Nos lecteurs fidèles connaissent bien Ramzi Khiroun, qui avait mis en examen Claude Chollet comme directeur de la publication de l’Observatoire du journalisme (OJIM), puis été débouté. C’est à lui que les juges d’instruction s’intéressent pour des délits de « complicité d’achat de vote », « atteinte à la liberté de vote » et « complicité d’abus de pouvoir » au sein du groupe Lagardère, qu’il a quitté en 2022. En l’absence de jugement, Monsieur Khiroun est présumé innocent.
Ramzi Khiroun contre OJIM
Ramzi Khiroun est l’ancien chauffeur de DSK, alias Dominique Strauss-Kahn. Chauffeur, communiquant et beaucoup plus par la suite. Devenu proche de Stéphane Fouks, il se fait embaucher par Euro RSCG où il travaille très largement au service de DSK, éteignant les incendies qui pourraient nuire à celui que tout désignait comme le prochain Président de la République lors de l’élection de 2012. Il passe ensuite chez Lagardère où il devient membre du comité exécutif et porte-parole. Le magazine GQ le présentait comme un des « 30 hommes les plus influents de France » dans les médias. Il a été décoré de la Légion d’honneur par François Hollande le 19 novembre 2015.
Le 4 mai 2018, nous avions publié un article consacré au segment médias du groupe Lagardère où Monsieur Khiroun était cité de manière adjacente sur quelques lignes. Vous trouverez cet article ici. Sa teneur avait déplu à Monsieur Ramzi Khiroun.
La plainte contre l’OJIM
Notre article du 4 mai 2018 consacré à Arnaud Lagardère s’ouvrait sur une introduction :
« Arnaud Lagardère n’a pas la réputation d’un manager d’exception. Succédant par surprise à son père Jean-Luc Lagardère, décédé en mars 2003 des conséquences malheureuses d’une opération chirurgicale bénigne, il s’est vite séparé de la garde rapprochée de son père. Pour s’en constituer une autre plus proche de certaines méthodes du milieu que d’HEC comme Ramzi Khiroun, exécuteur des basses œuvres de DSK, porte-parole du groupe et figure montante d’Havas ».
Le 9 octobre 2019, le juge d’instruction Émilie Vaudescal transmettait à Claude Chollet, directeur de la publication de l’Ojim, sa mise en examen pour injures publiques à la demande de Monsieur Khiroun.
Audience le 1ᵉʳ avril (sic) 2021
Après une première audience, la plaidoirie est alors fixée (sans rire) au 1ᵉʳ avril 2021. Lors de la seconde audience, notre avocat avait plaidé la nullité pour faute de procédure et demandé l’annulation de la plainte et de la procédure ; il avait été suivi par le tribunal dans son jugement.
Voir aussi : Procès Ramzi Khiroun c/ Ojim : seconde audience, compte-rendu
Départ du groupe Lagardère avec 17 M€
Conseiller spécial, c’est le terme qu’avait employé Arnaud Lagardère en regrettant le départ du groupe de Ramzi Khiroun où il travaillait depuis quinze ans. Ce départ était la conséquence de la prise de contrôle du groupe Lagardère par Bolloré. La somme de 17 M€ (charges comprises) représente une transaction pour finaliser le départ de l’intéressé du Comex du groupe Lagardère.
Au même moment (source : Le Monde), Ramzi Khiroun devenait directeur général de LP12, une filiale du fonds de placement Lagardère Participations qui se situe en-dehors du périmètre de l’OPA. Si les parachutes dorés ne sont pas une nouveauté, ceux représentant une telle somme sont plus que rares. On pourrait l’interpréter comme une sorte de prix du silence, Ramzi Khiroun connaissant tous les dessous du groupe (son expérience chez Dominique Strauss-Khan lui aura servi) comme les aléas de la vie de son ex-patron, publique comme privée.
Un petit tour au Maroc
À la surprise générale Ramzi Khiroun, d’origine algérienne et tunisienne et n’ayant pas d’attaches avec le Maroc, faisait partie de la nombreuse suite du président lors de son voyage d’État fin octobre 2024. En compagnie notamment de BHL, de Jamel Debbouze, de Yassine Belattar fort proche des islamistes, du sieur M’Jid El Guerrab (ancien député et condamné pour violences en 2022), de l’acteur Gérard Darmon et bien d’autres. Signe que cet homme de l’ombre garde un réseau de premier ordre.
Printemps 2025, retour au tribunal
Mis en examen fin 2024, les premières comparutions de l’intéressé débutent au printemps 2025. En cause : le possible « achat de votes » lors d’une assemblée générale du groupe Lagardère le 3 mai 2018. Le fonds souverain du Qatar aurait inversé son vote – de défavorable à Arnaud Lagardère à favorable – au prix de la nomination d’un proche du Qatar au conseil de surveillance du groupe Lagardère, le tout négocié par l’ancien chauffeur de DSK devenu bras droit d’Arnaud Lagardère.
Pour sa défense, Ramzi Khiroun affirme avoir toujours agi sous la direction d’Arnaud Lagardère et sans interférer avec le vote. Il se présente (source : Le Monde) comme « salarié de sa propre société » et déclare « travailler à la conception d’un projet immobilier autour de l’activité sportive de golf au Maroc ». Un malheur n’arrive jamais seul, on prête à Gérard Darmanin l’intention d’interdire la pratique du golf dans les prisons françaises. Pour le Maroc, on ne sait pas.
Claude Lenormand