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L’Humanité financé par les impôts

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10 décembre 2013

Temps de lecture : 4 minutes
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L’Humanité financé par les impôts

Temps de lecture : 4 minutes

En plus d’énormes subventions reçues chaque année, le journal L’Humanité vient de se voir, sur demande de l’État, effacer une dette de 4 millions d’euros.

L’amendement voté par les députés mar­di dernier 3 décem­bre, a décidé, en quelques min­utes, que « les créances détenues sur la Société nou­velle du jour­nal L’Humanité au titre du prêt accordé le 28 mars 2002, réamé­nagé en 2009 et imputé sur le compte de prêts du Tré­sor n° 903‑05, sont aban­données à hau­teur de 4 086 710,31 euros en cap­i­tal. Les intérêts con­tractuels cou­rus et échus sont égale­ment aban­don­nés. » Il estime que L’Humanité « ne peut faire face au rem­bourse­ment de sa dette con­trac­tée auprès de l’État (…) parce que ses résul­tats financiers sont très faibles et qu’elle ne pos­sède plus d’actifs ».

Pour Patrick Le Hyaric, prési­dent du direc­toire et directeur de L’Hu­man­ité, « il s’ag­it d’un des trois prêts que nous avons con­trac­tés en 2001–2002 quand nous étions proches de la ces­sa­tion de paiement. Nous avons rem­boursé les deux pre­miers mais nous étions dans l’in­ca­pac­ité de rem­bours­er le troisième ». Les deux pre­miers prêts accordés par le Fonds de développe­ment économique et social avaient été rem­boursés, en 2007, suite à la vente du siège du jour­nal à Saint-Denis. Rap­pelons qu’à l’époque, toutes les ban­ques avaient refusé de prêter un cen­time au quo­ti­di­en, qui s’était alors tourné vers l’État.

On peut s’interroger sur la néces­sité pour l’État, et donc pour le con­tribuable, d’éponger la dette d’un jour­nal dont la dif­fu­sion et les abon­nements ne cessent de chuter (sur un an, la dif­fu­sion France payée a bais­sé de 7 %, à 41.623 exem­plaires) et dont les pertes sont impor­tantes : 1,9 mil­lion en 2011, 200 000 euros en 2012 et sans doute plus cette année, pour un chiffre d’af­faires de près de 30 millions.

Selon un rap­port de la Cour des comptes, L’Humanité a été le titre le plus sub­ven­tion­né par l’É­tat (0,48 euro par exem­plaire ven­du à 1,40 euro, soit 32 % du prix), entre 2009 et 2011, touchant 6,8 mil­lions d’eu­ros par an en moyenne. Vous pou­vez con­sul­ter toutes les sub­ven­tions accordées par l’État au jour­nal en téléchargeant l’infographie que l’Ojim lui a consacré.

La gronde ne s’est pas faite atten­dre. Le syn­di­cat d’étudiant Uni a déjà lancé une péti­tion con­tre cet amende­ment. « Moi con­tribuable, je ne veux pas pay­er la dette du jour­nal L’Humanité ! », écrit l’Uni. De son côté, le député UMP Thier­ry Mar­i­ani s’est inter­rogé sur son compte Twit­ter : « Aurait-elle (l’Assemblée, ndlr) fait de même pour un jour­nal de Droite ? » Peut-être qu’à l’instar du Figaro, les jour­naux de droite ne sont-ils con­sid­érés que comme des « organes de pro­pa­gande » (dix­it Chris­tiane Taubi­ra) ?

« Si on peut s’émouvoir de l’abandon d’une telle ren­trée d’argent dans les caiss­es de l’État à l’heure où l’on demande aux Français de se ser­rer la cein­ture, on se demande égale­ment sur quels critères cet amende­ment favorise la survie de L’Huma alors que bien d’autres jour­naux se sont cassé la gueule et que la presse française est loin d’être au beau fixe », écrit Thibaut Ronet sur Boule­vard Voltaire.

Sur Europe 1, Marine Le Pen a égale­ment évo­qué ironique­ment ce blanchi­ment en règle. « La République a beau­coup d’é­conomies à faire. La sub­ven­tion pour le jour­nal L’Hu­man­ité est très lourde par exem­ple », a déclaré la prési­dente du Front Nation­al. Et les inter­nautes, sur les réseaux soci­aux, de se scan­dalis­er de ce « traite­ment de faveur » à l’égard d’un jour­nal com­mu­niste quand les familles et les PME suren­det­tées n’y ont pas droit…

Mais L’Humanité con­tin­ue son chemin. Grâce à cet efface­ment de dette, une nou­velle for­mule du quo­ti­di­en sera lancée fin févri­er ou début mars, avant un nou­veau site Inter­net mi-avril. En toute indépen­dance ? À ce niveau d’aides publiques et de priv­ilèges, il est sérieuse­ment per­mis d’en douter…

Voir aus­si : L’Hu­man­ité, infographie