­ture « urbaine » sem­ble être la voie qu’elle des­tine à ce pub­lic. Face à la « frac­tura­tion de l’opinion publique » (enten­dre les « pau­vres », avec les gilets jaunes qu’elle cite en exem­ple et les habi­tants des zones rurales), elle promet d’encourager l’avènement d’une plate-forme de « prox­im­ité ». En ter­mes économiques, elle prévoit d’intégrer « la tran­si­tion écologique dans ses objec­tifs stratégiques et sa tra­jec­toire finan­cière et en mesurant les effets de son action », mesure qui ne risque pas de ren­dre l’institution finan­cière­ment excé­den­taire, à l’inverse d’une poli­tique favorisant des ressources pub­lic­i­taires dont elle craint qu’elles créent un rap­port de dépen­dance de l’audiovisuel pub­lic. Elle en appelle par ailleurs à une union des forces des dif­férentes sociétés de l’audiovisuel pub­lic afin de « con­stru­ire des offres nou­velles et relever l’immense défi démoc­ra­tique et social de notre temps. »

Un « service public moderne et exemplaire »

Pro­gramme le plus pro­fes­sion­nel par­mi les trois propo­si­tions déposées auprès de l’ARCOM, les Soix­ante propo­si­tions pour le ser­vice pub­lic de la radio de Sybile Veil lais­sent transparaître une expéri­ence des instances publiques ; sem­blable à un rap­port d’information par­lemen­taire, le pro­jet de la prési­dente actuelle de Radio France décline en qua­tre points les dif­férents objec­tifs de la Radio : stratégie édi­to­ri­ale, mue dig­i­tale du média, créa­teur « de valeur pour notre écosys­tème de l’audio » et con­struc­tion d’un « ser­vice pub­lic mod­erne et exem­plaire » sont les grandes per­spec­tives dressées par cette proche d’Emmanuel Macron. Lutte con­tre la dés­in­for­ma­tion et l’établissement d’un « Nutriscore de l’information », amélio­ra­tion des objec­tifs énergé­tiques relat­ifs au secteur, mod­erni­sa­tion de la ges­tion des ressources humaines, « atten­tion accrue à la par­ité́ et à la diver­sité́ sur nos antennes »… : les nom­breuses propo­si­tions appa­rais­sent dans la stricte con­ti­nu­ité de la mis­sion entamée par Veil.

Audités par le col­lège de l’Arcom lun­di 19 décem­bre prochain, le can­di­dat élu accédera à sa fonc­tion au plus tard le 16 jan­vi­er 2023. Son man­dat, qui com­mencera à la mi-avril, doit dur­er cinq ans.