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Le Monde, les photos et l’invasion migratoire

7 septembre 2015

Temps de lecture : 3 minutes
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Le Monde, les photos et l’invasion migratoire

Temps de lecture : 3 minutes

La violence morbide de la photo du petit Aylan publiée en couleurs et en pleine une du Monde daté du vendredi 4 septembre n’est pas dans les habitudes du journal du soir habituellement plus pondéré. Dans un article de son édition en ligne du 6 septembre signé Antonin Sabot, Le Monde se justifie et vend la mèche : il fallait influencer l’opinion française jusqu’ici rétive à l’incessant flux migratoire. Décryptage.

Une image mais pas n’importe laque­lle, pas celle d’un enfant pales­tinien, pas celle d’un décapité de Daesh, non « une image sym­bol­isant la mort de l’Europe nous ren­voy­ant à notre indif­férence col­lec­tive » La mort de l’enfant n’est pas la con­séquence des exac­tions islamistes ni des actions de ceux qui encour­a­gent les passeurs mais celle de notre « indif­férence col­lec­tive ». La démarche cul­pa­bil­isatrice est un peu grosse mais ça peut marcher, ça va marcher. D’ailleurs qui sont ces morts, le petit Aylan ou les noyés de la Méditer­ranée, sinon des « vic­times de la forter­esse Europe ». Vrai­ment ? L’Europe serait une forter­esse ? Il sem­blerait que l’actualité des derniers mois l’assimile plutôt à une pas­soire… Et puis cet enfant est devenu un « emblème », une sorte de dra­peau com­pas­sion­nel des­tiné à sidér­er les opin­ions européennes.

L’image fut tout d’abord pub­liée en ligne avec de désagréables réac­tions de lecteurs dénonçant une « image mor­bide et racoleuse ». Puis tout s’emballe, la presse quo­ti­di­enne bri­tan­nique du Times au Guardian pub­lie la fameuse image. Alors il faut suiv­re mais pas n’importe com­ment, trou­ver l’angle qui per­me­t­tra de faire bas­culer les con­sciences européennes du côté obscur de la faib­lesse « Nous avons cher­ché le meilleur moyen de la présen­ter, avec un titre qui dis­ait qu’elle serait peut-être la pho­to qui per­me­t­trait la prise de con­science de l’Europe » (c’est nous qui soulignons), écrit la respon­s­able édi­to­ri­ale Emmanuelle Chevallereau. Se pose alors la ques­tion du choix du meilleur angle, plusieurs images de la même scène sont disponibles. Celle où l’on voit le garde-côte turc obser­vant le petit corps est « la plus forte » celle qui « mar­quera les con­sciences », vos con­sciences. La pho­to fait l’objet d’un édi­to­r­i­al du directeur du jour­nal. « Cette pho­to, ter­ri­ble, est en elle-même une prise de posi­tion » (c’est nous qui soulignons), ajoute Luc Bron­ner. Une prise de posi­tion en faveur d’un flux migra­toire incon­trôlé, inex­orable, irréfragable et même souhaitable.

Comme le souligne Slo­bo­dan Despot dans l’édition en ligne de Causeur du 7 sep­tem­bre « Les européens à qui l’on veut faire avaler sans bronch­er un des mou­ve­ments de pop­u­la­tion les plus colos­saux de l’histoire ne sont pas des citoyens qu’on veut con­va­in­cre mais des chiens de Pavlov qu’on s’emploie à dress­er ». Comme les pris­es se posi­tion du Monde le con­fir­ment. CQFD.

Dessin : Kich­ka (DR)

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