Le site arabe Arabic Post publie en exclusivité les détails de l’offre que l’envoyée spéciale et conseillère du président Emmanuel Macron pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, Anne-Claire Legendre, a présenté à la direction du Hezbollah.
En visite au pays du cèdre à la mi-novembre, l’émissaire française a rencontré une délégation du Hezbollah, conduite par Mohammad Raad, chef du bloc parlementaire du parti chiite, officiellement pour échanger sur les incompréhensions qui régnaient encore au sujet du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah. Toute la presse locale en a parlé, mais sans rien dire concrètement de ce que l’envoyé de Macron était venue proposer à ce parti. L’Orient-Le-Jour se contente de s’interroger : « Qu’est venue faire Anne-Claire Legendre au Liban ? » La presse française n’en dit pas plus.
Le Hezbollah va-t-il écouter la France ?
Citant des sources diplomatiques occidentales, Arabic Post évoque une « offre globale » d’une teneur inédite. Principaux éléments de cette offre : la France offre ses garanties concernant la participation du Hezbollah à la formation du futur gouvernement futur, avec, en prime, une présence à des postes exécutifs « névralgiques ». En outre, Paris plaiderait pour le maintien des prochaines élections législatives à la date initialement prévue. Car, il semble que leur report pénaliserait, d’une certaine manière, le Hezbollah.
Plus osé encore, une réconciliation avec l’Arabie saoudite, principal soutien des adversaires du Hezbollah, permettrait à ce dernier de se replacer plus librement sur l’échiquier politique libanais. Enfin, la France promet de plaider la cause du Liban auprès des États-Unis, notamment sur la question des ressources énergétiques et de faire entrer ce pays dans le « club du gaz » méditerranéen.
Tout cela en échange d’un engagement clair et définitif du Hezbollah de remettre les armes à l’État libanais, comme le veut l’actuel gouvernement. Jusque-là, le Hezbollah se refuse obstinément à toute idée de déposer les armes – chose qu’il assimile à une capitulation. Mais il ne rejette pas l’offre française. Une véritable percée.
Selon la même source, la direction du Hezbollah dit avoir pris acte de cette proposition, et demande des clarifications sur le rôle américain, et des garanties – difficiles à obtenir, tout le monde en convient – de cessation des raids contre le Sud-Liban.
Ex-Huffington Post
Lancé en 2015 par l’ex-directeur général d’Al-Jazeera, Waddah Khanfar, au départ comme version arabe de Huffington Post (il existe une version française), avant d’être rebaptisée Arabic Post en 2018, ce média s’est vite fait une place de choix dans le paysage médiatique arabe.
Basé à Istanbul, et avec une ligne éditoriale fatalement proche de l’axe Doha-Ankara, Arabic Post tente néanmoins de se garder une marge de manœuvre dans ses ouvertures des évènements qui secouent le Moyen-Orient.
Sur la question libanaise, par exemple, et plus précisément les relations avec le Hezbollah, Arabic Post en parle avec plus d’aisance que les autres médias classés pro-résistance. Ce qui lui vaut cette réputation de média sérieux et crédible.
L’ombre de Waddah Khanfar
Or, la seule évocation de Waddah Khanfar fausse toutes les lectures. Homme lige du régime qatari, cet homme est à la création d’une kyrielle de structures médiatiques et d’ONG, dont le Global Editors Network. D’origine palestinienne, il a longtemps été correspondant de la chaine Al-Jazeera, en Afghanistan, puis en Irak, avant d’être propulsé au poste de directeur général de 2006 à 2011. Personnage à la fois controversé, il est souvent présenté comme un membre influent de l’Internationale des Frères musulmans. Ses détracteurs l’accusent volontiers d’avoir des liens avec la CIA.
En septembre 2011, le site WikiLeaks a publié une série de câbles diplomatiques mettant en lumière les activités américaines à l’étranger. Plusieurs câbles faisaient état de l’implication de Waddah Khanfar, alors patron d’Al-Jazeera, dans l’influence exercée sur la couverture médiatique de la guerre en Irak par la chaîne qatarie, « sur ordre des responsables de l’ambassade américaine au Qatar ». On est toujours, quinze ans plus tard, dans ce climat de suspicion.
Mussa A.


















