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Accueil | Portraits | Prune Antoine

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6 mars 2020

Temps de lecture : 12 minutes

6 mars 2020

Accueil | Portraits | Prune Antoine

Prune Antoine

Temps de lecture : 12 minutes

Quand les « Xennials » prennent la plume

Née en 1981 à Épinal, Prune Antoine est journaliste d’investigation. Également auteur, elle se fait le porte-voix de la génération des femmes post-68.

La jour­nal­iste naît à Epinal en 1981. Elle est la mère d’une petite fille depuis 2019.

Jour­nal­iste d’investigation indépen­dante, elle est spé­cial­isée dans les pays européens de l’Est et de l’ancienne URSS. Elle réside au cours de sa vie dans de nom­breux pays européens – France, Hon­grie, Espagne et Angleterre, pour finale­ment se fix­er à Berlin. Elle dresse sur son blog www.plumaberlin.com un por­trait sans con­ces­sions de sa ville d’adoption. Elle n’écrit par con­tre qu’en français.

Jour­nal­iste mul­ti­primée, elle pub­lie dans de nom­breux jour­naux et mag­a­zines, par­mi lesquels Géo, L’Obs, Médi­a­part, M le mag­a­zine du Monde, XXI, Rue89, Madame Figaro ou encore Elle et Grazia.

Elle est égale­ment auteur avec deux ouvrages fort bien accueil­lis par la cri­tique, La Fille et le moud­jahi­dine, et L’heure d’été. Dans le sec­ond, un roman cette fois, elle évoque le quo­ti­di­en et les inter­ro­ga­tions des femmes de sa généra­tion, obsédée par la lib­erté et sa pro­pre indépendance.

Formation

Prune Antoine sort diplômée en 2003 d’un mas­ter de droit inter­na­tion­al et de sci­ence poli­tique de l’université de Nancy.

Parcours professionnel

Après ses études et de nom­breux voy­ages, Prune Antoine s’installe un temps à Paris où elle se lance dans le jour­nal­isme grâce à plusieurs stages.

En 2005, elle obtient son pre­mier emploi en tant que rédac­trice en chef de la ver­sion française chez Cafeba­bel, un mag­a­zine par­tic­i­patif en ligne écrit en six langues « par et pour les jeunes en Europe ». Le poste répond au sen­ti­ment de la jour­nal­iste d’être européenne avant tout et son intérêt pour l’Europe post-sovié­tique. On trou­ve tou­jours en ligne quelques arti­cles de la jour­nal­iste datant de 2013 : « Aube dorée : le dia­ble porte un chapelet » sur le leader du par­ti poli­tique grec, « Koso­vo : dépouille et d’os », sur les per­son­nes tou­jours portées dis­parues depuis la guerre du Koso­vo, et « Sila Şahin, actrice : “la reli­gion est une ques­tion irra­tionnelle” », une inter­view de l’actrice alle­mande d’origine turque musul­mane qui avait choqué sa com­mu­nauté en posant nue en une de Playboy.

Ses enquêtes s’intéressent en pri­or­ité au monde post-sovié­tique : elle analyse dans les anciens pays mem­bres de l’URSS les con­séquences de l’effondrement du bloc sovié­tique, les con­flits poli­tiques et mil­i­taires actuels, et leur impact sur les femmes.

En 2004, elle mène une enquête sur la jeunesse polon­aise livrée à elle-même suite à l’entrée de la Pologne dans l’Union Européenne, à cause de l’émigration de nom­breux par­ents vers l’Angleterre et l’Irlande. Le reportage est pub­lié en 2009 sur Médi­a­part. Il lui vaut une pre­mière récom­pense pour son tra­vail d’investigation, le prix Louise-Weiss.

En 2008, elle quitte Paris pour Berlin, amoureuse d’un alle­mand. Elle y réside depuis et pub­lie son regard sur la cap­i­tale alle­mande et la jeunesse qui y réside sur son blog www.plumaberlin.com.

En 2009, elle s’intéresse aux armes chim­iques et con­ven­tion­nelles immergées par les Alliés en 1945 en mer Bal­tique. Le reportage, inti­t­ulé « Une poudrière sous la Bal­tique », est pub­lié dans le mag­a­zine Géo en 2014 et obtient en 2015 le prix Eco-Reportages.

En 2011, elle signe un reportage pub­lié dans M, le mag­a­zine du Monde et dans Elle sur les femmes vio­lées durant la guerre en Bosnie.

En 2012, elle par­ticipe au reportage de Lil­iane Thomas sur l’opposition fémi­nine à Vladimir Pou­tine avec « 24H avec les (autres) Pussy Riot ».

En 2013, elle ren­con­tre à Berlin un jeune immi­gré de 20 ans avec lequel elle noue une ami­tié. Elle décide avec son accord de suiv­re son par­cours, entre ten­ta­tives d’intégration et ten­ta­tion de la rad­i­cal­i­sa­tion. Leurs échanges don­nent lieu au pre­mier ouvrage de Prune Antoine, La fille et le moud­jahi­dine, pub­lié en 2015 aux édi­tions Car­nets nord.

En 2014, elle signe un reportage en douze chapitres dif­fusés sur Cafeba­bel sur les trafics d’organes au Koso­vo. Son tra­vail d’enquête lui vaut un sec­ond prix Louise-Weiss.

Entre 2011 et 2014, elle signe quelques reportages dans Le Figaro Madame sur les femmes européennes ; « Les Polon­ais­es sont les femmes les plus entre­prenantes d’Europe », le 8 décem­bre 2014, ou encore « À Berlin, les filles dopent la Sil­i­con Allee », le 21 octo­bre 2013).

En 2016, elle pub­lie sur Médi­a­part « Bruits de la guerre en plein cœur de l’Europe », une enquête sur la re-mil­i­tari­sa­tion de Kaliningrad.

Elle tra­vaille actuelle­ment pour L’Obs, dont elle est cor­re­spon­dante à Berlin depuis son instal­la­tion dans la cap­i­tale alle­mande en 2008, et pour la chaîne de télévi­sion fran­co-alle­mande Arte pour l’émission « Karambolage ».

En 2019, elle pub­lie son deux­ième ouvrage, L’Heure d’été, aux édi­tions Anne Car­rière qui suit l’histoire amoureuse de Vio­lette, pigiste trente­naire et Mir, pho­tographe alle­mand, à Berlin. Le sujet comme la plume acerbe de l’auteur fait écho aux arti­cles qu’elle pub­lie sur Welove­words qui évo­quent avec légèreté les ren­con­tres et l’intimité amoureuse de l’auteur et de ses con­tem­po­rains à Berlin.

Parcours militant

La jour­nal­iste n’a pas d’engagement mil­i­tant à pro­pre­ment par­ler au-delà des opin­ions qu’elle affiche. Elle se définit elle-même dans le descrip­tif de son pre­mier ouvrage, La Fille et le moud­jahi­dine, comme « féministe ».

C’est notam­ment avec cet éclairage par­ti­c­uli­er qu’elle dresse dans son sec­ond ouvrage, L’heure d’été, le por­trait de Vio­lette, jeune trente­naire dont les inter­ro­ga­tions au sujet de la mater­nité et des rela­tions amoureuses font écho à celles d’une génération.

À titre per­son­nel, les répons­es de la jour­nal­iste à ces inter­ro­ga­tions sont claires. Dans une inter­view accordée à Green and the City et pub­liée en mars 2019, elle présente la con­géla­tion d’ovocytes comme une révo­lu­tion poten­tielle d’une aus­si grande ampleur que la pilule pour les femmes. Elle lui appa­raît comme la pos­si­bil­ité pour les femmes de con­cili­er tra­vail et indépen­dance, et désir de mater­nité tardif. Elle signe d’ailleurs dans Grazia un arti­cle sur le sujet dès octo­bre 2014, « Gel­er ses ovo­cytes pour ne pas gel­er sa carrière ».

Dans la même inter­view, elle plaide pour « un droit à l’avortement uni­versel, dans toute l’Europe » face aux dif­férences de lég­is­la­tion entre les dif­férents pays du con­ti­nent. « Des Alle­man­des vont se ren­dre en Pologne pour se faire insémin­er et des Polon­ais­es vont en Alle­magne pour se faire avorter… C’est com­plète­ment ubuesque. »

Elle par­ticipe en 2018 au pro­jet fémin­iste Sis­ters of Europe, plate­forme en faveur de l’« empow­er­ment » des femmes et visant à faire des propo­si­tions con­crètes au Par­lement Européen sur les ques­tions féminines.

Collaborations

En 2018, Prune Antoine par­ticipe en tant que rédac­trice en chef au pro­jet fémin­iste Sis­ters of Europe. Le pro­jet, mon­té avec Eli­na Makri, jour­nal­iste indépen­dante grecque cherche à rassem­bler à tra­vers toutes l’Europe des femmes autour de trois objec­tifs, édi­to­r­i­al, publique et poli­tique. La plate­forme du pro­jet pro­pose des inter­views de femmes inspi­rantes de tous les pays d’Europe. Le regroupe­ment cherche égale­ment à lancer le débat sur les ques­tions féminines en Europe. Par con­séquent, le mou­ve­ment souhaite égale­ment être une force de lob­by­ing, avec des propo­si­tions con­crètes sur ces ques­tions au niveau européen.

Publications

En 2015, Prune Antoine pub­lie aux édi­tions Car­net Nord La Fille et le moud­jahi­dine, soit l’histoire d’une ami­tié entre une fémin­iste et un appren­ti salafiste. L’ouvrage n’est pas un roman puisqu’il se base sur une expéri­ence vécue, celle de l’auteur, Prune Antoine, qui ren­con­tre durant l’été 2013 alors qu’elle bronze seins nus au bord d’un lac Dja­har, un jeune homme deman­deur d’asile dont la famille a fui le Cau­case. Le jeune homme devient au fil du réc­it – et de ses échanges avec la jour­nal­iste – de plus en plus fasciné par le dji­had et la guerre en Syrie, pour laque­lle il songe à par­tir. A tra­vers ce réc­it, la jour­nal­iste explore les dif­fi­cultés d’intégration des jeunes issus de l’immigration en Europe et leur dif­fi­culté à con­cili­er pays d’arrivée et origines.

En 2019, elle pub­lie son sec­ond ouvrage et pre­mier roman, L’Heure d’été, aux édi­tions Anne Car­rière. Le roman arrive final­iste du prix Goncourt du pre­mier roman 2019. À tra­vers l’histoire d’amour de Mir et Vio­lette, Prune Antoine dresse un por­trait de la ville alle­mande et des Xen­ni­als, ceux nés entre 1977 et 1983. L’ouvrage abor­de dif­férents sujets de société au tra­vers de ses per­son­nages, comme les nou­velles tech­nolo­gies, les migrants ou encore le pop­ulisme. Un des sujets clefs du roman est celui de la mater­nité dans le con­texte con­tem­po­rain : avorte­ment, PMA, con­géla­tion d’ovocytes… le lecteur décou­vre les tiraille­ments des femmes con­tem­po­raines, entre désir d’indépendance et désir d’enfant, sur fond d’amours libres pas tou­jours réussies.

Récompenses

Elle obtient grâce à ses reportages deux prix Louise-Weiss, en 2010 dans la caté­gorie Junior, et en 2014 dans la caté­gorie décryptage. Elle obtient égale­ment en 2009 le Young Euro­pean Jour­nal­ist Award et en 2015 le prix Eco-Reportages. Elle avait égale­ment été sélec­tion­née pour l’European Press Prize.

Elle reçoit enfin en 2017 le Prix Chef­fan­jon du Reportage multimédia.

Elle est final­iste du prix Goncourt du pre­mier roman en 2019.

Ce qu’elle gagne

Non con­nu

Elle l’a dit

Sur le jour­nal­isme d’investigation, dans un por­trait que lui con­sacre Le Petit Jour­nal le 16 décem­bre 2015 : « le jour­nal­isme s’ap­prend sur le ter­rain, si tu es curieux et débrouil­lard, il n’y a pas de rai­son pour que ça ne fonc­tionne pas ».

Sur son ouvrage L’heure d’été : « Je suis arrivée à l’âge de 35 ans, en ayant d’énormes inter­ro­ga­tions : Est-ce que je veux avoir un enfant ? Pas d’enfant ? Je pense que cette valse d’hésitations exis­ten­tielles con­cerne de plus en plus de femmes de ma généra­tion. On est dans une palette de choix : on a accès à la con­tra­cep­tion, à l’avortement, aux tech­niques de PMA… […] par rap­port à nos grand-mères et nos arrière-grand-mères, la ques­tion de l’enfant, elle peut vrai­ment se pos­er. Ce n’est pas un truc qui s’impose, c’est pas un truc qui arrive et con­tre lequel on ne peut rien faire, c’est un choix mûre­ment réfléchi. Et comme avec tout choix de vie à faire, il va y avoir une phase de « oui/non », qui peut osciller. Ça, c’était le fil rouge, sur quoi je voulais écrire avant tout.
Après, j’avais envie de par­ler d’une romance mod­erne. J’ai gran­di avec ces his­toires d’amour incroy­ables, où on se promet tout, c’est la folle pas­sion. On ne sait pas ce qu’il se passe après, une fois que le cheva­lier a con­quis sa belle. Et je con­state aujourd’hui que les rela­tions sont hyper compliquées. […]
Ensuite, il y a la ques­tion européenne, qui est une ques­tion impor­tante aujourd’hui, et bien sûr, j’avais envie de par­ler de Berlin, une ville où je vis depuis quand même onze ans, qui m’inspire énor­mé­ment au quo­ti­di­en et dont les trans­for­ma­tions sont absol­u­ment folles
.» dans une inter­view accordée à Green and the City et pub­liée en mars 2019.

Sur ce qu’est devenu Berlin : « je ne peux que con­stater qu’il y a une stan­dard­i­s­a­tion énorme, les gens qui vien­nent à Berlin, par exem­ple, n’ont pas du tout les mêmes pro­fils qu’avant. Et ce qui est très agaçant, c’est ce côté « Berlin trop cool, le Berghain, les soirées ». Les nuits berli­nois­es sont van­tées et sur-ven­dues main­tenant. Mar­ketées. Tout le monde se doit d’avoir été au Berghain, sous amphé­t­a­mines, de dire que c’est génial » dans une inter­view accordée à Green and the City et pub­liée en mars 2019.

Sur la ques­tion de la mater­nité : « Pour moi le bas­tion biologique est le dernier bas­tion vers l’égalité avec les hommes. Les hommes peu­vent s’accomplir, devenir ce qu’ils sont jusqu’à 40–45 ans, à un moment don­né ils ont tou­jours le moyen de rebi­quer, et faire un enfant. Pour les femmes à cet âge, c’est ter­miné, et pour moi c’est une véri­ta­ble injus­tice. » dans une inter­view accordée à Green and the City et pub­liée en mars 2019.

Sur la mater­nité comme fac­teur d’inégalité entre les sex­es, dans dans un arti­cle de Grazia du 30 octo­bre 2014, « Gel­er ses ovo­cytes ou gel­er sa car­rière » : « On peut con­trôler sa fer­til­ité, pas sa fécon­dité. J’ai con­solé trop de copines qui, ayant décidé d’avoir des enfants après 35 ans, se retrou­vaient sur le car­reau. […] L’essor des tech­nolo­gies de la PMA ne fait que mas­quer la cru­elle iné­gal­ité entre les sex­es : à 38 ou 39 ans, une femme belle, intel­li­gente, sportive, arrive au cré­pus­cule de ses capac­ités repro­duc­tives. Les mecs, eux, n’ont même pas à se pos­er la ques­tion. »

Sur la con­géla­tion d’ovocytes, dans un arti­cle de Grazia du 30 octo­bre 2014, « Gel­er ses ovo­cytes ou gel­er sa car­rière » : « À la trentaine, on bas­cule dans ce que les soci­o­logues appel­lent “l’heure de pointe” de la vie. Survient le doute. Les hési­ta­tions. Acide hyaluronique ou auto­bron­zant ? Parce que grandir – ou vieil­lir –, c’est choisir. Celle qui se dit “sere­ine” à 30 ans est folle ou bien elle ment.
Éman­ci­pa­tion ou pas, des décen­nies après Mai-68 et la loi Neuwirth, la trentaine mar­que la date d’expiration de la lib­erté fémi­nine. Le corps, les amis, la famille vous inti­ment de faire des choix
. »

On l’a dit à son sujet

« Elle ne passe pas par qua­tre chemins pour dire ce qu’elle pense » d’après Lud­mi­la Rougeot dans une inter­view accordée à Green and the City et pub­liée en mars 2019.

Sur son pre­mier roman, L’Heure d’été sur Let­tres-it-be, site web de cri­tique lit­téraire : « Par sim­plic­ité, on pour­rait dire qu’il y a du Houelle­becq ou du Despentes chez Prune Antoine. Par facil­ité, on pour­rait se con­tenter de saluer les sail­lies ver­bales, les acid­ités et les réflex­ions bien sen­ties. Par con­ci­sion, on pour­rait féliciter l’auteure pour sa verve et son humour. Mais il y a tout cela à la fois, d’une façon si bien dosée et con­stru­ite qu’il est impos­si­ble de ne pas tomber en admi­ra­tion. Et si le véri­ta­ble hom­mage pour traduire ce plaisir de lec­ture était de recon­naître qu’il y a, tout sim­ple­ment, du Prune Antoine dans ce livre ? »

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