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Le rapport français sur les Frères musulmans divise les médias arabes

11 juin 2025

Temps de lecture : 4 minutes
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Le rapport français sur les Frères musulmans divise les médias arabes

Temps de lecture : 4 minutes

Ren­du pub­lic le 25 mai 2025, dans un con­texte de ten­sion accrue avec l’Algérie, le rap­port jette de nou­veaux éclairages sur une présence longtemps dénon­cée, mais vis­i­ble­ment tue pour ne pas avoir à provo­quer de fric­tions avec notam­ment l’émirat du Qatar, prin­ci­pal sou­tien de la Con­frérie, sou­tien du PSG et grand ami de la France. Il vient con­forter les mis­es en garde déjà émis­es par les ser­vices de ren­seigne­ments en Alle­magne, aux Pays-Bas, au Roy­aume-Uni, en Bel­gique, en Suisse et en Autriche.

Ces révéla­tions sur la poli­tique d’entrisme et d’influence menée par le mou­ve­ment des Frères musul­mans en France sont dif­férem­ment com­men­tées par les médias arabes les plus influ­ents. Preuve que l’islam poli­tique est tou­jours source de cli­vage dans cette par­tie du monde, y com­pris en Égypte, berceau de cette confrérie.

L’épouvantail de l’islamophobie

Dans le camp des porte-voix des Frères musul­mans, la chaine qatarie Al-Jazeera s’en est verte­ment pris au gou­verne­ment français, l’accusant de vouloir souf­fler sur la braise de « l’islamophobie », à tra­vers ce rap­port qui met en cause les réseaux liés à la Con­frérie. Dans un arti­cle dif­fusé sur son site Inter­net, ce média ose par­ler d’« islam­o­pho­bie d’État », dressée con­tre les musul­mans de France, et d’« une diver­sion » ou « instru­men­tal­i­sa­tion poli­tique » de la ques­tion à l’approche des élec­tions européennes.

L’auteur de l’article cite des fig­ures poli­tiques de gauche et des représen­tants de la com­mu­nauté musul­mane française, qui décrivent le rap­port comme un « pré­texte sécu­ri­taire » masquant des moti­va­tions élec­toral­istes. Comme dans la presse algéri­enne, le min­istre de l’Intérieur, Bruno Retail­leau, est soupçon­né d’entretenir la pres­sion sur cette com­mu­nauté pour se propulser au-devant de la scène.

« Instrument de répression »

Autre média financé par des Qataris, le site d’information Arabi21 abonde dans le même sens. Il estime, dans un arti­cle, que le rap­port « sert d’instrument de répres­sion et d’intimidation ». « L’objectif, y lit-on encore, n’est pas tant de lut­ter con­tre un péril réel que de détourn­er l’attention des électeurs français sur fond de ten­sions identitaires. »

Sur un ton plus véhé­ment, Ara­bic Post, site con­nu aus­si pour être une cour­roie de trans­mis­sion des thès­es islamistes, titre : « Macron va détru­ire notre pays ! », reprenant les mots d’un dirigeant asso­ci­atif musul­man en France. Le rap­port y est décrit comme « une attaque con­tre l’islam dans son ensem­ble, et ne con­cerne donc pas une organ­i­sa­tion bien ciblée ». En l’occurrence, les Frères musulmans.

Basé en Turquie, Ara­bic Post suc­cé­dait depuis 2018 à l’édition arabe de Huff­ing Post, alors dri­vé par l’ancien directeur général d’Al-Jazeera, Wadah Khan­far, et ayant son siège à Londres.

Enfin, Al-Ara­by Al-Jadeed, quo­ti­di­en de grande audi­ence parais­sant à Lon­dres, évoque « un cli­mat de chas­se aux sor­cières con­tre les musul­mans », et souligne l’absence de déf­i­ni­tion pré­cise de ce qu’est « l’entrisme islamiste » dans le rap­port. Le jour­nal con­teste la fia­bil­ité des chiffres avancés (mais n’en donne pas d’autres) et alerte sur les risques d’atteinte aux lib­ertés publiques en France (sic).

« Un document accablant »

À l’opposé, des médias réputés engagés con­tre l’islamisme ont bien accueil­li la pub­li­ca­tion du rap­port, à l’heure où les Frères musul­mans sem­blent partout acculés.

Al-Youm 7, quo­ti­di­en égyp­tien pro­gou­verne­men­tal, écrit le 22 mai que la lev­ée du secret sur le rap­port français aurait dû inter­venir « depuis longtemps ». Citant des experts en sécu­rité, le jour­nal accrédite la thèse selon laque­lle les Frères musul­mans auraient pro­fondé­ment noy­auté les milieux asso­ci­at­ifs et religieux français, « avec un agen­da poli­tique déguisé ».

Sur la même lancée, la chaine Sky News Ara­bia, basée à Dubaï, met en relief les pro­pos du min­istre français de l’Intérieur, appelant à traiter les Frères musul­mans comme le ter­ror­isme ou le traf­ic de drogue. Se dis­ant con­forté par les révéla­tions français­es, le média émi­rati estime qu’il est urgent de pren­dre des mesures rad­i­cales pour « con­tenir l’influence de la con­frérie islamiste ».

Même tem­po chez Al-Ara­biya, chaîne de télévi­sion à cap­i­taux saou­di­ens et grand con­cur­rent d’Al-Jazeera. Dans un compte-ren­du dif­fusé le 21 mai, elle sou­tient que la France « fait face au dan­ger crois­sant des Frères musul­mans ». Le rap­port est décrit comme un « doc­u­ment acca­blant », révélant « à la fois l’étendue des réseaux dirigés par la con­frérie et la mol­lesse de la réponse insti­tu­tion­nelle jusque-là ».

Mus­sa A.

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