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Comment l’État va créer du chômage dans l’imprimerie

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13 mars 2014

Temps de lecture : 3 minutes
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Comment l’État va créer du chômage dans l’imprimerie

Temps de lecture : 3 minutes

Les pouvoirs publics injecteront environ 10 millions d’euros dans la construction en Seine et Marne de la nouvelle imprimerie Newsprint, prévue en 2014. À terme, le centre, où seront rapatriés plusieurs hebdomadaires à gros tirages, pourrait générer plusieurs centaines de suppressions de postes.

Un comble ! Déjà en sur­ca­pac­ité de 40%, les imprimeries de labeur d’Ile de France seront a pri­ori flan­quées d’un nou­veau cen­tre, Newsprint, qui devrait être opéra­tionnel en 2015. Le pro­jet date de 2009 et s’in­scrit dans le cadre de l’ac­cord sur la réduc­tion des effec­tifs des ouvri­ers du Livre CGT dans la presse nationale et régionale. Rota­tivistes et dis­trib­u­teurs, payés en moyenne 4800 euros (sur 13 mois), ont ain­si con­servés leurs juteux émol­u­ments jusqu’à la retraite. A ce traite­ment favor­able, s’est de sur­croît ajoutée à l’époque la fameuse prime “à la valise”. Le plan, dit “imprime”, large­ment sub­ven­tion­né par l’É­tat, antic­i­pait aus­si l’émer­gence de la nou­velle imprimerie. Le Monde, en sur­ef­fec­tifs dans son imprimerie d’Evry, y voit l’oc­ca­sion de reclass­er 35 ouvri­ers. Il financera Newsprint à hau­teur de cinq mil­lions d’eu­ros (payés en plusieurs fois), tan­dis que le groupe Ric­cobono, qui imprime déjà la presque total­ité des quo­ti­di­ens nationaux, emprun­tera quinze mil­lions d’eu­ros auprès des ban­ques. Le Fonds stratégique pour le développe­ment de la presse (FSDP) fourni­ra le reste.

L’u­til­i­sa­tion de cet argent pub­lic est désor­mais dans le col­li­ma­teur de L’U­nion nationale de l’im­primerie et de la com­mu­ni­ca­tion. L’or­gan­i­sa­tion patronale de la fil­ière imprimerie dénonce une dis­tor­sion de con­cur­rence désas­treuse pour le secteur et a saisi en décem­bre 2013 l’Au­torité com­pé­tente. Car, comme les autres groupes édi­teurs de quo­ti­di­ens nationaux, Le Monde s’est aus­si engagé à assur­er un plan de charges à la future usine. Ses heb­do­madaires Téléra­ma et Cour­ri­er inter­na­tion­al, mais aus­si Le Figaro mag­a­zine (groupe Figaro) et Pèlerin (Bayard presse), se retrou­veront prob­a­ble­ment dans le giron de Newsprint. Alors que 316 entre­pris­es d’im­pres­sion, de brochage et de routage ont fer­mé en 2013 (sur 4850), le nou­v­el acteur pour­rait ain­si occa­sion­ner env­i­ron 400 licen­ciements (sur 5000) en région parisi­enne. Ce sont des cen­taines de mil­liers d’ex­em­plaires que les deux imprimeries majeures d’Ile de France, Mau­ry et Sego, risquent en effet de per­dre. L’U­nic attaque aus­si la légal­ité de l’u­til­i­sa­tion du FSDP non par pour financer l’in­no­va­tion (c’est son rôle) mais pour encore accroître la sur­ca­pac­ité des moyens indus­triels existants.

Afin d’as­sur­er la paix sociale, et ne pas se met­tre à dos le puis­sant syn­di­cat du Livre CGT, pou­voirs publics et édi­teurs de PQN sont une fois de plus main dans la main. Or, le statu quo entretenu depuis 1946 par les patrons avec le Livre, capa­ble d’empêcher la presse de paraître à l’éch­e­lon nation­al, est l’une des raisons du chaos accéléré frap­pant les jour­naux. Pour cette organ­i­sa­tion, “qui ne s’est tou­jours pas remise de la chute du mur de Berlin en 1989″, selon un bon con­nais­seur de la Fil­pac CGT, préserv­er coûte que coûte les avan­tages acquis de ses adhérents (moins de 2000) sem­ble bien plus impor­tant que l’ex­tinc­tion pro­gram­mée des quo­ti­di­ens papiers.

Crédit pho­to : camille­fab­ro via Flickr (cc)