Les Bobards d’Or, XIVèmes du nom ont été remis le 13 février 2023 à Paris. Comme nous n’y assistions pas, nous nous permettons d’emprunter à notre confrère Boulevard Voltaire la plume virevoltante de François Bousquet, rédacteur en chef de la revue Éléments et gérant de la Nouvelle Librairie. Certains intertitres sont de notre rédaction.
Un festival, mieux qu’à Cannes
Les Bobards d’Or, c’est un peu les anti-Sept d’or — la longévité en plus. La quatorzième cérémonie a tenu toutes ses promesses. Beaucoup de monde, des nominés vraiment affreux, des lauréats encore plus épouvantables. Bref, une distribution royale. Comme elle n’était pas diffusée sur France Télévisions, mieux valait être sur place. À la baguette, Jean-Yves Le Gallou, homme-orchestre, assisté pour l’occasion par le youtubeur Greg Talibian, l’Arménien le plus drôle de France ; Valentin Schirmer, jeune pousse de la matinale de Radio Courtoisie ; Martial Bild, directeur de TV Libertés ; et Michel Geoffroy, plume de la fondation Polémia, organisatrice de l’événement.
La tradition des tranchées
Les Bobards d’Or renouent avec une tradition née dans les tranchées, celle des bombes et bobards de guerre. La tradition était perdue, pas les bobards qui l’avaient vu naître. Il importait de la ressusciter, tant le pilonnage médiatique est plus fourni qu’au Chemin des Dames. Fondez une Société des honnêtes gens, disait le philosophe Alain, tous les voleurs en seront. Décrétez pareillement la liberté de la presse, vous verrez affluer tous les censeurs.
Le miroir déformant de certains journalistes
Je me suis toujours demandé, étant moi-même journaliste, comment certains de mes confrères – hypocrite lecteur, mon semblable, mon confrère – pouvaient se regarder dans une glace. C’est qu’il n’y a pas de glace, rien qu’un miroir déformant. Des neurologues ont, du reste, montré que l’accoutumance aux mensonges est scientifiquement attesté (les études ne portaient pourtant pas sur des journalistes). La répétition accroît les comportements malhonnêtes. C’est la mission des Bobards d’Or de les épingler.
Le bobard faux missile russe
Curieusement, les récipiendaires ne se pressent pas pour venir récupérer leur prix. On leur remet donc par contumace, comme à des délinquants en fuite, une petite statuette aux traits de Pinocchio. Quand Pinocchio ment, son nez s’allonge comme une flûte au milieu du visage. Ce qui n’est pas le cas des scribouillards sévissant dans les médias centraux. Eux sont les flûtistes. C’est, du reste, en leur qualité de joueurs de pipeau qu’ils sont distingués.
Vox populi, vox Dei. Le public a choisi de couronner, parmi la dizaine de bobards sélectionnés par le jury, trois d’entre eux.
Le Bobard d’or revient à France 2 qui, en son JT du 10 août 2022, a fâcheusement confondu une cheminée au tubage branlant avec un missile russe qui n’aurait pas explosé, le tout près de la centrale de Zaporijia. Mais le tubage était un trucage. « À ce compte-là, s’est amusé Martial Bild, le château de Chambord avec ses 282 cheminées est une base de lance-missiles. » Certes vétuste, mais indémodable.
Un bobard pour l’ensemble de la classe politico-médiatique
Le Bobard d’argent a été décerné à l’ensemble de la classe politico-médiatique pour la non-affaire Grégoire de Fournas et son badin « Qu’ils retournent en Afrique ! » On sait combien l’accusation de racisme est imparable, surtout quand elle est imaginaire. Mais c’est comme si le député RN de la Gironde avait mis l’incendie au Reichstag dans le costume du Ku Klux Klan. Les députés de la NUPES étaient prêts à le couler par grand fond en Méditerranée comme un cuirassé allemand.
Philippe Val bobard Carambar
J’avoue avoir une faiblesse pour le Bobard de bronze signé Philippe Val – il a un tableau de chasse aussi épais que son opportunisme. Les bobards, c’est parfois comme les Carambar™. Il arrive qu’il y ait une blague à l’intérieur, mais qui ne fait pas rire, un peu comme un sketch de Philippe Val. Écoutez bien celui qui lui vaut son prix : « Au début, le SIDA s’est propagé principalement par les routiers, c’est pas de leur faute évidemment, mais ils traversent les frontières. » Pas comme la bêtise, n’est-ce pas. C’est beau comme un poster de Loana dans la cabine d’un 38-tonnes lancé à toute vitesse.
Un Gérald d’or à l’unanimité
Dans sa magnanimité, le jury a remis un « Gérald d’or » à Darmanin pour l’ensemble de son œuvre. En matière de sécurité, Darmanin, c’est le premier flop de France. À côté, le gendarme de Saint-Tropez, c’est la police scientifique ; et le commissaire Navarro, Maigret sans la pipe, sans la pluie et sans la blanquette de veau, comme dirait Gabrielle Cluzel.
L’an prochain sur France Télévisions ?
Question incidente : qui gardera les gardiens ? C’est le grand dilemme de Platon dans sa République. Même chose pour la vérification des faits, qui est aux « démocraties » ce que le Goskontrol était à l’Union soviétique : un dispositif assurant la conformité idéologique. Qui donc « fact-checkera » les fact-checkeurs ? Qu’on me pardonne, mais c’est la désinformation qui empeste le globish, pas moi. Le propre de tous ces anglicismes, c’est de renverser la charge de la preuve : ils dispensent les médias centraux d’avoir à établir la véracité de leurs allégations. Rendons grâce aux Bobards d’Or de s’en charger. C’est mieux qu’un détecteur de mensonges. Inutile de dire qu’on attend la prochaine édition avec impatience. En direct sur France Télévisions ?
François Bousquet
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Source : bvoltaire.fr