CNN en crise, Warner Bros. Discovery se scinde en deux entités

Le géant des médias Warn­er Bros. Dis­cov­ery va se divis­er, à hori­zon mi-2026, en deux sociétés dis­tinctes, l’une en charge des chaînes de télévi­sion, l’autre des ser­vices de stream­ing, des stu­dios de ciné­ma et des parcs à thème. L’annonce a été offi­cial­isée le 9 juin. Cette stratégie se veut une réponse aux pertes d’audience subies par les chaînes de télévi­sion du groupe et notam­ment celle qui fut longtemps son fleu­ron : CNN.

Deux sociétés, deux dynamiques différentes : streaming en expansion, télévision en berne

Si les régu­la­teurs améri­cains vali­dent l’opération, une pre­mière société, appelée Stream­ing & Stu­dios, assur­era la ges­tion de Stream­ing Max, rebap­tisé HBO Max, des stu­dios de pro­duc­tion de télévi­sion et de ciné­ma, et égale­ment des parcs à thème.

D’autre part, une sec­onde société, Glob­al Net­works, aura la charge des chaînes de télévi­sion du groupe, en par­ti­c­uli­er le canal d’information en con­tinu CNN, la sta­tion sportive TNT et Dis­cov­ery, spé­cial­isée dans la nature et l’aventure. Les deux sociétés seront cotées en Bourse. La val­ori­sa­tion bour­sière du groupe Warn­er Bros. Dis­cov­ery (WBD) est actuelle­ment de 24,74 mil­liards de dollars.

Les deux sociétés ne seront pas portées par les mêmes dynamiques, car si les activ­ités de stream­ing se dévelop­pent de façon presque expo­nen­tielle, les chaînes de télévi­sion « tra­di­tion­nelles », elles, sont en grande dif­fi­culté, leur audi­ence bais­sant régulière­ment, notam­ment par la con­trac­tion du marché des abon­nements au câble, en crise depuis plusieurs années. Ain­si, le nom­bre d’abonnés payants au câble aux États-Unis est passé de 105 mil­lions en 2010 à 66 mil­lions en 2024 (- 37 %). Sur la même péri­ode, les audi­ences de CNN ont chuté de 15 %, se situ­ant aujourd’hui autour de 500 000 téléspec­ta­teurs en moyenne par jour.

« Trump m’a tuer… »

Out­re les dif­fi­cultés à s’adapter à la con­cur­rence des nou­veaux sup­ports d’information, CNN souf­fre aus­si de son posi­tion­nement poli­tique « cen­tro-pro­gres­siste ». En effet, la chaîne a été large­ment cri­tiquée, notam­ment par Don­ald Trump et son entourage, pour une cou­ver­ture jugée biaisée de l’actualité poli­tique et élec­torale. « CNN est une honte fraud­uleuse en tant que réseau de télévi­sion, et leur audi­ence inter­na­tionale est un désas­tre total ! Les lead­ers étrangers me deman­dent : « Pourquoi les médias détes­tent-ils votre pays à ce point ? » avait notam­ment déclaré, en 2019, l’actuel prési­dent améri­cain. De nom­breux téléspec­ta­teurs se sont alors détournés d’une chaîne qu’ils ne jugeaient plus « objective ».

Voir aus­si : Pro­pa­gande anti-Trump et pro-BLM : un directeur de CNN passe aux aveux (en caméra cachée)

Par ailleurs, la polar­i­sa­tion poli­tique aux États-Unis, par­ti­c­ulière­ment mar­quée depuis l’élec­tion de 2016, a con­duit une part con­sid­érable des téléspec­ta­teurs à se tourn­er vers des chaînes au posi­tion­nement idéologique plus mar­qué, comme Fox News (con­ser­va­teur) ou MSNBC (pro­gres­siste).

Flexibilité stratégique et managériale

Pour ten­ter de redress­er la barre, dans un con­texte d’endettement lourd du groupe (38 mil­liards de dol­lars depuis la fusion de 2022 entre Warn­er Media et Dis­cov­ery), les dirigeants comptent donc sur cette « scis­sion » afin de redy­namiser leurs activ­ités, en don­nant à chaque entité une flex­i­bil­ité accrue pour répon­dre aux attentes spé­ci­fiques de leurs marchés respectifs.

Cette stratégie vise égale­ment à max­imiser la créa­tion de valeur pour les action­naires en isolant les act­ifs renta­bles des activ­ités moins per­for­mantes. Une déci­sion vis­i­ble­ment bien accueil­lie par les milieux financiers, l’action WBD ayant bon­di de 10 % depuis l’annonce de la partition.

Xavier Eman