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Allemagne, des mesures sociales contre les « discriminations »

13 décembre 2020

Temps de lecture : 5 minutes
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Allemagne, des mesures sociales contre les « discriminations »

Temps de lecture : 5 minutes

Le magazine allemand Junge Freiheit a mis en lumière une nouvelle tendance au sein des entreprises en Allemagne dans le milieu artistique, la lutte « contre les discriminations ». Visite guidée.

Toujours plus de « minorités »

Un arti­cle paru le 26 novem­bre 2020 révèle la nou­velle poli­tique sociale de l’UFA, société de pro­duc­tion ciné­matographique alle­mande. Le pro­jet est sim­ple : « met­tre d’avantage l’accent sur les minorités devant et der­rière la caméra ». Ce mot minorité est défi­ni dans l’article comme le groupe­ment social com­posé des « per­son­nes hand­i­capées », des « per­son­nes d’origine étrangère et les par­ti­sans LGBTQ ». Cette mesure a été annon­cée par son directeur Nico Hof­mann, qui souhaite met­tre en place un plan de recrute­ment des per­son­nes issues des minorités. C’est sous le patronyme de « cer­cle de diver­sité » que s’établit cette mesure. Pourquoi ces minorités en par­ti­c­uli­er ?  « Les minorités seraient sou­vent présen­tées selon cer­tains clichés », estime Tyron Rick­etts, chef de la société parte­naire d’UFA, les per­son­nes issues des minorités sont oblig­a­toire­ment des per­son­nes pré­sumées « défavorisées. »

Voir égale­ment notre arti­cle sur le rem­place­ment des rédac­teurs-en-chef en Alle­magne.

Éduquer le public

Le but d’UFA est ambitieux. Tout d’abord mon­tr­er au sein de l’entreprise et à l’écran une image « miroir » de la société actuelle. Et ensuite pren­dre sa « respon­s­abil­ité » selon les dires de Joachim Kosak, pour « lut­ter de manière déci­sive con­tre les ten­dances dis­crim­i­na­toires, définir des thèmes appro­priés et les ren­dre vis­i­bles dans nos programmes. »

Le ciné­ma alle­mand n’est pas le seul touché par cette volon­té de se faire l’écho d’une cer­taine mou­vance mon­di­ale. Un autre arti­cle de Junge Frei­heit révèle une mesure sim­i­laire, mais cette fois-ci dans le milieu de la danse : « La direc­trice par intérim du Bal­let d’É­tat de Berlin, Chris­tiane Theobald, a annon­cé des cours de for­ma­tion à la lutte con­tre le racisme pour tous les employés ». Une « danseuse à la peau som­bre » aurait subi des dis­crim­i­na­tions liées à sa couleur de peau. Chloé Lopes Gomes, la danseuse en ques­tion, s’est vue oblig­ée de se maquiller en blanc et s’est vue refuser par un « maître de bal­let » un voile blanc lors d’une répéti­tion car « vous êtes noire ».

Ce fait par­ti­c­uli­er, se résumant à un léger inci­dent, a été une véri­ta­ble aubaine pour le groupe Black lives Mat­ter qui « a finale­ment con­va­in­cu Lopes Gomes de ren­dre les événe­ments publics ». L’article révèle que le con­trat de la danseuse n’étant pas renou­velé, celle-ci s’est autorisée quelques déc­la­ra­tions en plus de la révéla­tion des faits. « Pour moi, ce n’est que la pointe de l’ice­berg. Le prob­lème, c’est l’in­sti­tu­tion, la tra­di­tion. Il y a encore des gens qui voient le bal­let comme une forme d’art éli­tiste et blanche. J’e­spère que les autres danseurs se sen­tiront désor­mais encour­agés à défendre leurs droits.”

Traquer l’ennemi

Ces deux arti­cles suiv­ent la même ligne : annon­cer d’abord une mesure nou­velle au sein d’une entre­prise. Puis révéler ce qui a valu la déci­sion d’une telle mesure : que ce soit des « mod­èles de rôles restric­tifs dépassés », des « ten­dances dis­crim­i­na­toires » ou l’obligation de « se maquiller en blanc », ces faits sont présen­tés comme loin d’être anodins. Les mesures ain­si mis­es en place ne cachent pas leurs ambi­tions réelles. Au bal­let comme au ciné­ma, c’est bien d’une « lutte con­tre » dont il s’agit. Les mesures sont appréhendées comme un com­bat, une sorte de révo­lu­tion con­tre le mal. Mais qui est l’ennemi ? L’article sur la danseuse de bal­let le désigne sans ménage­ment : « l’institution, la tra­di­tion » et même si les faits se déroulent en Alle­magne une pré­ci­sion per­met d’identifier plus pré­cisé­ment l’ennemi « une forme d’art éli­tiste et blanche ». Si les arti­cles adoptent des tons neu­tres, les révéla­tions con­tenues démon­trent une réelle volon­té de chang­er en pro­fondeur cer­taines choses dans la société alle­mande ; à com­mencer par la population ?

Voir aus­si notre arti­cle sur la chas­se aux sor­cières en Alle­magne.

Ces mesures pris­es dans ces entre­pris­es don­nent au lecteur l’impression que les évène­ments jus­ti­fi­ant ces mesures ne sont pas qu’une expéri­ence désagréable isolée, mais plutôt l’illustration d’une général­ité dont il n’a pas encore pris con­science. Cette façon de présen­ter, même avec le ton le plus neu­tre pos­si­ble, tend à con­fér­er une cer­taine exem­plar­ité pour ceux et celles qui adoptent de telles pris­es de déci­sion au sein de leur entre­prise. Le mes­sage est sim­ple : là où la majorité des gens côtoy­aient sans s’en apercevoir le racisme au quo­ti­di­en, le pra­ti­quant peut être eux-mêmes, cer­taines per­son­nes « respon­s­ables » doivent pro­pos­er des « cer­cles de diver­sité » afin de chang­er la société.

Coup dur pour ceux qui aimaient le cinéma d’antan

À l’instar d’Hollywood qui a mis en place un plan de représen­ta­tion des per­son­nes issues de la diver­sité comme le révèle un arti­cle dans Le Monde, le ciné­ma et le bal­let alle­mand, revê­tent d’une dimen­sion morale leurs mesures sociales, jus­ti­fi­ant ain­si le fait de recruter des per­son­nes sur leur apparence à telle ou telle com­mu­nauté. Il sem­ble aujourd’hui immoral que des per­son­nes banale­ment blanch­es, ni hand­i­capées et ni LGBTQ+ soient omniprésentes dans la représen­ta­tion artis­tique. C’est ain­si qu’une mou­vance mon­di­ale, dont Black Lives Mat­ter fait par­tie, incite à chang­er le mod­èle de recrute­ment jusqu’alors utilisé.

UFA, affirme vouloir recruter non plus sur des capac­ités ou des mérites, mais en pri­or­ité sur des critères d’appartenance. Allant plus loin pour ce qui est du ciné­ma, la créa­tiv­ité est redéfinie « Chez UFA, la diver­sité est une con­di­tion préal­able absolue à tout type de créa­tiv­ité ». Il sem­blerait donc que le ciné­ma d’avant, dépeint comme com­prenant « les mod­èles de rôles restric­tifs dépassé » man­quait de génie. Un ciné­ma ne met­tant pas en scène ces per­son­nes issues des « minorités » est un mau­vais ciné­ma, puisque man­quant à son essence pre­mière qu’est la créa­tiv­ité, elle-même fille de la « diver­sité ». CQFD.

Les ama­teurs de ciné­ma peu­vent être ravis : le meilleur de la créa­tiv­ité ciné­matographique resterait à venir. À moins que ce ne soit le contraire…

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