La Commission européenne envisagerait une amende de plus d’un milliard de dollars contre X pour non-respect du Digital Services Act.
Cette offensive semble autant viser – pour des raisons surtout politiques — la plateforme que son patron, Elon Musk, dans un climat de tensions transatlantiques.
Une sanction record en préparation
Selon des sources relayées par le New York Times, la Commission européenne finalise une sanction d’envergure contre X, le réseau social d’Elon Musk, accusé de violer le Digital Services Act (DSA). Ce règlement, entré en vigueur en 2022, impose aux plateformes numériques de mieux lutter contre les contenus illégaux et la désinformation. Une amende dépassant le milliard de dollars serait envisagée, accompagnée d’exigences de réformes dans la modération et la transparence de X. La décision, attendue cet été, fait suite à deux enquêtes lancées en 2023, qui reprochent à la plateforme son « laxisme » dans le traitement des contenus et un système de certification (la fameuse coche bleue) jugé trompeur. X, de son côté, conteste vigoureusement. Dans une publication, la plateforme a dénoncé une « atteinte sans précédent à la liberté d’expression », promettant de se battre devant les tribunaux. Cette fermeté reflète la ligne d’Elon Musk, qui n’a jamais hésité à défier les régulations qu’il juge excessives.
Musk, cible des élites européennes
Au-delà des reproches techniques, l’offensive européenne semble s’inscrire dans un contexte plus personnel. Elon Musk, avec son franc-parler et ses prises de position, notamment contre les médias américains qui « gaspillent l’argent des contribuables », s’est attiré les foudres de nombreux dirigeants européens. Son soutien affiché à des partis nationalistes, notamment à l’approche d’élections sensibles, a exacerbé les tensions. Des figures comme Thierry Breton, ex-commissaire européen, ont publiquement critiqué Musk, l’accusant de compromettre la lutte contre la désinformation en quittant le code de pratique volontaire de l’UE en 2023. Cette animosité donne à l’enquête un parfum de règlement de comptes, où la sanction viserait autant l’homme que son entreprise.
Musk, lui, entend se poser en défenseur d’un internet libre face à une régulation perçue comme intrusive. Le DSA, bien que présenté comme un rempart contre les dérives numériques, soulève des questions sur l’équilibre entre contrôle et censure. En ciblant X, l’UE risque d’alimenter le narratif d’une bureaucratie européenne cherchant à museler les voix dissidentes.
Un enjeu géopolitique plus large
L’affaire dépasse le cadre européen. Avec l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, proche de Musk, cette amende pourrait tendre davantage les relations transatlantiques. Des responsables américains, comme le président de la FCC (Commission fédérale des communications), ont déjà critiqué le DSA, le jugeant incompatible avec les valeurs de liberté d’expression. Une escalade n’est pas à exclure, Trump ayant promis de défendre les entreprises américaines face aux « injustices » étrangères. Dans ce contexte, l’UE marche sur un fil : sanctionner X sans provoquer de représailles économiques. Pour X, l’enjeu est aussi économique. La plateforme, fragilisée par une chute des revenus publicitaires depuis son rachat par Musk, pourrait peiner à absorber une telle amende. Cependant, la fusion récente avec xAI, autre entreprise de Musk, pourrait offrir une bouffée d’oxygène. Surtout, l’entrepreneur a prouvé sa capacité à rebondir face aux tempêtes judiciaires et médiatiques.
Cette confrontation entre l’UE et X illustre un choc de visions : celle d’une régulation centralisée (lire censure) face à celle de la liberté numérique. Si l’amende se concrétise, elle marquera un tournant, non seulement pour X, mais pour l’avenir de la gouvernance d’internet. Musk, fidèle à lui-même, ne se laissera pas faire.
Rodolphe Chalamel
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