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<span class="dquo">«</span> J’aurai le scalp d’Ernotte » : le courroux de Rachida Dati contre l’audiovisuel public

22 juin 2025

Temps de lecture : 4 minutes
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« J’aurai le scalp d’Ernotte » : le courroux de Rachida Dati contre l’audiovisuel public

Temps de lecture : 4 minutes

À la suite de la dif­fu­sion d’un « Com­plé­ment d’enquête » à son sujet le jeu­di 5 juin, la min­istre de la Cul­ture Rachi­da Dati serait entrée dans une colère noire con­tre la prési­dente de France Télévi­sions, Del­phine Ernotte, allant jusqu’à deman­der « son scalp », selon Le Canard Enchainé. La ten­sion est pal­pa­ble, dans un con­texte de réforme de l’audiovisuel atti­sant les convoitises. 

La ran­cune est tenace rue de Val­ois. Après la dif­fu­sion d’un Com­plément d’enquête lui étant con­sacré ce jeu­di 5 juin, la min­istre de la Cul­ture Rachi­da Dati n’a pas caché son pro­fond agace­ment à l’encontre du ser­vice pub­lic et de sa prési­dente Del­phine Ernotte. « J’aurais le scalp d’Ernotte avant de quit­ter le min­istère de la Cul­ture ! », aurait-elle lâché auprès de son entourage, selon les révéla­tions de nos con­frères du Canard Enchainé. Sur France 2, l’émission accuse l’ancienne Garde des sceaux d’avoir touché 299 000 €, entre 2010 et 2011, de GDF Suez par le biais de STC Partners.

Un cab­i­net d’avocats qui l’aurait sol­lic­itée pour inter­venir au Par­lement Européen pour le compte du géant français de l’énergie. De quoi énerv­er la proche de Nico­las Sarkozy, déjà mise en exa­m­en depuis 2021 pour « traf­ic d’influence » et « cor­rup­tion ». Pour cause, Rachi­da Dati aurait touché près de 900 000 € d’honoraires d’avocat dans l’affaire de l’ex-PDG de Renault-Nis­san Car­los Ghosn, cam­ou­flant ain­si des activ­ités de lob­by­ing de la part du con­struc­teur automobile.

L’indépendance des rédactions publiques en question

« On veut tou­jours atta­quer ma pro­bité, mon hon­nêteté. Tout ce que j’ai, je l’ai gag­né », se défend la min­istre Les Répub­li­cains sur la mati­nale de Sonia Mabrouk sur CNews et Europe 1 ce mar­di 17 juin. Rachi­da Dati nie toute rémunéra­tion illé­gale par GDF Suez : « Tout ça est déclaré, est très au clair ». Une semaine après la dif­fu­sion du « Com­plé­ment d’enquête », qui a bat­tu des records d’audience (1,2 mil­lions après replay), la min­istre met en cause les méth­odes util­isées par les jour­nal­istes. « C’est totale­ment diffam­a­toire », explique-t-elle, accu­sant France Télévi­sions d’avoir ten­té de faire pres­sion sur cer­tains de ses proches pour obtenir des témoignages à charge.

Pressions sur le service public ?

La défense de la min­istre inter­roge, quand on sait que l’une de ses plus proches con­seil­lères, Emmanuelle Dau­vergnes, aurait con­tac­té à plusieurs repris­es Christophe Tardieu, secré­taire général de France Télévi­sions. « J’ai cru com­pren­dre, via son cab­i­net, que la min­istre n’était pas for­cé­ment très heureuse à l’idée de voir un Com­plé­ment d’Enquête qui lui était con­sacré », iro­nise le col­lègue de Del­phine Ernotte. Des ten­ta­tives de pres­sion du min­istère sur le ser­vice pub­lic ? Le cab­i­net nie toute impli­ca­tion de ce genre.

Mais la men­ace proférée par Rachi­da Dati à l’encontre de la Prési­dente des chaînes nationales pose ques­tion : jusqu’à quel point l’indépendance des rédac­tions publiques peut-elle être garantie ? Et de façon plus large, le paysage audio­vi­suel pub­lic peut-il réelle­ment s’affranchir des con­traintes gou­verne­men­tales s’il est financé par l’État lui-même ? C’est en tout cas ce qu’a man­i­festé France Télévi­sions en dif­fu­sant ce « Com­plé­ment d’Enquête », réveil­lant ain­si l’animosité de la ministre.

Une guerre de « scalp »

Pour­tant, c’était envers une autre respon­s­able de média pub­lic que cette dernière avait mon­tré une hos­til­ité remar­quée : Sibyle Veil, prési­dente de Radio France, avait essuyé quelques attaques de Rachi­da Dati le 7 mai dernier, sur la mati­nale de France Inter. Elle change désor­mais de cible, visant celle qui a été main­tenue à la tête de France Télévi­sions pour un troisième man­dat con­sé­cu­tif. 

Voir aus­si : Del­phine Ernotte recon­duite à la tête de France Télévi­sions : pourquoi la déci­sion de l’ARCOM interroge

Cette polémique inter­vient dans un con­texte ten­du entre le gou­verne­ment et les par­lemen­taires, con­cer­nant la réforme pro­posée par la min­istre de la Cul­ture pour le secteur de l’audiovisuel français public.

Le texte, adop­té en pre­mière lec­ture au Sénat, pro­pose de créer une « hold­ing » qui engloberait France Télévi­sions, Radio France, France Médias Monde et l’I­NA sous une même direc­tion. Depuis mar­di 17 juin, la com­mis­sion des affaires cul­turelles tra­vaille sur une ver­sion qui met­trait enfin d’accord les députés, pour un exa­m­en en séance pub­lic le 30 juin prochain.

Et Rachi­da Dati briguerait logique­ment la tête du groupe après son man­dat min­istériel, face à une Del­phine Ernotte déjà implan­tée dans la struc­ture, chez France Télévi­sions depuis de longues années. Une guerre de « scalp » qui ne ferait donc que commencer.

Voir aus­si : Del­phine Ernotte, portrait

Gersende Bar­rera

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