Le comité d’éthique de BFMTV a jugé légitime le report d’une enquête pour préserver les négociations avec Satisfy, société du présentateur et homme d’affaire Jacques Essebag dit « Arthur ». Saisi par une journaliste dénonçant une atteinte à l’indépendance, le comité a privilégié les intérêts stratégiques du groupe CMA Média.
En mars 2025, une journaliste du Syndicat national des journalistes (SNJ) a saisi le comité d’éthique de BFMTV, dénonçant une « atteinte grave » à l’indépendance journalistique. En cause : le report d’une enquête de BFM Business sur l’émission « Qui veut être mon associé ? », produite par Satisfy, société d’Arthur. Prête début mars, cette investigation, qui révélait le faible taux de contrats signés après les promesses télévisées, a été repoussée au 20 mars sur décision de la direction. Motif ? Éviter de compromettre les négociations en cours avec Satisfy, productrice également du Bigdil, relancé avec succès sur RMC Story, chaîne du groupe CMA Média.
Un report justifié par le comité d’éthique
Le 5 mai, le comité d’éthique, présidé par l’avocat Félix de Belloy, a rendu un avis favorable à cette décision. Selon lui, le report était justifié par « l’inadéquation » d’une diffusion immédiate, compte tenu des « intérêts stratégiques » du groupe, alors en discussions avec Satisfy pour de nouveaux numéros du Bigdil. Composé de membres majoritairement renouvelés depuis l’arrivée de Rodolphe Saadé comme actionnaire majoritaire en juillet 2024, le comité a minimisé l’incident, soulignant la brièveté du report et l’absence de modification du contenu de l’enquête. « Aucune intervention n’a visé à protéger un annonceur ou un actionnaire », a‑t-il assuré.
Lors d’une réunion le 6 mai avec les sociétés de journalistes de BFMTV, BFM Business, RMC et La Tribune Dimanche, Olivier Mazerolle, membre du comité et ex-directeur de l’information de France 2, a défendu la décision : « Il faut bien que l’entreprise gagne de l’argent. » Une position qui a indigné la journaliste du SNJ, surprise que le comité prenne en compte les intérêts financiers dans son jugement.
Par ailleurs, lors du comité social et économique (CSE) du 15 mai, les représentants des journalistes ont exigé le départ de Fatiha Agag-Boudjahlat, membre du comité d’éthique. Condamnée en février 2025 pour diffamation envers Rokhaya Diallo, avec 2 000 € de dommages et intérêts et 1 500 € de frais de justice, elle est aussi critiquée pour des tweets qualifié d’injurieux. Seule rescapée de l’ancienne composition du comité, sa présence est jugée incompatible avec les valeurs d’éthique.
Rodolphe Chalamel