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Visé par un signalement pour apologie du terrorisme, le maire d’extrême gauche de Givors attaque la presse

31 octobre 2023

Temps de lecture : 7 minutes
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Visé par un signalement pour apologie du terrorisme, le maire d’extrême gauche de Givors attaque la presse

Temps de lecture : 7 minutes

Dans notre exercice de critique des médias, il nous arrive aussi de leur attribuer des bons points quand ils le méritent. Lorsqu’un élu exerçant des fonctions à la tête d’une collectivité s’attaque à la presse locale, il y a de fortes chances que celle-ci se soit distinguée, ne serait-ce que ponctuellement, en remplissant le rôle de contre-pouvoir que sont censés jouer les médias. Sans surprise, l’examen précis du cas de Givors n’échappe pas à cette règle. Dans cette commune de 20 000 habitants située au Sud de la métropole de Lyon, et où le maire d’extrême gauche est habitué à un traitement de l’actualité très complaisant à son égard de la part du Progrès, principal quotidien de presse écrite locale, la mise en lumière précise et rigoureuse, par les médias locaux, d’un signalement visant le maire pour apologie du terrorisme a été très mal vécue par le premier édile, qui n’a pas hésité à réagir en s’attaquant directement à la presse.

Un vendredi 13 de mauvais augure pour le maire d’extrême gauche

Lun­di 16 octo­bre, trois arti­cles sont en effet parus dans les prin­ci­pales rédac­tions de la presse locale lyon­naise, à pro­pos d’une actu­al­ité con­cer­nant Mohamed Boud­jella­ba, le maire d’extrême gauche (soutenu par EELV) de la com­mune de Givors. Ce dernier, qui vient d’être con­damné pour vio­lences à qua­tre mois de prison avec sur­sis, a eu à peine le temps d’annoncer son inten­tion de faire appel que le voilà visé par un sig­nale­ment, cette fois pour apolo­gie du ter­ror­isme, trans­mis au pro­cureur par le leader de l’opposition munic­i­pale de Givors, l’élu divers droite (sans éti­quette) Fab­rice Riva, chef du groupe Givors Fière.

Signalement pour apologie du terrorisme, en marge d’un hommage au FLN

Les faits, relatés par les rédac­tions de BFM-Lyon, de Lyon Mag et de Lyon Cap­i­tale sont les suiv­ants : ven­dre­di 13 octo­bre, l’élu d’opposition a trans­mis au Pro­cureur de la République un sig­nale­ment pour apolo­gie du ter­ror­isme visant le maire d’extrême gauche, ain­si qu’une demande d’annulation de la céré­monie dite du « 17 octo­bre 1961 » d’hommage aux vic­times de la répres­sion d’une man­i­fes­ta­tion inter­dite qui fut organ­isée à cette date par le FLN, organ­i­sa­tion ter­ror­iste opposée à l’armée française pen­dant la guerre d’Algérie. Cette céré­monie s’inscrivant dans le con­tin­u­um de la poli­tique mémorielle du maire, suff­isam­ment sin­gulière pour avoir con­duit une pub­li­ca­tion de l’École de guerre économique (EGE) à s’interroger sur l’hypothèse d’une ingérence algéri­enne à Givors, l’élu divers droite a jugé que les cir­con­stances par­ti­c­ulières de l’actualité nationale, inter­na­tionale et locale jus­ti­fi­aient son annulation.

Un Hamas légitimé

Les faits sur lesquels s’appuie le sig­nale­ment au Pro­cureur s’articulent autour d’un com­men­taire affir­mant « la réac­tion du Hamas est légitime » en référence aux attaques ter­ror­istes com­mis­es par le Hamas en Israël le 7 octo­bre. Led­it com­men­taire, qui fig­u­rait sous une pub­li­ca­tion de la page offi­cielle du maire de Givors, est resté vis­i­ble en ligne pen­dant près d’une semaine, jusqu’à ce que la presse révèle le sig­nale­ment au pro­cureur effec­tué par l’opposition munic­i­pale. Par ailleurs, le lende­main de la mise en ligne du com­men­taire délictueux qui était accom­pa­g­né de nom­breux autres com­men­taires réprou­vant la con­damna­tion des atten­tats du Hamas, for­mulée par le maire 48 heures après les faits et sous la pres­sion de son oppo­si­tion, le pre­mier édile pub­li­ait un sec­ond com­mu­niqué prenant la forme d’un rétropé­dalage. Dans cette sec­onde pub­li­ca­tion, le maire d’extrême gauche sem­blait en effet met­tre sur le même plan les attaques ter­ror­istes du Hamas et la réponse ver­bale du gou­verne­ment israélien qual­i­fi­ant d’« ani­maux humains » les ter­ror­istes ayant com­mis ces attaques.

Vers une procédure pénale ?

Les arti­cles des trois pub­li­ca­tions susvisées ont rap­porté avec rigueur l’ensemble des faits évo­qués ici, ain­si que les moti­va­tions soulevées par l’élu d’opposition divers droite pour deman­der l’annulation de la céré­monie du 17 octo­bre, compte tenu du con­texte inter­na­tion­al, du main­tien en ligne d’un com­men­taire d’apologie du ter­ror­isme pen­dant plusieurs jours sur une page Face­book offi­cielle dont le maire a la respon­s­abil­ité juridique, de l’évolution de ses pub­li­ca­tions vers une ligne con­fi­nant à la com­plai­sance avec les posi­tions très hos­tiles à Israël de ses sym­pa­thisants, de l’alignement de sa poli­tique mémorielle locale sur les posi­tions du gou­verne­ment algérien et du sou­tien offi­ciel apporté par ce dernier au Hamas après les attaques ter­ror­istes du 7 octobre.

Une mention pour Lyon Capitale

Une men­tion spé­ciale mérite d’être accordée à Lyon Cap­i­tale qui, par souci d’exhaustivité, a même été jusqu’à pub­li­er l’intégralité du cour­ri­er envoyé par l’élu d’opposition au Préfet, en pièce-jointe duquel fig­ure le sig­nale­ment au Pro­cureur. Ces trois pub­li­ca­tions ont par ailleurs men­tion­né les élé­ments de lan­gage chao­tiques de la com­mu­ni­ca­tion de crise déclenchée par le maire, selon lesquels la mod­éra­tion du com­men­taire délictueux aurait bien eu lieu, mais un « prob­lème tech­nique » aurait main­tenu le com­men­taire visible.

Ces élé­ments de lan­gage sans doute con­stru­its dans la pré­cip­i­ta­tion n’ont vis­i­ble­ment pas tenu compte du fait qu’une telle déc­la­ra­tion com­por­tait un aveu implicite : le maire, puisqu’il aurait vu ce com­men­taire et qu’il aurait demandé sans suc­cès sa mod­éra­tion, se serait du coup ren­du coupable d’un man­que­ment à ses oblig­a­tions, puisqu’il n’aurait pas, dans cette hypothèse, effec­tué le sig­nale­ment au pro­cureur de ce com­men­taire délictueux, comme l’y oblige « sans délai » le sec­ond alinéa de l’article 40 du code de procé­dure pénale.

Le Progrès, en bon dernier de la classe…

Cette mise en lumière com­plète des faits a paru suff­isam­ment insup­port­able au pre­mier édile d’extrême gauche pour que, dans une vidéo ubuesque mise en ligne 24 heures après la paru­tion de ces arti­cles, au milieu d’accusations implicites de racisme con­tre les élus lanceurs d’alerte et de l’annonce d’une « procé­dure bâil­lon », pour repren­dre les ter­mes employé par son opposant Fab­rice Riva dans la réponse apportée à cette vidéo par l’opposition munic­i­pale, le maire s’attaque directe­ment à la presse locale en l’accusant d’avoir relayé l’information qui le con­cer­nait « sans fil­tre ». Pour mesur­er que, par l’expression « sans fil­tre », il fal­lait com­pren­dre « sans filet de cam­ou­flage », il suf­fit de pren­dre con­nais­sance de l’article que Le Pro­grès, par­ti­c­ulière­ment com­plaisant avec le maire d’extrême gauche, s’est enfin décidé à pub­li­er en fin de journée, en bon dernier de la classe, sous la pres­sion con­cur­ren­tielle des autres rédac­tions locales.

Filet de camouflage

Le filet de cam­ou­flage si cher au maire y est soigneuse­ment déployé pour occul­ter au max­i­mum les faits : le titre de l’article se con­tente d’évoquer un sig­nale­ment au pro­cureur effec­tué par l’opposition munic­i­pale sans men­tion­ner que le maire est visé par ce sig­nale­ment, l’élu d’opposition divers droite est présen­té dans le corps du texte comme un élu « ex-RN » alors que, comme il l’expliquait lui-même lors d’un con­seil munic­i­pal, il n’a jamais été mem­bre d’aucun par­ti poli­tique et n’a obtenu l’investiture d’aucun par­ti lors de son élec­tion comme tête de liste divers droite.

Enfin, le quo­ti­di­en de presse régionale accom­plit l’exploit de ne men­tion­ner à aucun moment, dans le corps de l’article, les ter­mes du com­men­taire d’apologie du ter­ror­isme, « la réac­tion du Hamas est légitime », allant même jusqu’à alléguer que ce com­men­taire ne serait apologé­tique que « selon » l’élu d’opposition Fab­rice Riva. Notons qu’une telle appré­ci­a­tion, à pro­pos de ce com­men­taire for­mulé trois jours après une attaque ter­ror­iste effec­tuée par le Hamas et ayant con­duit à la mort de 1400 civils, est elle-même con­sti­tu­tive d’une apolo­gie du ter­ror­isme. En bon dernier de la classe, Le Pro­grès arrive donc ain­si à ériger, par le traite­ment de cette actu­al­ité givor­dine, ses con­frères de BFM Lyon, Lyon Mag et Lyon Cap­i­tale en mod­èles de rigueur jour­nal­is­tique qui leur vaut, à tous trois, une fois n’est pas cou­tume, les félic­i­ta­tions du jury.

Nota bene

Claude Chol­let, directeur de la pub­li­ca­tion de l’Ojim est attaqué par Le Pro­grès et un de ses jour­nal­istes Amjad Allouchi, plainte en cours. L’article ci-dessus n’a aucun rap­port avec cette plainte bur­lesque. Les détails la con­cer­nant ci-après : Pour Claude Chol­let et l’Ojim, un procès chas­se l’autre.

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