Portée par Idriss Sihamedi, ex-président de BarakaCity, Safwa TV, financée à hauteur de 15 millions d’euros, ambitionne de devenir une plateforme francophone qui se veut « pluraliste ». Basée sous juridictions américaine et turque, elle promet des débats ouverts à tous, dès 2025.
Une chaîne musulmane paneuropéenne
Safwa TV, annoncée en 2025 par Idriss Sihamedi, se positionne comme la première chaîne musulmane francophone « paneuropéenne », avec une portée internationale. Basée sous les juridictions américaine et turque, où se trouvent les sièges du Safwa Center, elle émettra depuis Londres, ciblant la France, la Belgique, la Suisse, et inclura une antenne à Gaza et en Palestine avec des journalistes francophones. Financée à 15 millions d’euros par des actionnaires liés à des sociétés d’investissement, la chaîne promet une grille diversifiée : journaux, débats sociétaux et politiques, documentaires, programmes religieux, fictions, et contenus éducatifs pour enfants.
Elle arrive.
إن شاءالله
🫶🏻🫶🏻🫶🏻 pic.twitter.com/mMmuoeGxLs— Safwa TV (@SafwaTV_FR) June 9, 2025
Idriss Sihamedi, un entrepreneur musulman et militant
Fondateur de BarakaCity, une ONG humanitaire musulmane dissoute en 2020 par la France pour « propagande islamiste » et « justification d’actes terroristes », Idriss Sihamedi est une figure militante de l’islam dans le monde francophone. Fiché S et condamné pour cyberharcèlement envers des journalistes comme Zineb El Rhazoui et Zohra Bitan, cet exilé en Turquie incarne une vision salafiste rejetant les concessions démocratiques associées aux Frères musulmans.
Sur X, où il fédère plus de 60 000 abonnés, il présente Safwa TV comme une réponse aux « discours de haine » des médias et politiques, dénonçant, en mai 2025, un « ciblage politique » par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Intégrée au Safwa Center, fondé par le prédicateur mauritanien Mohamed Hassan El Dedew, la chaîne s’inscrit dans une stratégie d’autonomisation communautaire.
Safwa Center et Safwa TV
Le Safwa Center, basé en Mauritanie, promeut l’éducation religieuse, la culture islamique et des actions humanitaires, notamment en Palestine et en Syrie. Safwa TV, projet phare financé à 15 millions d’euros, ambitionne de devenir un média musulman paneuropéen, émettant sous juridictions américaine et turque pour contourner des régulations comme celles de l’Arcom. Malgré son ouverture revendiquée à un public large, le Safwa Center et Sihamedi suscitent des controverses en raison de leurs liens avec BarakaCity et des soupçons d’opacité sur leurs financements, alimentant les débats sur leur influence dans un paysage médiatique européen, particulièrement susceptible concernant certaines ingérences.
Une plateforme communautaire qui se revendique du pluralisme…
Safwa TV se veut un « UFC médiatique francophone », un espace de débat « franc et sans filtre » avec des règles strictes et un arbitrage « neutre ». Elle promet une équipe diversifiée, mêlant journalistes musulmans et non musulmans, ainsi que des présentatrices voilées ou non.
Des figures publiques, musulmanes ou non, pourraient devenir chroniqueurs, tandis que les débats accueilleront toutes sensibilités politiques, de droite comme de gauche. Revendiquant une déontologie respectueuse et une pluralité d’intervenants, la chaîne ambitionne de contrer « l’islamophobie » tout en s’adressant à tous les francophones. En diffusant via le web et des applications, hors contrôle de l’Arcom, elle se garantit a priori une liberté éditoriale.
Un segment médiatique vide
Safwa TV peut tenter d’occuper un segment médiatique vide alors que 4 à 8 millions de personnes en France sont de confession musulmane. Par ailleurs une chaîne comme Al Jazeera ne diffuse pas en français et les chaînes francophone liées au monde arabe ne sont pas musulmanes, à l’image de la chaîne marocaine Medi1 TV : Basée au Maroc, ou d’Al Magharibia et Beur TV qui visent un public maghrébin.
Le lancement, prévu pour 2025 sans date précise, pourrait redessiner et/ou communautariser le paysage médiatique francophone. Safwa TV pourrait aussi ouvrir une nouvelle page judiciaire en matière de contrôle de l’information et ne manquera pas de susciter des débats dans un contexte médiatico-politique très sensible au sujet de l’immigration.
Lorelei Bancharel


















