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Guerre de l’information, changements de récits et haine autorisée

27 juillet 2022

Temps de lecture : 3 minutes
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Guerre de l’information, changements de récits et haine autorisée

Temps de lecture : 3 minutes

Pre­mière dif­fu­sion le 14 mars 2022

« La guerre est une vérité. Elle éclaire d’une lumière crue ceux qui la regar­dent »
Kamel Daoud, écrivain algérien (Le Point, 10 mars 2022)

À titre exceptionnel nous publions un éditorial dans ces temps de guerre — exceptionnelle aussi — de l’information. Non pour prendre parti, mais pour disposer d’un peu de recul au milieu du tintamarre.

1. Vladimir Pou­tine a tué le Covid. Un réc­it a rem­placé l’autre. Le réc­it crimes de guerre a rem­placé le réc­it Covid. Avec le même fond musi­cal et le même refrain : la peur et ses divers­es orchestrations.

2. Le con­flit a tué égale­ment l’élection prési­den­tielle française rem­placée par un roman pho­to dont la dernière image – une réélec­tion tri­om­phale et heureuse – se laisse devin­er de manière de moins en moins subliminale.

3. L’unanimité est tou­jours sus­pecte. Du Monde au Figaro, de Médi­a­part au Point, des radios privées et publiques aux télévi­sons publiques et privées la ritour­nelle est qua­si la même, avec des vari­a­tions de style. Il n’est pas inter­dit de s’en éton­ner. Et même d’en analyser cer­taines caus­es, nous le fer­ons plus au calme.

4. La pro­pa­gande existe des deux côtés.

5. La pro­pa­gande russe est mas­sive à domi­cile, les médias étrangers sont inter­dits et les jour­nal­istes russ­es muselés. Mais ceci en Russie seulement..

6. La pro­pa­gande améri­cano-ukraini­enne est toute aus­si mas­sive à l’ouest, les médias russ­es sont inter­dits. Chez nous et dans toute l’UE.

7. Les russ­es ont renon­cé au soft pow­er de l’information, les seuls com­mu­niqués laconiques sont ceux du com­man­de­ment russe indi­quant les pro­gres­sions mil­i­taires (avec retard bien enten­du et sans doute de manière dou­teuse), le nom­bre de tués et de blessés (avec retard aus­si, même commentaire).

8. Le soft pow­er améri­cain est une arme de guerre. En 1990, le géopoli­togue améri­cain Joseph Samuel Nye l’avait théorisé dans un livre célèbre, The Chang­ing Nature of Amer­i­can Pow­er qu’il a com­plété en 2004, Soft Pow­er: The Means To Suc­cess In World Pol­i­tics. Le soft pow­er, nous citons « met en forme les préférences de l’autre à tra­vers la cul­ture, les valeurs et les poli­tiques étrangères », (nous met­tons en car­ac­tères gras les derniers mots) ; en une phrase « la meilleure pro­pa­gande n’est pas la pro­pa­gande ». Ce soft pow­er n’exclut pas le hard pow­er, il le com­plète à moin­dre coût.

9. La haine, autre­fois objet de répul­sion devient autorisée. Les réseaux soci­aux améri­cains autorisent (encour­a­gent ?) leurs util­isa­teurs à appel­er au meurtre con­tre les russ­es et leurs dirigeants. Il fau­dra s’en sou­venir plus tard quand les « dis­cours de haine » seront de nou­veau ban­nis de manière uni­voque et vien­dront jus­ti­fi­er la censure.

10. Le refrain de l’UE, repris par nom­bre de jour­nal­istes amnésiques, « il s’agit de la pre­mière guerre en Europe depuis 1945 », n’est qu’un men­songe. En 1999 les avions de l’OTAN ont bom­bardé pen­dant 78 jours la Ser­bie, occa­sion­nant des cen­taines de morts civils.

Le sché­ma nar­ratif se pour­suit. À suiv­re, hélas.

Claude Chol­let

Voir aus­si : Con­flit rus­so-ukrainien : pourquoi nous atten­drons pour en parler

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