Reporters sans frontières demande à l’ARCOM de sanctionner CNews pour sa couverture du livre de propagande Une nuit en France consacré au drame de Crépol.
L’ONG impute à la chaîne une « campagne de dénigrement » et une vague de menaces contre les auteurs. La chaîne privée revendique, de son côté, un traitement éditorial critique et contradictoire, relevant du débat public.
L’association RSF affirme que CNews a consacré « au moins 27 émissions » à l’ouvrage Une nuit en France en mars 2025, déclenchant une hausse de messages hostiles en ligne. RSF parle d’« acharnement » et de manquements à l’honnêteté de l’information. L’ONG idéologue et subventionnée met ainsi la pression sur une chaîne déjà sous contrôle accru de l’ARCOM depuis des décisions antérieures.
Voir aussi : RSF, gueule de bois post-Trump et guerre ouverte pour le contrôle de l’information
Une saisine qui confond corrélation et causalité
Le cœur de l’argumentaire de RSF repose sur une corrélation temporelle : dès la première séquence sur CNews, le 17 mars, les tweets hostiles grimpent. Pour RSF, la couverture « à charge » serait le « point de départ » de la haine en ligne. C’est un faisceau d’indices, pas une preuve de causalité. L’ONG retient le volume de séquences, moins le principe de libre critique d’un livre d’enquête en pleine controverse.
Sur X, des relais militants et journalistes amplifient la saisine. Ainsi le très gaucher photoreporter Louis Witter partage l’annonce de RSF, signe que l’amplification ne vient pas que d’un plateau TV. L’écosystème du débat public compte aussi les réseaux sociaux, leurs bulles, leurs mots d’ordre.
Pluralisme éditorial, procédures et précédents
Le pluralisme s’exerce aussi par la critique vigoureuse des thèses d’un livre. Les précédentes condamnations de l’ARCOM sanctionnent des fautes précises : défaut de contradiction, informations inexactes, maîtrise d’antenne. Elles ne condamnent pas la répétition d’un sujet en soi. Les dernières décisions contre CNews portent sur des cas bornés et motivés, pas sur une ligne d’antenne globale. Il appartient au régulateur de dire si, ici, les seuils ont été franchis.
L’offensive de RSF n’est pas inédite : l’ONG avait déjà poussé, en 2024, à un contrôle renforcé du régulateur sur la chaîne. Le Conseil d’État avait alors demandé à l’ARCOM de vérifier le respect des obligations de pluralisme. Autrement dit, le dossier Crépol s’inscrit dans une stratégie contentieuse au long cours alors que des journalistes comme Patrick Cohen et Claude Askolovitch avaient délivré une lecture univoque de ce drame sur des médias publics en défendant implicitement les meurtriers ou en renversant l’accusation.
La ligne de crête pour l’ARCOM
Si l’ARCOM estime qu’il y a manquement (absence de contrepoint, propos outrageants non recadrés), elle peut sanctionner comme elle l’a déjà fait. Mais si elle valide l’idée qu’un volume d’émissions critiques suffit à engager la responsabilité d’un éditeur pour des comportements de tiers en ligne, elle crée un précédent délicat : l’éditeur télé deviendrait, de fait, coresponsable de l’écosystème numérique. Le droit actuel impose de qualifier finement les séquences incriminées, pas d’ériger une présomption générale d’« incitation » à partir d’un compteur d’antenne.
Sur le fond, Crépol est une affaire à haute tension politique. La chaîne a choisi un traitement appuyé, parfois musclé ; le régulateur dira s’il est fautif. Mais l’angle de RSF, très offensif contre un seul éditeur, interroge s’il en est encore besoin sur son impartialité. L’association ne s’était par exemple pas indignée du traitement intensif de l’affaire Nahel par la majorité des médias français.
Loin d’être refermée, l’affaire qui a mené au drame de Crépol demeure l’objet de vifs débats et a été une illustration du déploiement de fausses informations et d’approximations pour tenter de relativiser un crime raciste contre un Français. En août 2025, l’Ojim a justement publié un livre choc sur ce sujet, une contre-enquête disponible pour tous nos donateurs… Pour vous la procurer, vous pouvez donc faire un don ici.
Rodolphe Chalamel


















