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Les médias américains à l’heure du Spygate. Première partie

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4 juin 2019

Temps de lecture : 5 minutes
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Les médias américains à l’heure du Spygate. Première partie

Temps de lecture : 5 minutes

Les européens suiv­ent de loin le match du pro­cureur Mueller con­tre Trump. Nous pub­lions une enquête com­plète de notre cor­re­spon­dant en Amérique du Nord en deux parties.

Initialement démoralisés par l’incapacité du procureur Mueller à inculper Trump, sa famille, ses amis, anéantis par les sondages qui montrent que les américains ne veulent plus entendre parler du « Russiagate », paniqués par les conséquences à venir du récent « Spygate » lancé par le Ministre de la Justice William Barr contre le cartel du Renseignement, les grands médias américains se sont transformés en bunker dudit cartel, attendant un miracle. Le 29 mai 2019, Mueller vient de leur offrir un double impeachment sur un plateau : celui de Barr, et celui de Trump. Pourquoi ?

C’est comme si rien ne s’était passé. Après deux ans de clics lucrat­ifs et de finance­ments élec­toraux cau­tion­nés par le fan­tasme du « Rus­si­a­gate », l’État pro­fond con­firme son inten­tion de retour au statu quo ante. Il faut se débar­rass­er du can­cer Trump qui irrite l’establishment de la poli­tique étrangère améri­caine, autant que celui des GAFAM, les deux se rejoignant en une visée géopoli­tique hégémonique.

L’enquête Mueller, une poupée gigogne

Le pro­cureur Mueller avait rassem­blé il y a deux ans une équipe d’«exécuteurs » proches de la galax­ie Clin­ton. Soutenu quo­ti­di­en­nement par les médias, il a investi plus de 30 mil­lions de $ en un ratis­sage sys­té­ma­tique de tout ce qui était de près ou de loin proche de Trump, à la recherche d’un crime; il n’a cepen­dant pu établir que « Trump and Co » avaient con­spiré avec Pou­tine pour con­fis­quer l’élection pro­gram­mée d’Hillary Clin­ton. Il vient de le con­firmer lui-même à la télévi­sion le 29 mai. 2019. Il n’a pas non plus, jaugeant le pour et le con­tre sur une dizaine de cas, pu établir que Trump avait com­mis un ou des actes crim­inels d’entrave à la jus­tice alors que le lion en cage prési­den­tiel ten­tait de se libér­er de l’étreinte du boa des inves­ti­ga­tions. Mais Mueller a aus­si affir­mé qu’il ne pou­vait pas non plus exonér­er Trump du crime d’entrave à la jus­tice, pas­sant sub­tile­ment de la pré­somp­tion d’innocence à celle de cul­pa­bil­ité… con­traire­ment au cas des espi­ons russ­es inculpés du GRU qui selon lui « auraient » piraté la cam­pagne Clin­ton, et qui, insis­tait-il devant les caméras, « devaient béné­fici­er de la pré­somp­tion d’innocence » !

Et il a pré­cisé que c’est au Con­grès de pren­dre le relais pour toute sanc­tion d’un prési­dent en exer­ci­ce qui aurait abusé de sa posi­tion. Et surtout il annonce publique­ment qu’il ne veut pas témoign­er devant le Con­grès et que, dans le cas où il recevrait une injonc­tion de sa part, il ne dirait pas un mot de plus qu’il n’y a dans son rap­port. Il a rai­son. Les mem­bres du Free­dom cau­cus répub­li­cain l’attendent un couteau entre les dents.

Pilonnage médiatique

L’enquête Mueller, grossie par le pilon­nage médi­a­tique, aura eu au moins un résul­tat tan­gi­ble : le pas­sage l’an dernier de la Cham­bre des Représen­tants dans le camp démoc­rate. Or, con­sti­tu­tion­nelle­ment, c’est la Cham­bre qui décide de l’instruction de la procé­dure d’impeach­ment, charge au Sénat de juger ensuite l’affaire. D’où la sus­pi­cion de cer­tains répub­li­cains selon laque­lle la mis­sion de Mueller aurait eu un unique objec­tif stratégique : ren­vers­er Trump, en lais­sant plan­er le nuage de l’enquête bien au-delà du néces­saire, puisque toutes les enquêtes des com­mis­sions par­lemen­taires et celles du FBI savaient qu’au titre du code pénal, les con­tacts russ­es de Trump n’étaient pas crim­inels. Selon cette ligne de raison­nement, et avec le sou­tien des médias, l’équipe Mueller aurait ain­si fonc­tion­né comme un facil­i­ta­teur d’impeach­ment, en ren­ver­sant la Cham­bre répub­li­caine, et surtout en forçant Trump, novice en poli­tique, à se débat­tre mal­adroite­ment, se met­tant ain­si à risque selon les critères de l’entrave à la justice.

400 pages surtout destinés aux médias

Mueller et ses zélés col­lab­o­ra­teurs ont écrit 400 pages essen­tielle­ment des­tinées aux médias, au Con­grès, et aux #Nev­erTrump, noy­ant leurs con­clu­sions juridiques – favor­ables à Trump, car l’absence de preuves d’un crime, après inves­ti­ga­tion, induit un acquit­te­ment automa­tique — dans un fouil­lis anec­do­tique défa­vor­able au Prési­dent, car prop­ice à écras­er Trump sous une avalanche de dénon­ci­a­tions ou de sup­plé­ments d’enquête, en atten­dant la procé­dure d’impeach­ment qui parait main­tenant de plus en plus inévitable, pour deux raisons : l’argent et la survie du « Deep State ». Sur l’argent, une telle procé­dure va rem­plir les caiss­es d’un par­ti démoc­rate frag­men­té et écartelé entre ses anciens et ses mod­ernes. Et surtout cela représente une aubaine pub­lic­i­taire pour CNN (le plus frag­ile), tout comme ABC, MSNBC, & Co, qui ont besoin de ren­forcer leurs taux d’écoute et clics. Quant au deep state, la récente inter­ven­tion publique de Mueller vient à point nom­mé. En relançant indi­recte­ment le thème de l’impeachment, et en don­nant publique­ment une inter­pré­ta­tion diver­gente de celle du Min­istre Barr, il ouvre un con­tre-feu aux ini­tia­tives du Min­istre de la Jus­tice qui por­tent sur les trois enquêtes sur ce qui est main­tenant nom­mé « Spy­gate », ou encore « Intel­gate ».