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Le Meilleur des mondes selon Caroline Fourest

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20 octobre 2014

Temps de lecture : 4 minutes
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Le Meilleur des mondes selon Caroline Fourest

Temps de lecture : 4 minutes

Tous les lundis matins, France Culture offre 5 minutes d’antenne à Caroline Fourest, afin que celle-ci donne son point de vue sur un fait d’actualité. Récemment mise en garde par le CSA qui lui demande de « faire preuve de davantage de vigilance et de rigueur, notamment pour des sujets sensibles d’actualité » (décision du 15/09/2014, voir notre papier ici sur le CSA et notre autre brève sur cette affaire ), il était intéressant de suivre la journaliste dans ses chroniques de rentrée, du 31 août au 5 octobre. Plongée au sein d’un univers impitoyable, où la distinction entre vérité et mensonge devient inopérante.

Fourest-la-gentille contre les méchants : la fin qui justifie les moyens ?

Car­o­line Fourest est une vic­time. Vic­time de la « droite inté­griste », « du cli­mat d’intimidation intel­lectuelle »… elle se doit donc d’entrer en résis­tance. Et sa démarche a le mérite d’être claire : chez elle, pas de dis­tinc­tion entre adver­saire poli­tique et enne­mi. Ce procédé a l’avantage de lui économiser un argu­men­taire : dès lors qu’on com­bat le Mal, pourquoi s’embarrasser à utilis­er des moyens hon­nêtes ? Ain­si, Bachar el-Assad, en plus de se voire attribuer la respon­s­abil­ité de la créa­tion de l’État islamique (28/09), aurait fait « plus de 200 000 morts au cours de sa répres­sion » — l’Observatoire syrien des droits de l’homme, qu’on ne peut pas soupçon­ner d’être pro-Assad, en compte 10 000 à 20 000. Jamais très loin lorsqu’elle par­le du dic­ta­teur syrien : Vladimir Pou­tine. Ce dernier n’est rien moins que la source de tous les maux de la planète : cet « auto­crate red­outable­ment dan­gereux », qui a pour objec­tif de « colonis­er » l’Europe, a en effet per­mis « la con­ta­gion dji­hadiste voulue par Bachar el-Assad ».

Le chris­tian­isme est égale­ment dans le viseur de Car­o­line Fourest, qui ne voit aucun incon­vénient à pra­ti­quer la dés­in­for­ma­tion la plus tran­quille en imputant par exem­ple aux chré­tiens la respon­s­abil­ité des crimes des mil­ices cen­trafricaines anti-bal­a­ka… alors que les­dites mil­ices sont majori­taire­ment ani­mistes. Affir­ma­tions sans preuves, manip­u­la­tion des chiffres, ren­verse­ment de la vérité… tel est le cock­tail que Car­o­line Fourest réserve à ceux qui ont le mal­heur de lui déplaire.

Accusée France, levez-vous !

Dans sa croisade, Fourest se réserve le droit de choisir ses alliés, et la France n’en fait pas par­tie. Quoi qu’elle fasse, celle-ci est dans l’erreur. Cer­taines voix s’élèvent pour pren­dre la défense des chré­tiens d’Orient ? C’est « une surenchère entre la droite et l’extrême droite » s’exclame l’essayiste, mon­trant son indig­na­tion sélec­tive, elle qui déclare « tout à fait légitimes » le boy­cott des pro­duits israéliens (21/09). Mais elle ne s’arrête pas là, et s’improvise avo­cate de l’Islam : « il ne fait aucun doute que la moti­va­tion des gangs ter­ror­istes [de l’État islamique] doit très peu à la spir­i­tu­al­ité et beau­coup à leurs hor­mones » nous apprend-elle. Alli­er fémin­isme pri­maire et cul­ture de l’excuse, une rude con­cur­rence pour Edwy Plenel lui aus­si chroniqueur à France Cul­ture.

Au fil de ses chroniques, Car­o­line Fourest esquisse son por­trait du français moyen ; celui-ci est loin d’être élo­gieux. Ain­si de déclar­er que si les Français se méfient des hommes poli­tiques et se met­tent à vot­er pour les extrêmes, c’est parce qu’ils ne com­pren­nent pas leurs dis­cours. La solu­tion ? Des « élus péd­a­gogues ». Les traiter d’idiots serait revenu au même.

Cachez cette réalité complexe que je ne saurais voir

Car­o­line Fourest sem­ble avoir trou­vé un moyen impa­ra­ble d’évacuer toute expli­ca­tion qui déplairait à son idéolo­gie : l’accusation « d’instrumentalisation ». Chris­tine Boutin essaye d’expliquer le départ de jeunes « français » pour le dji­had par « l’abandon de nos valeurs et le rel­a­tivisme bobo » ? Cir­culez, il n’y a rien à voir : c’est de l’ « instru­men­tal­i­sa­tion de l’horreur ». De même, sans chercher à com­pren­dre les raisons pro­fondes qui poussent les islamistes à agir ain­si, la jour­nal­iste se con­tente d’explications pour le moins sim­pli­fi­ca­tri­ces, ceux-ci n’agissant de la sorte que parce « qu’abrutis, grossiers, psy­chopathes » (28 sep­tem­bre). Tel est le monde selon Car­o­line Fourest : des gen­tils, des méchants. Et beau­coup de mau­vaise foi et d’amateurisme.

Voir aussi : Caroline Fourest, féministe virile

Crédit pho­to : Place au peu­ple via Flickr (cc)