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Des municipales en vert : les médias de grand chemin heureux

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30 juin 2020

Temps de lecture : 6 minutes
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Des municipales en vert : les médias de grand chemin heureux

Temps de lecture : 6 minutes

« Poussée écologiste », « vague verte indéniable », « raz-de-marée vert », sourires sur les plateaux de télévision, ton heureux des voix dans les studios de radio : la réussite électorale des verts contente des journalistes dont le mode de vie est le même que celui des élus et électeurs Verts ou LREM. Petite revue de presse d’un Matin Vert.

Dans un con­texte favor­able, avec les propo­si­tions de la con­ven­tion citoyenne sur le cli­mat, des électeurs mobil­isés par des années de pro­pa­gande sco­laire et médi­a­tique, une pandémie mon­di­ale et un record de l’abstention, les écol­o­gistes rouges verts d’Europe Écolo­gie Les Verts sont presque unanime­ment présen­tés par les médias comme ayant gag­né le 2e tour des élec­tions munic­i­pales du 28 juin 2020. Il est vrai qu’EELV prend des villes comme Lyon, sec­onde plus impor­tante métro­pole de France, Stras­bourg, Bor­deaux, Besançon, Poitiers, Tours, Annecy… Une quin­zaine de villes de plus de 30 000 habi­tants sur 260 en réal­ité, ce qui devrait con­duire mal­gré tout à relativiser.

Ce ne fut pas le cas lun­di 29 juin 2020 dans les médias : comme la veille au soir, le vert était partout. Il est vrai que les verts sont par nature partout dans les médias. Par exem­ple, le men­tor actuel d’EELV a pour com­pagne Isabelle Sapor­ta, anci­enne voix impor­tante de RTL. Ce fut l’élection des CSP + des métrop­o­les : un sym­pa­thisant sur deux de LREM est allé vot­er, con­tre… LREM donc.

Sur Fran­ce­in­fo, dimanche soir et lun­di matin, ce fut du vert à tous les étages : « poussée », « raz-de-marée », « vague », « claque don­née à LREM »… Insis­tance très forte sur les lieux sym­bol­iques, comme la ville de Bor­deaux où « l’écologie prend la place d’une droite qui gère la ville depuis 1945 ». Insis­tance tout aus­si forte au sujet de Mar­seille. Marc Fau­velle ne juge pas nor­mal que la can­di­date LR qui n’est pas arrivée en tête en nom­bre de voix soit en sit­u­a­tion de gag­n­er au 3e tour des élec­tions, celui du maire par les con­seillers munic­i­paux. Il s’agit cepen­dant de la règle du jeu, que l’on peut vouloir chang­er mais qui est la sim­ple règle, cette dernière méri­tant sans doute d’être rap­pelée de manière neu­tre par un média tel que Fran­ce­in­fo. Dans la mat­inée du lun­di 29 juin, cer­taines voix invitées ten­tent d’ailleurs de rel­a­tivis­er. Anne Rosencher, par exem­ple, direc­trice de la rédac­tion de L’Express, pour qui le vote écol­o­giste est un vote « séces­sion­niste des csp + », celui des « win­ners de la mon­di­al­i­sa­tion qui veu­lent un cadre de vie agréable, loin de ceux qui ont besoin de la bag­nole ». Plus, sur Fran­ce­in­fo on insiste : « L’union de la gauche passe main­tenant par l’écologie ».

France Inter voit une « défer­lante verte »

France Cul­ture : « Une vague verte inédite en France » 

Le Monde mon­tre son ent­hou­si­asme en con­fi­ant l’analyse du résul­tat vert à Abel Mestre, nor­male­ment spé­cial­iste de l’extrême droite. Le titre : « Munic­i­pales 2020 : une vague verte his­torique défer­le sur les grandes villes français­es ». Les écol­o­gistes devi­en­nent « une force poli­tique de pre­mier plan ». Abel Mestre ne masque pas un cer­tain ent­hou­si­asme : « Car les résul­tats de dimanche rebat­tent les cartes à gauche. Le Par­ti com­mu­niste durable­ment affaib­li par de nom­breuses pertes de bas­tions – Saint-Denis, Aubervil­liers (Seine-Saint-Denis), Choisy-le-Roi, Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne) en ban­lieue parisi­enne, mais aus­si Arles (Bouch­es-du-Rhône) ou encore Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire) – et la qua­si-absence de La France insoumise lors de ce scrutin lais­sent les écol­o­gistes en tête-à-tête avec le Par­ti social­iste. Avec la razz­ia verte, une inver­sion du rap­port de force est en train de se met­tre en place. Les écol­o­gistes devenant la force prin­ci­pale, non pas par le poids de leur appareil, mais en imposant leurs thèmes. ».

L’enthousiasme se veut prophé­tique : « L’élection munic­i­pale de cette année a pu ain­si être une sorte de répéti­tion générale ayant per­mis de tester la for­mule gag­nante puisque les Verts ont été à la tête de nom­breuses coali­tions, le PS accep­tant de se retrou­ver der­rière EELV. Un tel sché­ma pour­rait très facile­ment se déclin­er lors de la prési­den­tielle de 2022 avec un can­di­dat écol­o­giste soutenu par le PS. »

D’ailleurs, dans Le Figaro cette dernière idée est affir­mée par Olivi­er Fau­re, le 1er secré­taire du PS.

L’autre titre impor­tant sur le sujet dans le quo­ti­di­en : « Munic­i­pales : Mar­seille, Lyon, Bor­deaux, Stras­bourg… Ces grandes villes où les écol­o­gistes l’ont emporté. Porté par une impres­sion­nante vague verte, EELV revendique de nom­breuses vic­toires au soir du sec­ond tour. »

Dans Le Parisien, « La France se met aux verts ».

Les Dernières Nou­velles d’Alsace voient une « défer­lante ».

Le JDD : « Vague verte, béréz­i­na pour LREM, sta­bil­ité de la droite »

L’Humanité retrou­ve des couleurs : « EELV. La vague verte et pastèque défer­le sur les plus grandes aggloméra­tions. Le jour­nal com­mu­niste con­sid­ère que cela va « mod­i­fi­er le paysage politique ». 

Pour L’Opinion : « la « vague verte » a défer­lé au-delà des espoirs d’EELV »

Libéra­tion : « Vague éco­lo : c’est ce soir que tout commence »

La Croix : « Vague verte et raz-de-marée abstentionniste »

20 Min­utes : « Les grandes villes passent au vert »

Dans Mar­i­anne, « Des maires verts poussent partout en France ».

Pour L’Obs, ce fut une « vague verte », « his­torique », « Une vague verte sans précé­dent », « Une rafle ».

Pour LCI : « Une marée verte » sur les métropoles.

Sur CNews, c’est d’un « tri­om­phe » dont il s’agit. Et même d’un tri­om­phe qui « met Emmanuel Macron au défi ». 

Sur France 24 : « Munic­i­pales 2020 : après la vague verte, le retour de la gauche au pre­mier plan ? »

BFM : « La vague verte défer­le sur les municipales »

Plus rarement, un peu moins d’enthousiasme :

Valeurs Actuelles : « Les écol­o­gistes se dis­tinguent, LREM s’effondre ».

Chal­lenges : « Munic­i­pales : Bor­deaux, Mar­seille, Lyon, ces grandes villes tombées dans l’escar­celle des écol­o­gistes ».

Europe 1 : « La per­cée verte, un cer­tain boule­verse­ment politique »

Présent : un arti­cle incisif, « Les Verts Rouges s’installent à l’échelle locale »

Dans l’ensemble, la cou­ver­ture est mas­sive, alors qu’EELV n’a gag­né au fond qu’une quin­zaine de villes, dont cer­taines lui sont idéologique­ment acquis­es pour des raisons soci­ologiques (les grandes métrop­o­les) et dans un con­texte très favor­able, entre édu­ca­tion verte à l’école et « panique » mon­di­ale devant le coronavirus.

La cou­ver­ture est aus­si glob­ale­ment joyeuse tant il appa­raît évi­dent que nom­bre de jour­nal­istes des médias con­venus se recon­nais­sent dans le courant vert rouge. Peut-être aus­si dans la dizaine de pre­miers élus obtenus par le Par­ti ani­mal­iste dans les con­seils munic­i­paux d’une dizaine de villes.

Du coup, les autres élé­ments impor­tants de la soirée élec­torale, s’ils sont indiqués, le sont de façon secondaire :

  • L’importance record du taux d’abstention, et surtout son rôle dans les vic­toires vertes
  • Le relatif main­tien du poids du RN, et l’importance de sa vic­toire à Per­pig­nan, mais aus­si à Moissac, petite ville de 13000 habi­tants qui est recon­nue par Israël pour avoir des « Justes », ayant entre autres caché les Cohn-Ben­dit durant la 2e Guerre Mon­di­ale. Fran­ce­in­fo a ten­té de savoir si le nou­veau maire se sen­tait « dédi­a­bolisé » en gag­nant une com­mune mar­quée comme n’étant pas d’extrême droite. Ce dernier a sim­ple­ment répon­du qu’il allait don­ner une recon­nais­sance véri­ta­ble aux Justes et qu’il n’est pas un « dia­ble ».
  • Le poids accru des écol­o­gistes se fait dans un cadre plus large d’un retour des soci­aux-démoc­rates de gauche. Une joie à cette idée perce dans la voix de la majeure par­tie des com­men­ta­teurs médiatiques.