En cette rentrée des médias, l’arrivée de Léa Salamé au journal de 20h de France 2 n’est pas passée inaperçue : retour sur la grande première de la journaliste, entre crispation et modération.
Le 1ᵉʳ septembre n’a pas marqué seulement la rentrée des classes pour les écoliers : c’était aussi celle de Léa Salamé, qui présentait son tout premier journal de 20 heures sur France 2. La journaliste franco-libanaise a pris la relève d’Anne-Sophie Lapix, à l’issue de plusieurs années compliquées pour la chaîne, distancée par TF1 sur le terrain des audiences. À l’approche des municipales de 2026 puis de la présidentielle de 2027, le choix de Delphine Ernotte s’inscrit clairement dans une stratégie de reconquête : réattirer les responsables politiques à cette heure cruciale, eux qui, rebutés par le style jugé trop incisif de la précédente présentatrice, avaient progressivement déserté le plateau.
En 2022 déjà, Emmanuel Macron avait même refusé – dans un premier temps – d’accorder une interview à Anne-Sophie Lapix dans le cadre de la campagne présidentielle. S’il cédera finalement, il fera front commun avec Marine Le Pen quelques jours plus tard, refusant cette fois-ci catégoriquement que le débat d’entre-deux-tours soit animé par la journaliste de 53 ans. C’est finalement Léa Salamé qui avait été choisie pour mener cette confrontation décisive.
En cette rentrée médiatique, c’est donc cette dernière qui remplace pour de bon Anne-Sophie Lapix à la présentation du rendez-vous quotidien des Français sur le service public. Sa première édition – pour laquelle l’ex-matinalière de France Inter se serait entraînée tout l’été – n’est pas passée inaperçue. Voici les trois choses à retenir sur le baptême du feu de Léa Salamé au 20h de France 2.
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Une première entre sobriété et crispation
Ce lundi soir, Léa Salamé n’aura pas fait “péter le décolleté” pour ses débuts au journal de 20h de France Télévisions. Optant pour une tenue classique, dans les tons marine, la journaliste de 45 ans a choisi la discrétion, en contraste avec les tenues souvent colorées que portaient sa prédécesseure. L’introduction des titres, qui succède au traditionnel “Madame, Monsieur, bonsoir”, est largement maîtrisée, bien qu’un peu crispée. Les multiples entraînements que la journaliste avait mis en scène dans un spot publicitaire auront donc porté leurs fruits. On notera toutefois qu’au fil du journal, la présentatrice a semblé se libérer, installant un ton plus fluide et une atmosphère plus détendue. La crispation initiale a laissé place à une présence plus affirmée, donnant à ce premier essai les contours d’une entrée en matière mesurée.
De la réserve sur le terrain politique
La mesure, c’est également ce que l’on retient dans le choix éditorial des sujets présentés ce lundi soir. Léa Salamé a proposé une revue d’actualité axée sur les sujets de société, au nombre de quatre ce lundi soir. La météo et les intempéries causant un report de la rentrée des classes dans certains départements ont également occupé une part significative du journal, ainsi que l’actualité internationale et la suspicion de brouillage par les Russes du Falcon d’Ursula von der Leyen. Le climat politique actuel en France n’a été abordé que brièvement, avec l’édito politique de Nathalie Saint-Cricq sur le vote de confiance demandé par le Premier ministre François Bayrou, qui aura lieu le 8 septembre prochain. Léa Salamé a donc choisi de faire preuve de réserve sur le terrain politique, un sujet qui alimente déjà les critiques de ses détracteurs. Nombreux sont en effet ceux qui contestent sa nomination à la tête du 20 heures de France 2, en raison de sa relation avec Raphaël Glucksmann, député européen socialiste et potentiel candidat à l’élection présidentielle de 2027. Sa neutralité est aujourd’hui vivement contestée, alors même qu’elle avait assuré, au début de l’été, qu’elle se mettrait en retrait si son compagnon décidait de briguer l’Élysée.
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« Le patron préféré des Français » en premier invité
La nouvelle présentatrice a également choisi d’aborder la rentrée sous un angle économique, en s’intéressant à la hausse continue du prix des fournitures scolaires. Pour développer ce thème, Léa Salamé recevait Michel-Édouard Leclerc, dirigeant du groupe E. Leclerc, souvent présenté comme « le patron préféré des Français ». Dans cet exercice d’interview, la journaliste est apparue plus à l’aise, n’hésitant pas à questionner le milliardaire sur son image de « boomer privilégié ». L’intéressé, dont une possible candidature à la présidentielle de 2027 avait été suggérée en Une de Challenges en mai dernier, a martelé que seule la croissance sortirait la France de l’impasse économique actuelle. Interrogé sur l’hypothèse d’accepter la fonction de Premier ministre, il a affirmé préférer « le terrain ». Tout en revendiquant l’émancipation du politique, il a néanmoins assuré comprendre les partisans du mouvement « Bloquons tout », grande manifestation annoncée pour le 10 septembre prochain. Une invitation qui aura permis de faire le lien entre la position du patronat et les griefs des consommateurs.
Pour cette première, Léa Salamé aura donc misé sur la sobriété, la retenue et un équilibre délicat entre actualité sociale, économique et politique. Une stratégie de prudence, qui témoigne de sa volonté de rassurer le public tout en installant progressivement sa patte.
Reste désormais à savoir si ce style, entre fermeté et modération, saura convaincre sur la durée. Car au-delà de l’exercice inaugural, c’est bien sur le terrain des audiences que se jouera le véritable défi de la nouvelle figure du 20 heures.
Adélaïde Bolquère


















