Élue à la présidence des Scouts et Guides de France le 14 juin 2025, Marine Rosset, conseillère municipale – sous l’étiquette du Parti socialiste – et lesbienne, ne fait pas l’unanimité. Ce choix stratégique remet en question l’orientation pédagogique du mouvement, pourtant « apolitique » et catholique depuis son origine.
Il est loin le temps du scoutisme du père Sevin et de Guy de Larigaudie, celui où le catholicisme traditionnel et les valeurs patriotiques guidaient les jeunes Scouts de France. Depuis le 14 juin 2025, c’est Marine Rosset qui désormais préside le mouvement des Scouts et Guides de France (SGDF). Le moins que l’on puisse dire, c’est que son parcours et ses positions font débat au sein du premier mouvement de scoutisme de France, mais également au-delà. Mais, pourquoi cette jeune femme, guide puis cheftaine pendant de longues années, suscite-t-elle autant de controverses ?
Âgée de 39 ans, Marine Rosset est élevée dans le 16ᵉ arrondissement de Paris, avant de rejoindre les bancs de Sciences Po. Elle enseigne ensuite l’histoire et la géographie en Seine-Saint-Denis pendant 8 ans, jusqu’en 2018, date à laquelle elle en rejoint le conseil départemental, pour s’occuper « des sujets d’éducation, de jeunesse et de patrimoine ». En parallèle, elle devient administratrice du mouvement des SGDF en 2019, puis vice-présidente en 2022. La jeune femme connait donc en profondeur l’importance de la pédagogie, de l’éducation des enfants, et de l’encadrement de la jeunesse.
Il ne s’agit pas là de son seul engagement, et c’est bien le suivant qui éveille la critique. En effet, depuis ses 21 ans, Marine Rosset est encartée au Parti socialiste, pour lequel elle va participer aux élections municipales de 2014. Elle est alors sur la liste candidate à la mairie du 5ᵉ arrondissement de Paris. Elle en devient conseillère municipale en 2020, avant d’être investie par la NUPES pour les élections législatives de 2022, puis par le NFP en 2024 pour les législatives anticipées. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’elle insiste auprès d’Émile – le magazine de Sciences Po – sur l’importance de son combat pour protéger « le droit des femmes, des homosexuels, le droit à avorter », contre la « peste brune » du Rassemblement national.
Des sujets qui la touchent personnellement : « J’ai un enfant qui a un an et demi (…). Cet enfant a deux mères. » La jeune femme, homosexuelle, se bat pour la PMA qui a permis à son couple d’accueillir un premier enfant. Des positions qui créent du remous autour du mouvement, pourtant ouvertement « apolitique », et dont elle occupe à présent la présidence.
« Des positions qui vont directement à l’encontre des enseignements de l’Église »
Pour l’abbé Clément Barré, aumônier des SGDF dans le diocèse de Bordeaux, cette élection passe mal. « Je trouve surprenant qu’un mouvement qui insiste sur son ouverture à tous élise à sa tête une élue, donc partisane », souligne-t-il sur X, critiquant également de façon sous-jacente les propos pro-IVG de Marine Rosset. Il n’est pas seul à voir ce choix d’un mauvais œil : selon nos confrères du Monde, l’aumônier général des SGDF, Xavier de Verchère, aurait manifesté ouvertement son opposition au conseil d’administration.
Dans la presse, certains médias comme Boulevard Voltaire ont pointé du doigt son engagement politique au sein du Parti socialiste, parlant d’un choix « osé », qui donne une « nouvelle coloration » au mouvement scout. Marianne parle d’un « profil atypique » pour décrire la jeune femme.
Cette dernière a cependant reçu une vague de soutien du côté des élus de son parti. « La haine ne gagnera pas. Les Scouts et Guides de France viennent d’élire une merveilleuse présidente ! », déclare sur X l’eurodéputée socialiste Emma Rafowicz. Florence Hérouin Léautey, députée de Seine-Maritime, d’appuyer : « Les voix réactionnaires ne feront pas taire la force de l’éducation populaire ».
« Insupportables sont les voix réactionnaires qui tentent d’imposer leur intolérance et leur haine », s’insurge Michaël Delafosse, maire de Montpellier.
Un choix dans la continuité de la ligne pédagogique des SGDF
Élue à 22 voix sur 24, Marine Rosset fait quasiment l’unanimité au sein du conseil d’administration des SGDF. L’association propose une pédagogie axée sur le « vivre ensemble », où les enfants évoluent « sans être enfermés dans des rôles sociaux ou des modèles traditionnellement masculins ou féminins ».
Cette dimension résolument progressiste était d’ailleurs celle prônée par le prédécesseur de l’actuelle présidente, Tanguy Claquin, qui annonçait en début de mandat vouloir « offrir le scoutisme à toujours plus d’enfants, d’origines et d’horizons plus variés ».
Marine Rosset conserve cette idée, insistant sur les trois axes qu’elle souhaite mettre en avant durant son mandat : la Foi, l’engagement et l’accueil. « Notre tente est large, et à ce titre, notre mouvement est précieux dans l’Église », déclare-t-elle dans son premier communiqué comme présidente. Plus que jamais, les Scouts et Guides de France s’inscrivent ainsi dans l’air du temps, favorable au progrès plutôt qu’à la tradition.
Gersende Barrera