Ojim.fr
Veille médias
Dossiers
Portraits
Infographies
Vidéos
Faire un don
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
PUBLICATIONS
Yann Barthès, Dilcrah, Netflix, Frontex, Bellingcat... Découvrez les publications papier et numériques de l'Observatoire du journalisme.
→ En savoir plus
Disparition d’Émile : une bien accablante « journaliste » fait le procès de la famille

4 septembre 2023

Temps de lecture : 5 minutes
Accueil | Veille médias | Disparition d’Émile : une bien accablante « journaliste » fait le procès de la famille

Disparition d’Émile : une bien accablante « journaliste » fait le procès de la famille

4 septembre 2023

Temps de lecture : 5 minutes

Vous allez lire un article gratuit. Mais il a un coût. Un article revient à 50 €, un portrait à 100 €, un dossier à 400 €. Notre indépendance repose sur vos dons. Après déduction fiscale un don de 100 € revient à 34 €. Merci de votre soutien. Claude Chollet

C’est un moment particulièrement abject, qui s’est déroulé sur le plateau de BFMTV le 29 août 2023. Interrogée sur la disparition du jeune Émile survenue au Haut-Vernet il y a près d’un mois, la « journaliste » de Libération Bernadette Sauvaget a accablé encore un peu plus la famille, dont elle a fait le procès en “catholicisme-extrême droitier”.

Sur le plateau de BFMTV, Olivi­er Tru­chot revient sur l’entretien que la famille du jeune garçon dis­paru a don­né à Famille chré­ti­enne. Qual­i­fi­ant les par­ents de celui-ci de cou­ple « très pieux », le présen­ta­teur souligne com­ment celui-ci a « choisi la presse catholique car [il] avait peur d’être moqué, ridi­culisé ». Et d’interroger Bernadette Sauvaget, jour­nal­iste de Libéra­tion pour analyser led­it entretien.

Une analyse volontairement politique

« Ils ont choisi un titre catholique, […] plutôt proche de leurs con­vic­tions », dira d’abord Sauvaget. Apparem­ment attachée au rite tra­di­tion­nel de l’Église catholique, la famille aurait donc souhaité s’exprimer dans un jour­nal « proches de leurs con­vic­tions », et non relatif à leur foi ? C’est parce qu’ils voulaient par­ler de cette épreuve en qual­ité de cou­ple, de famille catholique que les par­ents d’Émile se sont rap­prochés du média dirigé par Samuel Pru­vot, comme ce dernier l’a racon­té. Évo­quer des « con­vic­tions » reve­nait dès les pre­miers mots de son dis­cours à ori­en­ter la suite de son analyse vers un biais poli­tique, alors même que le jour­nal Famille chré­ti­enne se situe plutôt dans la droite mod­érée sur l’échiquier poli­tique et ne fig­ure pas par­mi les média catholique attachés à la liturgie traditionnelle.

« Ils dis­ent que leur foi a été car­i­caturée. […] J’ai pas eu ce sen­ti­ment. »

Bernadette Sauvaget a ensuite regret­té que les par­ents du jeune garçon aient déploré que leur « foi [ait] été car­i­caturée ». Et la « jour­nal­iste » d’affirmer qu’à la lec­ture de plusieurs arti­cles, elle n’en « a[vait] pas eu le sentiment ».

Prenons un bref échan­til­lon des arti­cles parus à la suite de la dis­pari­tion : une glo­rieuse (sic) presse fémi­nine relaie ici la thèse (elle-même relayée par Ouest-France), selon laque­lle le jeune garçon, qui, on cite : « aurait pu dis­paraître lors d’une messe noire. [Une théorie] dans la droite lignée des rumeurs per­sis­tantes sur la famille du petit garçon », se dédouane le tor­chon. Pas plus ami­caux, les pro­pos rap­portés dans Paris Match (repris par Gala), qui évoque la famille d’Émile comme des per­son­nes « trop calmes […] trop maîtres de leurs émo­tions » et « sec­taires ». Guère plus sym­pa­thiques, les témoignages visant à fustiger l’attitude du père de famille lors des battues, tout en rap­pelant au détour de l’article les engage­ments poli­tiques passés de celui-ci. L’échantillon n’est hélas, pas exhaustif…

Politique et religieux : une liaison exaltée

« Il y a un cer­tain malaise autour de leurs con­vic­tions catholiques car ce ne sont pas des catholiques ordi­naires mal­gré tout, d’ailleurs ils le recon­nais­sent », a ensuite débal­lé la jour­nal­iste d’un âge avancé, et d’ajouter « Ils sont liés à des organ­i­sa­tions catholiques que l’on peut qual­i­fi­er d’extrême-droite. »

Liant oppor­tuné­ment deux élé­ments pour­tant dis­tincts (l’attachement de la famille à une forme liturgique tra­di­tion­nelle et les con­vic­tions poli­tiques de celle-ci), cette asser­tion témoigne d’abord de la mécon­nais­sance crasse des jour­nal­istes sur les ques­tions ayant trait aux sub­til­ités des litur­gies chré­ti­ennes. La jour­nal­iste évo­quera la fig­ure de « Bernard Antony », qual­i­fié de « grande fig­ure de l’extrême-droite catholique ». Se référ­er au prési­dent de l’Alliance générale con­tre le racisme et pour le respect de l’identité française et chré­ti­enne (AGRIF), âgé de 79 ans, sem­ble par ailleurs indi­quer les archives assez anci­ennes dont dis­pose Mme Sauvaget (Bernard Antony a quit­té le Front Nation­al au début des années 2000).

À la recherche du sensationnel

Cette asser­tion témoigne par ailleurs de l’absence de lim­ites de cer­tains jour­nal­istes lorsque sont évo­quées des per­son­nes appar­tenant à une famille de pen­sée — en l’occurrence, la droite nation­al­iste ou iden­ti­taire – sys­té­ma­tique­ment car­i­caturée pour sa ligne en faveur de la préférence française. En l’occurrence, le « Bas­tion social » (asso­ci­a­tion pointée du doigt parce qu’elle a fait l’objet d’une dis­so­lu­tion poli­tique) auquel aurait appartenu le père du jeune garçon, avait pour objet dans ses statuts « de venir en aide aux seuls dému­nis de nation­al­ité française »…L’appartenance passée du père de famille au mou­ve­ment de l’Action française il y a plusieurs décen­nies n’apportait en out­re pas grand-chose à l’affaire.

Qui est Bernadette Sauvaget ?

Bernadette Sauvaget fut un con­tribu­teur de Réforme, jour­nal protes­tant d’actualité. Dirigé depuis 2022 par Jean-Marie de Bourqueney, pas­teur appar­tenant à une frange libérale des Églis­es réfor­mées, Réforme sem­ble incar­n­er une frange du protes­tantisme qui par déf­i­ni­tion con­stitue un « courant con­tes­ta­teur de la tra­di­tion dont le but est de for­muler une pen­sée adap­tée à la moder­nité. » Si la ligne édi­to­ri­ale de cet heb­do­madaire sem­ble donc assez peu com­pat­i­ble avec un catholi­cisme tra­di­tion­nel, la con­tri­bu­tion régulière de Bernadette Sauvaget au quo­ti­di­en Libéra­tion laisse par ailleurs peu de doutes pour l’affection qu’elle porte à ces mou­ve­ments. Tirant à boulets rouges sur toute fig­ure diocé­saine vague­ment con­ser­va­trice (voir les arti­cles : Messe en latin et évangéli­sa­tion : Dominique Rey, l’évêque réac qui embar­rasse le Vat­i­can ou Quand l’évêque de Nan­terre Matthieu Rougé par­ticipe à une uni­ver­sité d’été d’extrême droite), elle abor­de l’Église catholique presque exclu­sive­ment sous l’angle des scan­dales, à l’exception des arti­cles qu’elle rédi­ge sur le pape François dont elle sem­ble saluer l’action.

Il est des épisodes de mau­vaise foi qui prê­tent, au sein d’une caste médi­a­tique sujette à la ver­sa­til­ité de l’information con­tin­ue, à sourire. La grav­ité des pro­pos de Mme Sauvaget, qui sem­ble oubli­er l’épreuve à laque­lle est soumise une famille qui a vu son enfant dis­paraître depuis plus d’un mois et qui trou­ve judi­cieux, en bon « expert » de plateaux auto­proclamé, d’en faire le procès, n’en fait pas partie.

Voir aussi

Cet article GRATUIT vous a plu ?

Il a pourtant un coût : 50 € en moyenne. Il faut compter 100 € pour un portrait, 400 € pour une infographie, 600 € pour une vidéo. Nous dépendons de nos lecteurs, soutenez-nous !

Vidéos à la une

Derniers portraits ajoutés