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Křetínský passe la corde au cou de Libération

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1 janvier 2023

Temps de lecture : 4 minutes
Accueil | Veille médias | Křetínský passe la corde au cou de Libération

Křetínský passe la corde au cou de Libération

Temps de lecture : 4 minutes

Pre­mière dif­fu­sion le 06/10/2022.

Ce titre choc n’est pas de notre fait mais de Médiapart le 23 septembre 2022 qui désosse le « prêt amical » de 14M€ du tycoon tchèque Daniel Křetínský à Libération pour qu’il passe l’hiver au chaud. Visite guidée avec un peu de technique.

Posséder un média pour exister politiquement

Ce n’est pas un secret, ni Bernard Arnault, ou Xavier Niel ou Vin­cent Bol­loré ou Rodolphe Saadé n’investissent dans les médias pour gag­n­er de l’argent. Ils tirent leurs ressources de LVMH, Free, Viven­di ou de l’armement mar­itime. Il en est de même pour Daniel Křetín­ský. Gag­nant des cen­taines de mil­lions d’euros dans le char­bon et le lig­nite devenus aus­si pré­cieux que l’or, il peut se per­me­t­tre quelques emplettes médi­a­tiques pour influ­encer le pou­voir poli­tique : des par­tic­i­pa­tions minori­taires dans Le Monde ou TF1, des rachats directs comme dans Mar­i­anne, Elle, Télé7 jours, Femme actuelle, des créa­tions comme celle de Franc-tireur.

Tout ceci paraît con­stituer un hors d’œuvre. L’entrée dans Libéra­tion mar­que une autre étape, il ren­tre dans la cour des grands, sans oubli­er qu’il a déjà pris des posi­tions dans l’économie clas­sique en prenant des parts dans Casi­no, en s’intéressant à la Fnac ou à M6 quand la chaîne était encore à ven­dre.

Prêt sous conditions

Bien enten­du, offi­cielle­ment Kretinsky est « « heureux de par­ticiper ain­si à la péren­ni­sa­tion d’un jour­nal indépen­dant et indis­pens­able au débat démoc­ra­tique ». Ben voyons, dirait l’autre. La réal­ité est toute autre. Le titre est cha­peauté par une hold­ing de tête (FDPI) à laque­lle il donne 1M€. Fort bien. Mais la hold­ing pos­sède une SAS Presse indépen­dante qui elle-même pos­sède le jour­nal. Kretinsky apporte 14M€ à Presse indépen­dante, un prêt au taux de 4%, rem­boursable en 2026. Et des con­di­tions sous-jacentes sont apportées.

Un prêt libéré par tranches, avec un couperet

Kretinsky pas fou n’apporte pas les 14M€ tout de suite, seule­ment 3,5M€. Ensuite le jour­nal devra démon­tr­er ses pro­grès en ter­mes de rentabil­ité. Mais le jour­nal perd régulière­ment de l’argent, 12M€ en 2020, 8M€ en 2021, entre 6 et 7M€ prob­a­bles en 2022. Les 3,5M€ per­me­t­tront de vivre jusqu’au print­emps 2023, guère plus. Que se passe t’il si le jour­nal n’a pas amélioré ses comptes à cette date ? Le flou demeure. Kretinsky refuse d’aller plus loin ? Altice de Patrick Drahi ne veut plus met­tre au pot. Si le prêt n’est pas rem­boursé en 2026, le taux d’intérêt monte à 10%. Mieux si les délais de non-paiement s’allongent une pénal­ité de 2M€ est prévue. Les aides de l’Etat sont autour de 3M€ en 2019, autour de la même somme (chiffres non pré­cisés) pour 2020 et 2021. Mais ces sub­ven­tions mas­sives reçues par Libéra­tion ne lui ont jamais per­mis de trou­ver un équili­bre. Comme l’écrit Médi­a­part — que nous ne citons pas si sou­vent — « Libéra­tion se retrou­ve la corde au cou, som­mé de trou­ver un équili­bre qu’il n’a jamais su trou­ver depuis des années, en moins de qua­tre ans. »

Confirmation involontaire de Libération

Dov Alfon, ancien des ser­vices de ren­seigne­ment israéliens et directeur de la rédac­tion du quo­ti­di­en, a répon­du dès le 27 sep­tem­bre sous le titre « Médi­a­part aurait-il préféré voir Libé au tri­bunal de com­merce ? ». Une réponse en forme de qua­si aveu. Sans Křetín­ský le jour­nal se serait bien retrou­vé au « tri­bunal de com­merce », en ces­sa­tion de paiement. Daniel Křetín­ský sou­tient Libéra­tion comme la corde (dorée) sou­tient le pen­du. Il laisse la corde un peu lâche, le jour­nal survit tel quel. Il resserre le nœud ou bien le quo­ti­di­en dis­paraît, ou il doit trou­ver un nou­veau mécène ou il tombe dans l’escarcelle de son pré­teur. CQFD ?

Voir aus­si : Libéra­tion, info­gra­phie

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