Les médias ont toujours vu d’un mauvais œil la « richesse » de l’Église, avec ses églises, ses dorures, son architecture, son patrimoine issu de deux mille ans d’existence. Avec le pape François, ils ont un pape pauvre, qui s’est en plus attaché à dégraisser l’Église, les médias dominants en produisent une hagiographie.
Le pape François, aux antipodes de ses prédécesseurs
20 Minutes semble ravi de dépeindre un pape François amoureux d’une vie austère supposément boudée par ses prédécesseurs. Il précise ainsi que « à chaque cadeau perçu, le pape François avait décidé de le revendre », reversant les sommes à des associations, alors que « son prédécesseur Benoît XVI avait quant à lui perçu près de cinq millions d’euros de droits d’auteur pour son ouvrage Jésus de Nazareth ».
Désireux de vivre selon son vœu de pauvreté, le pape François était d’une certaine façon le mouton noir du Vatican. Le Monde insiste sur ce point, et explique que « il détestait le Vatican, ses ors, son faste, son étalage invraisemblable de richesses. Il n’aimait guère non plus ce que l’Église avait fait de ses prélats, des mondains carriéristes coupés de la vie et des gens. Sans parler des scandales financiers et sexuels rangés sous les lourds tapis du Saint-Siège. » Il précise également que le pape François a poussé l’humilité jusque dans la pratique de son ministère : « abbé, il le resta, même au Vatican, où il célébrait chaque matin la messe dans une petite chapelle. »
Est-ce à dire que les papes précédents ne célébraient pas la messe tous les jours ? C’est peu probable. Qu’ils la célébraient, par orgueil, dans des lieux trop imposants ? Les médias peuvent tout imaginer, attendu que Le Monde explique également que l’élection du pape François « n’était pas l’accomplissement d’une ambition personnelle ». Comme s’ils étaient nombreux, les cardinaux qui rêvent de tiare blanche et organisent leur sacerdoce dans le but d’être pape un jour.
Voyez comme il est pauvre
L’un des sujets qui passionne les médias, dont la plupart perçoivent des subventions assez généreuses, c’est le salaire du pape et de ses cardinaux. Ainsi, 20 Minutes affirme que « Le Saint Père a passé une vie loin de toute fortune et dédiée aux plus fragiles », et qu’il « avait choisi le nom de François en hommage à Saint-François d’Assise et sa volonté d’aider les plus pauvres. » Il précise que le pape François était « issu d’un milieu très modeste » et que « cet homme profondément simple et humain n’a d’ailleurs jamais cherché à s’enrichir au cours de son pontificat. » Alors combien gagne le pape ? Rien, finit par lâcher 20 Minutes, comme ses prédécesseurs. Le pape ne perçoit aucun salaire, qu’il soit le pape François désireux d’aider les plus pauvres ou un autre.
20 Minutes précisera cependant que « le très riche Vatican » prend en charge l’ensemble du traitement des papes, et qu’il les traite manifestement bien puisque « Jorge Mario Bergoglio avait, à sa nomination, décidé de s’établir dans la résidence Sainte-Marthe, jugeant le grand appartement pontifical du troisième étage trop spacieux. » Les papes ne sont certes pas payés, mais ils mènent grande vie pour autant, semble insinuer 20 Minutes. Rejoint sur cette ligne par Capital, qui explique que « le pape François a pris des mesures d’austérité visant à réduire le déficit budgétaire du Vatican. Parmi elles, la baisse de la rémunération des cardinaux. »
Avec le pape François, l’Église au service des pauvres
L’Église est au service des pauvres, elle se doit donc de l’être. L’antienne est connue, mais elle est rechantée à l’envi. Le Point explique que le pape François était « le pape au mode de vie le plus simple de l’Histoire. » Il rappelle d’abord que « le temps où le pape se déplaçait, pour ses apparitions publiques, en sedia gestatoria (chaise à porteurs) n’est pas si lointain », et concède que la disparition de cet usage est due à Jean-Paul II. Cependant, « le pape François va plus loin dans l’innovation, en rompant avec les pompes et dorures ecclésiastiques. »
La simplicité est pourtant un but poursuivi par de nombreux papes depuis plus d’un siècle. Au début, les prêtres étaient instruits, et les évêques l’étaient donc encore plus. L’instruction allant de pair avec la noblesse en ces temps, on arrivait à des cardinaux issus des hautes sphères de la société. Habitués à un niveau de vie élevé, ils le reproduisaient au Vatican. Le pape François est cependant bien loin d’être le premier à aimer et rechercher la pauvreté. Pie X, à l’aube de la Première guerre mondiale, faisait l’étonnement de tous en mangeant de la polenta, plat populaire italien à base de semoule, plutôt que les mets raffinés qu’on lui proposait. L’Express rapporte que « comme Benoît XVI et Jean-Paul II avant lui, le pape François a apporté des ajustements au rituel imaginé et expérimenté par Paul VI en 1978. » La simplicité est donc cherchée depuis plusieurs décennies, et elle n’est pas l’apanage des papes qui ont l’heur de plaire aux médias.
Un pape simple
Le Point ajoute que dans la résidence Sainte-Marthe, le pape François « prend ses repas dans la salle commune, au vu de tous les visiteurs de passage ». Le pape François était ainsi un pape simple, qui « téléphone lui-même à ses interlocuteurs », et dénonce le train de vie et les mondanités de la Curie. Il « impose le tutoiement, à la latino, et termine inexorablement ses entretiens par un humble « priez pour moi ». » Cette demande de prière marque beaucoup les journalistes, qui en font état dans d’autres titre, notamment RFI, qui cite des habitants de Gaza. « Vous vous rendez compte ? Le pape François nous demandait de prier pour lui. » La demande n’est pourtant pas étonnante, et elle est même canonique. Chaque dimanche, à la messe, tous les fidèles prient pour le pape.
Émerveillés par la simplicité du pape François, les médias continuent à étaler ces détails qui l’ont montrée. Il utilisait une petite Fiat pour ses déplacements, et faisait même ses courses dans des magasins en ville. Détail majeur pour les médias du monde libéral libertaire : le premier déplacement de François après sa nomination fut pour Lampedusa, île accablée par l’immigration massive. Pour le Huffington Post, c’est là une destination « très symboliquement choisie ». Et le média d’embrayer sur Marion Maréchal qui « s’était autorisée dix ans plus tard une opération de com’. » Quant à savoir ce qui différencie le symbole de la com’, c’est probablement la couleur politique.