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Accueil | Portraits | Rodolphe Belmer

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13 novembre 2022

Temps de lecture : 12 minutes

13 novembre 2022

Accueil | Portraits | Rodolphe Belmer

Rodolphe Belmer

Temps de lecture : 12 minutes

Il a pris la direction générale de TF1 le 27 octobre 2022 : à cinquante-trois ans, Rodolphe Belmer a succédé à Gilles Pélisson à la tête du groupe privé, passant de directeur général à président directeur général en février 2023…

Né à Rennes le 21 août 1969, Rodolphe Belmer est le fils du Général de brigade Jean-Marie Belmer ; il a fait ses études au Pry­tanée nation­al mil­i­taire de La Flèche, sort diplômé d’HEC en 1992. Il est mar­ié avec Coralie dont il a qua­tre enfants (Arthur, Juli­ette, Gré­goire et Joséphine).

Canal+ : de succès en tourments

Il était arrivé à Canal+ après un pas­sage de trois ans au cab­i­net de con­seil McK­in­sey et était devenu le directeur de la stratégie et du développe­ment de Canal+ Dis­tri­b­u­tion et Canal­Stael­lite. Grim­pant les éch­e­lons tour à tour, il atteint en 2012 novem­bre 2012 la direc­tion du groupe. A la tête de la chaîne, il relance les plages en clair, encour­age Yann Barthès à créer Le Petit Jour­nal et lance les pre­mières séries orig­i­nales de la chaînes (Les Revenants, Le Bureau des Légen­des, Engrenages, Ver­sailles…).

En 2015, il se voit écarté par le nou­v­el action­naire de référence du groupe, Vin­cent Bol­loré. Après une ren­con­tre entre les deux hommes, le 1er juil­let, durant laque­lle Belmer défendra l’ADN de Canal+, ce dernier est remer­cié. Bol­loré le rem­place alors par Maxime Saa­da, ancien bras droit de Belmer qui avait partagé avec lui le bureau 410 du cab­i­net parisien de McK­in­sey. Après ce limo­geage, il demeure toute­fois proche des réseaux médi­a­tiques, con­seil­lant le groupe pub­lic France Télévi­sions – pour lequel il fut pressen­ti comme poten­tiel can­di­dat à la présidence.

Atos : un passage calamiteux, une réception en parachute dorée

Il ne tient que six mois à la tête d’Atos, grande entre­prise française de numérique comp­tant 110 000 salariés. C’est sous le coup d’une crise de con­fi­ance bour­sière que le groupe infor­ma­tique français Atos se sépare de son directeur général, rem­plaçant Rodolphe Belmer par Nour­dine Bih­mane le 13 juil­let 2022. Belmer démis­sionne alors d’une entre­prise dont le cours de l’action atteint ses scores his­torique­ment les plus bas – 11,06 euros au 13 juil­let 2022.

Ses derniers mois à la tête du groupe auront été chao­tiques : annonçant au 14 juin 2022 un plan de scis­sion du groupe — partagée entre ses activ­ités décrois­santes de gérance d’une part et celles, en crois­sance, comme la cyber-sécu­rité – le directeur général avait sur­pris les action­naires. Il serait par­ti de l’entreprise sur fonds de désac­cords avec le prési­dent du con­seil d’administration du groupe, Bertrand Meu­nier. Son court man­dat aura égale­ment été la source d’agacement de ceux qui voy­aient d’un mau­vais œil la pour­suite d’achats de mis­sions de con­seil notam­ment à McK­in­sey dont Belmer fut, trois ans durant (1998–2001) un man­ag­er… Une immix­tion du cab­i­net de con­seil mal perçu par cer­tains cadres de l’entreprise, déplo­rant que « pen­dant plusieurs mois, ils [aient] joué au Mec­ca­no sans jamais échang­er avec un seul collaborateur ».

La filiale de Bouygues à la recherche d’un nouveau capitaine

La nom­i­na­tion, le 23 sep­tem­bre 2022, de Rodolphe Belmer à la direc­tion de TF1 arrive dans le con­texte de l’échec de la fusion du groupe avec le groupe M6, qui n’a pu être mené à bien face aux con­di­tions pro­posées par l’Autorité de la Con­cur­rence. L’affaire aura coûté plus de 17 mil­lions d’euros en frais d’avocat et de con­seil et occupé les équipes seize mois durant.

C’est à Mar­tin Bouygues, prési­dent du groupe Bouygues et à Olivi­er Rous­sat, directeur général dudit groupe, que l’on doit l’arrivée de cette nou­velle tête. Bouygues aurait ren­con­tré Belmer en Bre­tagne, à l’occasion des vacances d’été – l’un pas­sant ses vacances à Saint-Malo, l’autre à Dinard. Il était en con­cur­rence avec Alexan­dre Bom­pard. C’est la pre­mière fois que Bouygues fait appel à un dirigeant jamais passé par l’une de ses filiales.

Par­al­lèle­ment, le groupe Bouygues a remer­cié Gilles Pélis­son après sept ans de bons et loy­aux ser­vices ; ce dernier, en mau­vais ter­mes avec Olivi­er Rous­sat, devien­dra Prési­dent du con­seil d’administration puis directeur général adjoint chargé des médias et du développement.

Après cinq mois comme directeur général, Belmer devien­dra, le 13 févri­er 2023, PDG du groupe. A l’occasion de sa nom­i­na­tion à la tête de TF1, il quitte le con­seil d’administration de Net­flix. La démis­sion, qui prend effet dès son entrée en fonc­tion au sein du groupe privé, le 27 octo­bre 2022, n’aurait pas été motivée par un désac­cord avec la société, si l’on en croit la Secu­ri­ties and Exchange Com­mis­sion – « gen­darme » de la Bourse de New-York. Selon cer­taines sources, « ce poste de Net­flix [aura quoiqu’il en soit] été sa carte de vis­ite aux yeux de Mar­tin Bouygues et de TF1 ». Pour d’autres, à l’image de Romain Bessi, PDG de Newen, fil­iale de pro­duc­tion de TF1, c’est à son seul mérite qu’il doit cette pres­tigieuse nom­i­na­tion. « Sur le papi­er, explique ce dernier, Rodolphe était un ovni, un avec un pro­fil mar­ket­ing très éloigné de l’esprit de la chaîne […] Pour­tant, il a rapi­de­ment con­va­in­cu tout le monde par son amour des pro­grammes, sa déter­mi­na­tion et son agilité intellectuelle ». 

Quelles perspectives pour Belmer à TF1 ?

À la tête du groupe TF1, Belmer retrou­vera de nom­breuses fig­ures passées par Canal+. Il devra faire face à de mul­ti­ples défis, dont la mon­tée des plates-formes en ligne et la baisse de la durée d’écoute de la télévi­sion. Il pour­rait procéder à des sup­pres­sions de postes pour amélior­er la rentabil­ité de la chaîne et régler le con­flit latent avec le groupe Canal+, que l’appareil judi­ci­aire a récem­ment con­forté dans son choix de ne plus dif­fuser les chaînes du groupe TF1.

Les deux anciens col­lègues de McK­in­sey se retrou­vent ain­si en con­fronta­tion ; car avec l’arrêt de la dif­fu­sion des chaînes du groupe TF1 par Canal+, les audi­ences du groupe dont Belmer prend la tête ont été grevées, per­dant 500 000 téléspec­ta­teurs au quo­ti­di­en ; une cat­a­stro­phe qui encour­age TF1 à revoir le mon­tant du con­trat de dis­tri­b­u­tion d’une ving­taine de mil­lions d’euros réglé par Canal.

Formation

Parcours professionnel

  • 1992–1998. Col­lab­o­ra­teur au départe­ment mar­ket­ing de Proc­ter & Gam­ble France.
  • 1998–2001. Man­ag­er chez McKinsey.
  • Octo­bre 2001 – jan­vi­er 2003. Directeur de la stratégie et du développe­ment de Canal+ Dis­tri­b­u­tion et Canal Satel­lite.
  • Jan­vi­er 2003 – 1er décem­bre 2003. Directeur mar­ket­ing et stratégie du groupe Canal+.
  • 2003 – 19 octo­bre 2012. Directeur général adjoint du groupe Canal+.
  • 1er décem­bre 2003 – juil­let 2015. Directeur général de Canal+ SA – actuelle Société d’Edition de Canal Plus SA depuis mai 2011.
  • Mai 2005 – 31 décem­bre 2013. Directeur général délégué puis directeur général de Canal+ France.
  • Juin 2009. Mem­bre de la com­mis­sion Médias et diver­sité et coprési­dent du pôle programmes.
  • 19 octo­bre 2012 – juil­let 2015. Mem­bre du direc­toire et directeur général de Groupe Canal+.
  • 24 août 2015. Devient con­seiller de la prési­dente de France Télévi­sions Del­phine Ernotte.
  • 1er décem­bre 2015 – 1er mars 2016. Directeur général d’Eutel­sat.
  • 1er mars 2016 – jan­vi­er 2022. Directeur général d’Eutel­sat.
  • 7 avril 2015 – novem­bre 2019. Mem­bre et vice-prési­dent (25 sep­tem­bre 2017) du con­seil de sur­veil­lance de Mediawan.
  • Depuis le 22 jan­vi­er 2018. Admin­is­tra­teur de Net­flix Inc. (États-Unis).
  • Depuis octo­bre 2019. Vice-prési­dent puis prési­dent du comité stratégique de Brut.
  • 23 octo­bre 2021 – 13 juil­let 2022. Admin­is­tra­teur d’Atos.
  • Jan­vi­er 2022 – 13 juil­let 2022. Directeur général d’Atos SE par nom­i­na­tion du 21 octo­bre 2021.

Autres fonctions

  • Depuis févri­er 2017. Prési­dent du fonds de dota­tion Auteurs Sol­idaires.
  • Depuis sep­tem­bre 2017. Prési­dent du fes­ti­val Séries Mania Lille / Hauts-de-France.
  • Depuis févri­er 2018. Admin­is­tra­teur du média vidéo en ligne Brut.
  • Depuis décem­bre 2020. Admin­is­tra­teur de Voodoo.

Parcours militant

Non ren­seigné.

Distinctions

  • 2017. Nom­mé Offici­er des Arts et des Lettres.

Ce qu’il gagne

En 2016, Rodolphe Belmer perçoit, alors qu’il est Directeur général d’Eutelsat Com­mu­ni­ca­tions, une rémunéra­tion glob­ale de 1 276 907 € ; il se place ain­si à la 87ème place des patrons les mieux payés de l’année. Au titre de l’exercice 2019–2020, il perçoit en rémunéra­tion fixe la somme de 650 000 € annuelle ; sa rémunéra­tion vari­able sur le même exer­ci­ce atteint les 533 488 €. Par ailleurs, le Con­seil d’administration en date du 30 juil­let 2020 de l’entreprise avait décidé de l’attribution fic­tive défini­tive de 18 080 actions (représen­tant un mon­tant de 167 532 euros) à son directeur général.

En qual­ité de directeur général d’Atos, Rodolphe Belmer reçoit une rémunéra­tion annuelle fixe s’élevant à 1 200 000 euros brut. A l’occasion de son départ bru­tal, il démis­sionne avec un para­chute doré – la somme coquette de 1,8 mil­lions d’euros de bonus.

Il l’a dit

« J’ai hérité du bon sens bre­ton, je suis ter­rien, rationnel », cité lors du dis­cours de Pas­cal Rog­a­rd, prononcé le 15 jan­vi­er 2018 à la SACD lors de la remise à Rodolphe Belmer des insignes d’Officier dans l’Ordre des Arts et des Lettres.

« Nous saurons […] répon­dre à aux mul­ti­ples enjeux du nou­veau monde des médias et ouvrir au groupe TF1 de nou­velles per­spec­tives de développe­ment et de crois­sance à l’ère du numérique », à l’occasion de son man­dat à la tête de TF1, cité par AFP, 25 octo­bre 2022.

Ils l’ont dit

« Il com­bine rigueur et créa­tiv­ité, il four­mille d’idées et mouline très viteIl a aus­si le sens de ses lim­ites et de l’au­todéri­sion, c’est ce qui le rend attachant. », Pierre-Yves Rous­sel, asso­cié chez McK­in­sey, cité par Straté­gies, 20 novem­bre 2003.

« Il est réac­t­if, c’est un homme très doux, très déli­cat, très fin dans tous les sens du terme. Il a la pas­sion de com­pren­dre et de faire com­pren­dre. C’est un homme qui tra­vaille en équipe. », Jean-Luc Delarue, cité par Straté­gies, 20 novem­bre 2003.

« Il com­bine une intel­li­gence, une rapid­ité de réflex­ion et un véri­ta­ble amour des pro­grammes. C’est un type qui bouffe de la télé », Guil­laume de Vergès, cité par Straté­gies, 20 novem­bre 2003.

« Ce qui m’a frap­pé, c’est qu’il avait à la fois la tête aux chiffres et une sen­si­bil­ité aux con­tenus. Dans un univers où tant de gens sont hâbleurs et peu fiables, c’est un type droit, très intel­li­gent et avec du car­ac­tère », Denis Olivennes, prési­dent de Lagardère Active, alors directeur général de Canal+, cité par Straté­gies, 20 décem­bre 2012.

« Alors que beau­coup s’é­coutent par­ler, lui, il écoute. Sous sa direc­tion, Canal+ a redonné une image très pos­i­tive de la fic­tion française, capa­ble d’être l’é­gale de séries améri­caines. Tout en venant du mar­ket­ing, il a su assim­i­l­er les codes de la créa­tion. Il a com­pris que Canal+ était d’abord une entre­prise de spec­ta­cle. En cela, il me fait penser à Pierre Les­cure », Pas­cal Rog­a­rd, directeur général de la Société des auteurs com­pos­i­teurs dra­ma­tiques (SACD), cité par Straté­gies, 20 décem­bre 2012.

« Rodolphe a une forme de dis­tan­ci­a­tion par rap­port à ce milieu qui est indis­pens­able pour réus­sir dans ce méti­er. Il faut aimer ce qu’on fait, mais ne pas en être esclave. Beau­coup de gens sont admi­rat­ifs de l’en­vi­ron­nement dans lequel ils sont, et c’est très mau­vais car ils per­dent alors toute ratio­nal­ité », Bertrand Méheut, cité par Straté­gies, 20 décem­bre 2012.

« Il est frontal, direct mais ce n’est pas un tor­du », Bruce Tou­s­saint, cité par Straté­gies, 20 décem­bre 2012.

« Son par­cours à la tête de plusieurs grands groupes français, lead­ers et inter­na­tionaux, son expéri­ence dans le secteur des médias et le stream­ing con­stituent les meilleurs atouts pour relever les défis qui sont devant nous et con­duire le développe­ment du Groupe TF1 sur le long terme », Gilles Pélis­son, cité par Le Monde, 25–26 sep­tem­bre 2022.

« Rodolphe est réfléchi et mesuré », Iris Knobloch, prési­dente du Fes­ti­val de Cannes, citée par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« Rodolphe est le bon homme, au bon endroit, au bon moment. Il va garder à l’esprit l’héritage de TF1 tout en veil­lant à ce qu’elle prenne une posi­tion de leader dans le nou­veau monde du diver­tisse­ment »., à pro­pos de sa nom­i­na­tion à TF1, par Iris Knobloch, prési­dente du Fes­ti­val de Cannes, citée par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« [Rodolphe Belmer est un] HEC ana­ly­tique qui com­prend la télévi­sion et sait la dévelop­per ; [il a] des ful­gu­rances impres­sion­nantes ». , Maxime Saa­da, cité par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« Il a l’atout rare d’avoir une vision à la fois indus­trielle et cul­turelle. […] Il a un excel­lent rap­port aux tal­ents. », Ara Aprikian, directeur général adjoint des con­tenus de TF1, cité par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« C’était une erreur de cast­ing dès le départ. Il voulait telle­ment par­tir d’Eutelsat qu’il n’a pas bien regardé le dossier. C’est un man­ag­er tout le temps sur la défen­sive, qui manque de liant et ne sait pas bien tra­vailler en équipe »., un mem­bre du groupe Atos, à pro­pos du pas­sage de Belmer dans l’entreprise, cité par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« C’est un gars sym­pa et très intel­li­gent mais qui reste mal­heureuse­ment un con­cur­rent », Nico­las de Tav­er­nost, cité par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« C’est le meilleur spé­cial­iste des con­tenus », Cyril Linette, ex directeur général du PMU, cité par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« Belmer est rapi­de­ment sor­ti du lot grâce à sa triple expéri­ence Canal+, Eutel­sat et Net­flix, dont il est mem­bre du con­seil d’administration depuis 2018. Il coche toutes les cas­es. Il con­naît la télévi­sion […], les télé­coms, la dis­tri­b­u­tion, et il maîtrise l’univers des plate­formes délinéarisées inter­na­tionales ». , un proche de Bouygues à l’occasion de sa nom­i­na­tion à TF1, cité par Le Point, jeu­di 20 octo­bre 2022.

« Quand il par­le de médias, il par­le de façon enflam­mée, pas­sion­née », Bertrand Meu­nier, prési­dent du con­seil d’administration du groupe infor­ma­tique Atos, AFP, 25 octo­bre 2022.

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