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Élections en Hongrie : comment Le Figaro prend ses désirs pour des réalités et se prend les pieds dans le tapis

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10 avril 2018

Temps de lecture : 3 minutes
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Élections en Hongrie : comment Le Figaro prend ses désirs pour des réalités et se prend les pieds dans le tapis

Temps de lecture : 3 minutes

Les lecteurs du Monde et du Figaro représentent sans doute des univers différents. Pourtant, sur certains sujets, les deux grands quotidiens nationaux se rejoignent. En particulier sur les sujets de politique étrangère, comme la victoire électorale éclatante de Victor Orbán en Hongrie le 8 avril 2018.

Quand Blaise Gauquelin, envoyé spé­cial du Monde à Budapest, inter­roge un ana­lyste hon­grois (de l’opposition bien sûr), ce dernier explique ain­si la vic­toire d’Orbán « la majorité des électeurs n’a pas accès à toutes les infor­ma­tions pour vot­er. » Sous enten­du, ceux qui ont les bonnes infor­ma­tions (par exem­ple, celles du Monde) votent con­tre Orbán. Les crétins sous-infor­més votent Orbán. Une ver­sion recy­clée pour la cir­con­stance des fake news qui ont per­mis la vic­toire de Trump et celle du brexit.

Pour la Hon­grie, Lau­re Man­dev­ille, envoyée spé­ciale du Figaro à Budapest, est sur la même longueur d’onde que son con­frère du quo­ti­di­en du soir, elle le dépasse même d’une brasse puis­sante et régulière.

Laure Mandeville du Figaro laisse entrevoir la défaite d’Orbán

La mal­heureuse cor­re­spon­dante, dans la pre­mière édi­tion papi­er du Figaro, lais­sait prévoir (avec espoir) la défaite d’Orbán avec le titre : Hon­grie, Orbán perd de sa superbe (titre calqué mot pour mot sur un arti­cle de L’Hu­man­ité ?). Mieux « un fort taux de par­tic­i­pa­tion menaçait de trans­former en revers, voire même en défaite cinglante… son par­ti le Fidesz ». Le reste – pour la décidem­ment malchanceuse jour­nal­iste (sta­giaire peut-être ?) — est de la même eau. Nous citons : autori­tarisme crois­sant, scan­dales de cor­rup­tion, cam­pagne très manichéenne, exas­péra­tion crois­sante de la pop­u­la­tion qui n’aime pas les men­songes. Bien enten­du une forte par­tic­i­pa­tion pou­vait per­me­t­tre d’augurer d’une vic­toire de l’opposition « si la par­tic­i­pa­tion devait attein­dre 70% un éventuel bas­cule­ment pour­rait même se pro­duire, ce qui serait un trem­ble­ment de terre poli­tique » Fin de citation.

Les électeurs hongrois ont voté : retour au réel

Las, la par­tic­i­pa­tion est supérieure à 69% (en hausse de 7 points), Orbán obtient près de la moitié des voix (imag­i­nons un par­ti en France qui raflerait 50% des suf­frages…), pro­gresse de qua­tre points par rap­port aux élec­tions précé­dentes et obtient les 2/3 des sièges.

La dernière édi­tion papi­er tente de rat­trap­er la boulette en titrant Un troisième man­dat pour Orbán. Mais le sous-titre s’emmêle tout de suite les pinceaux. « Mal­gré une mobil­i­sa­tion his­torique de près de 70% qui avait poussé l’opposition à espér­er une per­cée, le pre­mier min­istre est recon­duit con­fort­able­ment ». Il n’est pas néces­saire d’être un expert en inter­pré­ta­tion des chiffres élec­toraux pour com­pren­dre le con­traire : Orbán n’a pas gag­né mal­gré la par­tic­i­pa­tion mas­sive mais grâce à celle-ci. C’est la par­tic­i­pa­tion élec­torale mas­sive qui a per­mis la vic­toire d’Orbán. Mais ne tirons pas sur une ambu­lance déjà en bien mau­vais état.

La lec­ture de la pre­mière édi­tion (mod­i­fiée en urgence ensuite sur la dernière édi­tion papi­er et sur le web) laisse une étrange impres­sion : s’agit il d’un pois­son d’avril à retarde­ment ? D’un arti­cle humoris­tique sous forme de pas­tiche reprenant les pon­cifs lus habituelle­ment sur la Hon­grie ? D’un aveu­gle­ment à car­ac­tère com­pul­sif ? Ou bien d’une incom­pé­tence si remar­quable qu’elle devient un cas d’école pour les étu­di­ants en jour­nal­isme ? Nous lais­sons nos aimables lecteurs trancher.